mercredi 23 octobre 2013

Comment un homme s'est emparé de l'or de la Chine

L'histoire de la Chine et de son obsession pour l’or a été ravivée cette année, comme nous le prouvent les chiffres des importations effectuées via de Hong Kong et négociées sur le Shanghai Gold Exchange.

Mais au vu des articles que nous, commentateurs du marché de l’or, écrivons au sujet de l’amour de la Chine pour l’or, il est surprenant de constater qu’il y a moins de cent ans, le pays perdait l’équivalent de milliers d’années de réserves.

Dans les années 1930, le Shanghai Gold Business Exchange était le plus important centre de l’or en Asie. L’amour de la Chine pour l’or lui a valu d’être la victime de deux épisodes de pillages. Le premier date de 1937, alors que les Japonais ont envahi la Chine et se sont allègrement servi dans les 6.600 tonnes d’or qui reposaient dans la capitale de Nankin.

Le second est un pillage bien moins célèbre, celui de l’or qui a été emporté hors de Chine vers Taïwan entre 1948 et 1949 par un parti nationaliste sur le point d’être évincé.

En 1948, le président du gouvernement du Kuomintang (KMT), Chiang Kai-Chek, perdait la guerre civile contre les communistes au nord-est de la Chine. Il commença à organiser sa retraite vers Taïwan, et avait bien l’intention d’emporter l’or de la Chine avec lui.

La retraite du gouvernement de Chiang Kai-Chek à Taïwan en 1949 est l’un des évènements clés de l’histoire contemporaine de la Chine. Elle a non seulement signalé une transformation capitale du futur politique et social du pays, mais l’a aussi laissé avec très peu d’or pour soutenir l’établissement de la monnaie saine qu’il désira plus tard instaurer.

les quantités d'or déplacées varient en fonction des sources de 3 à 5 millions de taels (113,6 – 115,2 tonnes). Dans son ouvrage The Archives of Gold publié en 2010, le Dr. Wu Sing-yung explique comment son père (directeur des finances pour le gouvernement du KMT) a participé à l’organisation de l’opération qui a découlé sur le transport de plus de 4 millions de taels d’or depuis Shanghai vers Taïwan. Un tael représente 37,2 grammes d’or.

Le gouverneur de la banque centrale Yu Hung-chun et le directeur des finances ont reçu l’ordre du président de transporter l’or du pays jusqu’à Taïwan.

Une opération secrète

Une première cargaison d'or fut déplacée le premier décembre 1948. Deux des 4,6 millions de taels d’or appartenant au Trésor furent montés sur le Hai Xing en partance pour Keelung, au nord de Taïwan. Le garde des côtes était escorté du navire Mei Ching, qui fit plus tard défection aux communistes, soulignant ainsi le risque représenté par le transport d’une cargaison si précieuse et poussant Chiang à se demander qui était impliqué.

Par chance, un journaliste Britannique a pu noter le départ de cette première cargaison d’or depuis Shanghai. En regardant par sa fenêtre du cinquième étage, il a pu observer des hommes entrant et sortant de la banque centrale en file indienne, transportant chacun deux paniers attachés de chaque côté d’une cane de bambou. Une fois sortis de la banque, ils montaient sur une passerelle de bois pour entrer dans un cargo amarré devant l’Hôtel de la Paix (selon l’auteur William J. Gingles).

Alors qu’il commença à réaliser l’importance de ce dont il était témoin, Sterling Seagrave (dans The Soong Dynasty) nous explique que Vine aurait envoyé un télégraphe à son bureau de Londres, expliquant que ‘l’or de la Chine était transporté hors de la banque centrale à la manière traditionnelle’.

Vine écrivit plus tard ‘Je ne peux que difficilement croire ce que j’ai vu. Une file de coollies qui sortait de la banque… J’ai même pu voir le détail de leurs chapeaux, et leurs uniformes de tuniques indigo et de larges pantalons, alors qu’ils transportaient de l’or dans les paniers installés des deux côtés de leurs canes de bambou pour le charger dans un navire en partance pour Taïwan’.

Beaucoup refusaient de croire que Chiang ait pu manigancer une telle chose, mais le rapport écrit par le journaliste ne tarda pas à déclencher une panique bancaire à l’échelle nationale.

Trente jours plus tard, le garde côte utilisé pour transporter les deux premiers millions de taels d’or vers Taïwan quitta à nouveau le port, cette fois-ci chargé de 600.000 à 900.000 taels d’or et d’importantes quantités d’argent.

Au cours des douze mois qui suivirent, les nationalistes transportèrent par la mer et par le ciel des millions de taels d’or et d’argent ainsi que des devises étrangères vers Taïwan.

Une précieuse cargaison aérienne

A la suite des transports du mois de décembre, une grande partie de l’or commença à être déplacée par voie aérienne. C’était après que Chiang ait appris qu’il avait perdu la Chine continentale. Certaines sources rapportent qu’en février 1949, neuf avions militaires C-46 transportèrent chacun 6,6 tonnes d’or vers l’aéroport Songshan, à Taipei.

Le capitaine responsable de la mission n’avait aucune idée de ce qu’il devait transporter jusqu’à ce qu’un employé de la banque centrale, qui l’attendait dans son avion, ne lui en fasse part. Le capitaine et deux de ses collègues se souviennent de trois missions similaires à celle décrite ci-dessus. On estime à 667.902 le nombre d’onces d’or sorties de Shanghai de cette manière.

La nouvelle de la première de ces missions aériennes fut apportée par un journal de Hong Kong, après quoi Chiang ordonna à ce que deux autres missions de transport soient organisées sous 48 heures.

Un secret bien gardé

Comment cela a-t-il pu se poursuivre une année durant sans que personne ne s’en rende compte ? Le Dr. Wu écrit que le ‘déplacement de l’or était entièrement contrôlé par une seule personne, Chiang Kai-Chek… Même le ministre des finances n’avait pas le pouvoir d’intervenir. Chiang transmettait ses ordres verbalement et n’en a laissé aucune trace écrite. Seul lui et mon père savaient ce qu’il se passait’.

Qu’est-il arrivé à l’or ?

Beaucoup pensent que l'or de la Chine a été utilisé pour établir le Taiwan que nous connaissons aujourd’hui. Six mois après le début des opérations, le nouveau dollar Taiwanais vint remplacer l’ancien dollar Taiwanais au taux de un pour 40.000. On estime que 800.000 taels d’or (et 10 millions de dollars Américains apportés depuis Shanghai) ont servi à apporter la stabilité à un pays qui souffrait de l’hyperinflation depuis 1945.

Le reste de l’or aurait été utilisé pour réinstaller le million et demi de soldats et de civils qui ont fui la Chine et choisi de suivre Chiang.

Le KMT a depuis confirmé que 2,27 millions de taels d’or avaient été transportés vers Taiwan, mais a également précisé qu’ils avaient été utilisés pour fonder Taiwan. Le fils de Chiang, Chiang Ching-Kuo, a écrit plus tard que ‘si cet or n’avait pas été disponible lors du déplacement du gouvernement à Taiwan, les circonstances auraient été bien différentes. Comment serions-nous parvenus à la stabilité d’aujourd’hui ?’

Je me demande si les Chinois commencent aujourd’hui à tirer des leçons de leur histoire. A la suite du vol de son or, le pays est devenu l’otage de la monnaie papier. Bien que le KMT et le gouvernement actuel soient diamétralement différents, lorsqu'il en vient au respect de l’or et aux bénéfices qu’il apporte à une économie, c’est à se demander ce qui les oppose.

Par Jan Skoyles - The Real Asset Co sur www.24hgold.com le 22/10/2013

mercredi 16 octobre 2013

Aymeric Chauprade bonjour, pourriez-vous vous présenter aux lecteurs de RIA-Novosti qui ne vous connaîtraient pas?

Je suis géopolitologue. Une formation scientifique d’abord (mathématiques) puis de sciences politiques (docteur) et dix années titulaire de la Chaire de géopolitique de l’Ecole de Guerre à Paris, entre 1999 et 2009. J’ai aussi enseigné la géopolitique et l’histoire des idées politiques en France à la Sorbonne et en Suisse à l’Université de Neuchâtel.
Je suis maintenant également consultant international et très heureux de travailler de plus en plus avec la Russie. Mais je suis également souvent en Amérique Latine et j’ai des réseaux africains développés.

Vous êtes considéré comme l’un des fondateurs de la nouvelle géopolitique française, pluridisciplinaire, attentive à décrire le « continu et le discontinu » dans l’analyse des questions internationales, pourriez vous expliquer aux lecteurs de RIA-Novosti ce qu’il en est exactement?

Je me rattache au courant dit réaliste qui tient compte de la force des facteurs de la géographie physique, identitaire et des ressources, dans l’analyse des relations internationales. Mais pour autant, je ne néglige pas les facteurs idéologiques. Ils viennent en combinaison des facteurs classiques de la géopolitique que j’évoquais à l’instant à savoir les déterminants liés à l’espace, aux hommes dans leur identité culturelle (ethnie, religion…), et à la quête des ressources. J’insiste sur la multicausalité (il n’y a pas de cause unique mais chaque situation est la combinaison unique, un peu comme l’ADN d’une personne, d’une multiplicité de facteurs déterminants) et sur la multidisciplinarité (je refuse l’idée que ma matière, la géopolitique, puisse rendre compte à elle seule de la complexité de l’histoire ; attention au “tout géopolitique”, au “tout économique” ou “tout sociologique”). La tentation de tout expliquer par sa discipline, comme le font beaucoup les sociologues aujourd’hui, est une dérive née de l’hyperspécialisation qui nous éloigne de l’époque des savants généralistes, ces savants du XVIe siècle qui étaient à la fois philosophes, mathématiciens et souvent hommes de lettres!
Quant au “continu et au discontinu” c’est ce souci qui me vient de ma première formation scientifique de séparer la dimension continue et même parfois linéaire des phénomènes, de leur dimension discontinue et parfois erratique. Il faut savoir suivre les courbes des facteurs de temps long (la démographie par exemple) mais il faut aussi savoir lire les discontinuités, les sauts, de l’Histoire.

Vous avez le mois dernier été invité au prestigieux Forum Valdaï, cofondé par RIA-Novosti. Pourriez-vous nous faire part de vos impressions sur ce forum?

D’abord j’ai été très honoré de figurer parmi les nouveaux invités du Forum de Valdaï. Ce fut une
expérience véritablement passionnante. Les débats sont de qualité, l’organisation rigoureuse. C’est une sorte de Davos russe mais avec une différence notable : il n’y a pas de pensée unique mondialiste unanimement partagée. Des sensibilités différentes sont représentées. Si l’on voulait simplifier d’un côté, les Occidentalistes qui, Russes ou Occidentaux, célèbrent le “modèle démocratique occidental”, essentiellement américain et considèrent que celui-ci doit être l’horizon vers lequel doit tendre la société russe, et de l’autre côté, les partisans d’un modèle original russe, dont je fais partie, bien que n’étant pas russe, qui considèrent que la Russie n’est pas seulement une nation, mais une civilisation, dont la profondeur historique est telle qu’elle permet de proposer aux Russes un modèle original. A Valdai, j’ai beaucoup entendu les Occidentalistes se lamenter du fait que la Russie était encore loin des standards occidentaux, à cause d’un prétendu déficit démocratique et d’une forte corruption. Je n’idéalise pas la Russie sous Poutine qui travaille d’arrache-pied au redressement de ce pays depuis 13 ans ; j’en mesure les maux mais je dis simplement que lorsque l’on parle de corruption il faudrait premièrement rappeler que les indicateurs de mesure sont faits pour l’essentiel par les Occidentaux, et les Américains en particulier, ce qui n’est pas une assurance d’objectivité, et deuxièmement s’intéresser non seulement à la corruption de l’Occident lui-même mais à son fort pouvoir corrupteur dans les pays en voie de développement!
Par ailleurs je considère que si la Russie court derrière le modèle occidental, elle sera toujours en retard. Bien au contraire, un pays qui a su pousser si loin la création artistique et scientifique, me paraît plus que capable de proposer un contre-modèle, lequel ne devra pas être fondé sur la toute puissance de l’individualisme, mais au contraire sur l’âme russe, sur la dimension spirituelle de ce pays. Il faut faire attention à une chose : le communisme, comme rouleau compresseur de l’esprit critique et de la dimension spirituelle de l’homme, a été un préparateur redoutable pour le projet de marchandisation de l’homme que propose l’individualisme américain.
Je suis convaincu que le retour à la Sainte Russie, au contraire, peut être un formidable réveil du génie créateur russe, qui seul lui permettra de reconstruire, au-delà des hydrocarbures et d’autres secteurs, une économie performante et innovatrice.

La question de l’identité a été extrêmement discutée et le président russe a utilisé une rhétorique eurasiatique pour parler de l’Etat Civilisation russe, pensez vous comme certains que le réveil russe l’éloigne de l’Occident, et donc de l’Europe, et devrait intensifier son rapprochement avec la Chine?

Si la Russie s’éloigne de l’Occident ce sera de la faute de l’Occident américain. La Russie est en effet diabolisée dans les médias américains dominants et par conséquent dans les médias européens qui s’en inspirent. Cette diabolisation est injuste, c’est de la mauvaise foi qui vise à présenter le redressement russe comme agressif alors que celui-ci cherche à consolider sa souveraineté face à l’impérialisme américain qui fait glisser les frontières de l’OTAN aux frontières de la Russie et de la Chine.
La Russie développe ses relations avec la Chine, dans le cadre notamment du groupe de Shangaï et aussi parce que les Chinois ont compris que les Russes pouvaient être des partenaires solides dans un monde multipolaire. De fait, ces deux puissances partagent la même vision de l’organisation du monde : elles respectent la souveraineté des Etats, refusent l’ingérence chez les autres, veulent l’équilibre des puissances comme garantie de la paix mondiale. Toutes deux s’opposent au projet unipolaire américain qui, il suffit de le constater, a déclenché une succession de guerres depuis l’effondrement soviétique : Irak, Yougoslavie, Afghanistan, Libye, Syrie maintenant… Où avez-vous vu les Russes dans toutes ces guerres?
Je pense que la Russie ne veut pas se contenter d’un partenariat avec la Chine. Certes la Russie est une puissance eurasiatique, mais il suffit de s’intéresser à son histoire, à son patrimoine culturel, pour voir qu’elle est une puissance profondément européenne et qu’elle n’entend pas se couper de l’Europe. Si les Européens se libéraient de leur dépendance à l’égard des Etats-Unis tout pourrait changer et un fort partenariat stratégique pourrait se nouer entre l’Europe et la Russie.

Vous aviez lancé le 13 juin dernier un « Appel de Moscou », quel regard global portez vous sur la Russie d’aujourd’hui?

D’abord j’essaie de ne pas idéaliser la Russie même si je ne vous cache pas que je me sens extrêmement bien dans ce pays, parce que le matérialisme m’y paraît sans cesse équilibré par une sorte de profondeur d’âme insondable. Je pense que quelque chose est en train de se passer dans la Russie de Poutine et j’espère seulement que le Président Poutine pense à la manière de perpétuer son héritage, car la pire chose qui pourrait arriver ce serait le retour des occidentalistes de l’ère Eltsine, qui prennent la Russie pour un pays du Tiers monde qu’il faudrait mettre aux normes occidentales. L’appel de Moscou que j’ai lancé poursuivait deux buts: d’abord montrer mon soutien au refus russe du programme nihiliste venu d’Occident (mariage homosexuel, théorie du genre, merchandisation du corps), ensuite montrer aux Français qui défendent la famille et les valeurs naturelles que la Russie peut être une alliée précieuse dans ce combat. Je suis très surpris et heureux de constater à quel point mon appel de Moscou lancé à la Douma le 13 juin 2013 a circulé en France dans les milieux catholiques qui se sont mobilisés contre le mariage homosexuel.

Le souverainisme est à vos yeux une notion clef de l’équilibre mondial. Très curieusement ce concept est abandonné en Europe alors qu’en Russie et dans nombre de pays émergents l’affirmation et le maintien de la souveraineté semble au contraire un objectif essentiel. Comment expliquez-vous cette différence d’orientation?

La souveraineté est une évidence pour tous les peuples du monde, et en particulier pour ceux qui ont pris leur indépendance récemment ou qui aspirent à créer un Etat indépendant. Les Européens de l’Ouest, ou plutôt leur fausses élites gouvernantes, sont les seules du monde à avoir abdiqué la souveraineté de leurs peuples. C’est une trahison dont elles devront répondre devant l’Histoire. Des millions de Français ont péri à travers l’Histoire pour défendre la liberté et la souveraineté du peuple français, sous les monarques comme en République. Mon nom est inscrit sur les monuments aux morts français. Si les Français voulaient s’en souvenir, il n’est pas une famille française qui n’ait son nom inscrit sur ces monuments aux morts, de la Première, de la Deuxième ou des guerres de défense de l’Empire français.
Imaginez-vous un Américain ou un Russe abdiquer sa souveraineté? Pour eux le patriotisme est une évidence, qui va d’ailleurs tellement de soi que tout parti affirmant un programme nationaliste en Russie est perçu comme extrémiste parce qu’il n’y a nul besoin là-bas d’affirmer l’évidence. Nos amis russes doivent comprendre en revanche qu’en France ce n’est plus l’évidence et par conséquent qu’il est normal qu’un parti politique qui veut rendre au peuple la souveraineté, mette celle-ci au sommet de son programme!

Aujourd’hui nous assistons à une relative rapide modification des relations internationales, avec le basculement du monde vers l’Asie et la potentielle fin du monde unipolaire. Comment envisagez vous que cette transition puisse se passer?

Ce que je vois c’est que les Etats-Unis refusent de perdre leur premier rang mondial et peuvent créer de grands désordres, peut-être même des guerres de grande ampleur, dans les décennies à venir, et que les Européens, quant à eux, sont dans la gesticulation kantienne, la proclamation de belles leçons de morale qui s’accompagnent d’un déclin en puissance dramatique et donc pathétique.

Au sein de cet basculement, la France semble quant à elle pourtant de plus en plus aligner sa politique étrangère sur les intérêts américains, cela est visible avec la crise en Syrie. Comment l’expliquez-vous?

Je l’explique très simplement. L’oligarchie mondialiste a pris le contrôle des principaux partis de gouvernement français, le PS et l’UMP. La majorité de ses dirigeants ont été initiés dans les grands clubs transatlantiques. Ils ont épousé le programme mondialiste et ne raisonnent plus en patriotes français comme le faisait le général de Gaulle. Lorsque le peuple français l’aura compris, ces fausses élites seront balayés car elles n’ont pour bilan que le déclin en puissance de la France et la perte de sa souveraineté.

Vous avez soutenu Philippe de Villers en 2004, auriez appelé à Voter pour Nicolas Sarkozy en 2007 et vous venez de vous ranger au coté de Marine Le Pen. Souhaitez-vous désormais entamer une carrière politique?

Le mot carrière ne me va guère. Si j’avais choisi de faire une carrière dans le système, alors j’aurais choisi de proclamer autre chose que des vérités qui dérangent. Je n’ai qu’une ambition, pouvoir dire à mes enfants, au seuil de la mort, que j’ai fait ce que je pouvais pour défendre la liberté et la souveraineté du peuple français. J’ai soutenu Philippe de Villiers que je respecte.
Mais je n’ai jamais appelé à voter pour Nicolas Sarkozy, que je vois comme soumis aux intérêts américains. Je ne sais qui a pu dire une chose pareille mais je vous mets au défi de trouver un seul texte de soutien de ma part à Nicolas Sarkozy. C’est d’ailleurs son gouvernement, en la personne de son ministre de la défense Hervé Morin, qui m’a brutalement écarté de l’Ecole de Guerre parce j’étais trop attaché à l’indépendance de la France et que je m’opposait au retour de la France dans les structures intégrées de l’OTAN. Donc de grâce que l’on ne dise jamais que j’ai soutenu ou appelé à voter Sarkozy.
En revanche, oui je soutiens Marine le Pen et il est possible que je joue prochainement un rôle sur la scène politique à ses côtés. Marine a un caractère fort, une carapace héritée des coups que son père a pris pendant tant d’années, et je la sens donc capable de prendre en main avec courage le destin du pays. Le courage plus que l’intelligence est ce qui manque aux pseudo-élites françaises, lesquelles sont conformistes et soumises à l’idéologie mondialiste par confort.

Comment envisageriez vous la relation franco-russe?

Je l’ai dit et je le redis haut et fort. Si le Front national arrive au pouvoir, il rompra avec l’OTAN et proposera une alliance stratégique avec la Russie. Ce sera un tremblement de terre énorme au niveau international et c’est la raison pour laquelle, avant d’arriver en haut des marches, et même avec le soutien du peuple, il nous faudra affronter des forces considérables. Nous y sommes prêts. Et n’oubliez pas que la France est le pays de Jeanne d’Arc. Tout est possible donc, même quand tout semble perdu!

Merci Aymeric Chauprade.

Les lecteurs souhaitant en savoir plus peuvent consulter votre blog ou le siteRealpolitik-TV.
L’opinion exprimée dans cet article ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction, l’auteur étant extérieur à RIA Novosti.
Alexandre Latsa est un journaliste français qui vit en Russie et anime le site DISSONANCE, destiné à donner un “autre regard sur la Russie”.

Le 16 octobre 2013 sur www.mondialisation.ca

lundi 14 octobre 2013

La bourse de Moscou introduit des contrats livrables sur l'or et l'argent

OAO Moscow Exchange est sur le point d'introduire le commerce d'or et d'argent d'ici la fin du mois dans le cadre de son projet de rendre les métaux plus accessibles aux petites banques en réduisant les coûts de transaction.

Le marché affichera le prix de l'or et de l'argent en roubles par gramme, et le minimum par transaction sera fixé à 10 grammes pour l'or et 100 grammes pour l'argent, comme l'a expliqué le directeur général de la bourse Andrey Shemetov dans un récent courriel. Des contrats sur le platine et le palladium devraient être introduits d'ici à 2014.

Le marché fixera des prix et autorisera les traders à régler des contrats en livrant du métal vers et depuis les comptes non-alloués du National Clearing Centre. Les banques pourront déposer ou retirer des métaux précieux sous leur forme physique, et la livraison et la collection de métal s'effectuera auprès d'un coffre situé à Moscou.

Lisez la suite de l'article ici :

http://www.bloomberg.com/news/2013-10-10/mosc...ns-gold-to-s...

Par Maria Levitov sur Bloomberg News le 11/10/2013

lundi 7 octobre 2013

Les conséquences de la résolution 2118

Bien que le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, se soit bruyamment félicité du vote de la résolution 2118 sur les armes chimiques en Syrie, ce texte marque à la fois la victoire de la Russie et celle du président Bachar el-Assad. Il porte en lui-même deux conséquences qui ruinent définitivement les prétentions franco-britanniques sur le pays.

Une fois passé l'étonnement face au tête-à-queue US en Syrie, une nouvelle situation politique se fait jour correspondant point par point aux plans élaborés conjointement par la Russie et la Syrie en juin 2012, c'est-à-dire avant la conférence de Genève 1. À l'époque, le Kremlin envisageait de négocier un accord avec Washington à la fois pour régler la crise syrienne et pour permettre au président Obama de sortir de son tête-à-tête étouffant avec Israël. Cependant ce plan, qui allait devenir un projet de partage de la gouvernance au Proche-Orient, supposait la présence de troupes russes en Syrie. Le général Hassan Tourekmani avait alors proposé que des troupes d'interposition mandatées par les Nations Unies soient déployées par l'Organisation du Traité de sécurité collective (« l'Otan russe »), comme il existe déjà sur le sol syrien une Force des Nations Unies chargée d'observer le désengagement au Golan.

L'idée de ce déploiement a fait son chemin. L'OTSC a signé un Protocole avec le département des Opérations de maintien de la paix de l'Onu en septembre 2012 qui lui permet, comme l'Otan, de sous-traiter des actions du Conseil de sécurité. Depuis un an, l'OTSC a préparé 50 000 hommes qui peuvent être projetés en moins de deux semaines. Mais Moscou craignait de tomber dans un piège : c'était pour détruire l'Armée rouge que la CIA avait créé, en 1979 avec l'Arabie saoudite, le mouvement jihadiste international aujourd'hui appelé Al-Qaëda. La Syrie serait-elle le nouvel Afghanistan de l'armée russe ?

Compte tenu des hésitations et contradictions US, le projet fut interrompu, mais pas abandonné. Or, la solution de la crise des armes chimiques ouvre de nouvelles possibilités.

En premier lieu, la résolution 2118 ne se contente pas de soutenir le plan russe de destruction des restes du programme chimique syrien des années 80, elle implique implicitement le maintien du président Bachar el-Assad au pouvoir pour au moins un an afin qu'il supervise cette destruction. Du coup, non seulement les grandes puissances occidentales ne réclament plus son départ, mais seraient favorables à un allongement de son mandat et à un report de la prochaine élection présidentielle.

En second lieu, la transmission par la Syrie de la liste de ses stocks d'armes chimiques à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) les rend vulnérables, puisque cette liste ne manquera pas de parvenir à « l'opposition armée ». Malgré ses efforts, l'Armée arabe syrienne ne pourra pas à la fois combattre les jihadistes internationaux sur l'ensemble du territoire et défendre ses arsenaux. Prévoyant cette situation, les chefs d'État de l'OTSC, réunis autour de Vladimir Poutine le 23 septembre à Sotchi (c'est-à-dire quatre jours avant le vote de la résolution 2118 du Conseil de sécurité), ont donné ordre de se tenir prêts à sécuriser la destruction des armes chimiques, si le Conseil de sécurité en faisait la demande. Les troupes arméniennes, biélorusses, kazakhs, kirghizes, russes et tadjiks ne seraient plus déployées pour s'interposer entre les deux camps comme cela était envisagé il y a un an et demi, mais pour défendre les arsenaux de l'État. Leur mission serait donc beaucoup plus simple et efficace.
 
Par Thierry Meyssan le 07/10/2013 sur www.voltairenet.org

Dans cette perspective, les 2 500 hommes de l'OTSC qui doivent participer à des manœuvres au Kazakhstan, du 7 au 11 octobre, procéderont à une simulation.

Chine : Nous ne faisons pas de « shutdowns »

Le dernier superpuissant dysfonctionnement spectaculaire, c'est-à-dire le « shutdown » -paralysie administrative US-, a forcé le président Barack Obama à complètement annuler son voyage en Asie. D'abord la Maison Blanche a annoncé qu'Obama laissait tomber la Malaisie et les Philippines – les étoiles supposées du « pivot vers l'Asie ». Puis il a été finalement confirmé qu'il va laisser tomber aussi le sommet de l'Asia-Pacific Economic Co-operation (APEC) de Bali mardi et l'ASEAN (L'association de Nations asiatiques du Sud-est) et le sommet de l'Asie de l'Est jeudi prochain à Brunei.

Cela laisse au président chinois Xi Jinping d'être, sans rival, sous les feux de la rampe. Comme si une quelconque « aide » supplémentaire était nécessaire et comme si Xi n'était pas déjà sur le coup.

Ce Jeudi, Xi est devenu le premier chef d'état étranger à s'adresser au parlement indonésien à Jakarta. Il a souligné que Pékin voulait promouvoir par tous les moyens le commerce avec l'ASEAN pour atteindre environ 1 trillion de dollars d'ici 2020 – et mettre en place une banque d'infrastructure régionale.

Son message, tient en une coquille de noix : La Chine et « certains pays du Sud-est asiatique » doivent résoudre « pacifiquement « leurs différents sur leur souveraineté territoriale et les droits maritimes – comme nous discuterons de ce désordre dans la Mer de Chine du sud (il n'y a fait aucune référence directe dans son discours) mais on ne doit pas laisser cela interférer avec nos affaires sérieuses en matière de commerce et d'investissement. Qui est l'ASEAN pour dire non ?

Et ensuite, après avoir éclipsé Obama en Indonésie (des encyclopédies pourraient être écrites là dessus) et la signature plus de 30 milliards de dollars de contrats (surtout dans l'exploitation minière), Xi s'en est allé en Malaisie.

Comparez le triomphe indonésien de Xi – total avec sa séduisante femme, Peng Liyuan portant le batik – à une récente visite du Premier ministre japonais Shinzo Abe, qui, pour tout objectif concret, a voulu persuader les Indonésiens principalement d'encercler la Chine. Minutieusement et poliment comme d'habitude, les Indonésiens ont écarté Abe. La Chine est le plus grand partenaire commercial de l'Indonésie après le Japon et va à coup sûr bientôt dépasser Tokyo.

Pékin a déjà accepté de négocier un Code de conduite juridique rattachant la Mer de Chine Sud à l'ASEAN. Un groupe de travail s'est rencontré le mois dernier à Suzhou. Quatre des 10 membres de l'ASEAN (mais pas l'Indonésie) sont impliqués dans le conflit de la Mer de Chine sud – qui, comme prévu, tourne autour des réserves de pétrole et de gaz inexplorées. Les Philippines continueront à accuser Pékin, comme le mois dernier, de violer le – pour le moment informel – Code de conduite. L'Indonésie s'est proposée comme médiateur. Ce ne sera pas facile, mais force est de constater que la Chine et l'ASEAN se parlent déjà.

Pivoter avec moi-même

C'est un peu le nœud du problème quand vous annoncez – en grande pompe et au Pentagone, et partout – un « virage vers l'Asie » pour améliorer le rôle de « l'Asie-Pacifique pour la prospérité et la sécurité US » et que vous même vous ne pouvez pas pivoter vers l'Asie pour quelques jours pour mener cela à bien personnellement. En fait il n'y a pas de virage – au moins pour le moment. L'administration Obama a été concentrée non seulement sur deux dossiers extrêmement complexes – la Syrie et l'Iran – mais a aussi essayé de contenir la démence du Premier ministre Benjamin Netanyahu en Israël et la, de plus en plus effrayante et paranoïde, Maison de Saud.

Pourquoi aurait-il été en Asie ? Bien, aux Philippines il aurait essayé de décrocher un contrat pour une « plus grande flexibilité » pour que le Pentagone puisse utiliser les bases militaires. Dire que c'est « controversé », c'est le moins qu'on puisse dire.

Et en Malaisie, Obama aurait mis la pression plus fort sur le déjà décrié Trans-Pacific Partnership (TPP) – avant tout, une sorte de racket qui est en fait un bon « deal » pour les multinationales américaines, mais pas exactement pour les intérêts asiatiques. Le TPP est la réponse américaine à l'offensive de la Chine déjà massive partout dans l'Asie.

L'ancien Premier ministre malaisien, Mahathir Mohammad a vu le TPP – qui exclut la Chine – pour ce qu'il est et il n'a absolument pas été convaincu que le TPP permettra un accès plus facile pour la Malaisie au marché américain.

Ainsi pour finir on a permis à Xi de recevoir encore un autre triomphe en Asie du Sud-est. Pékin peut offrir à Kuala Lumpur une source d'investissement sans l'interférence agaçante du style TPP sur comment le pays dirige ses entreprises étatiques ou comment il gère des contrats gouvernementaux. Et par delà, Xi a marqué un point personnel en essayant de mettre la Malaisie de son côté dans les négociations du Code de conduite pour la Mer de Chine Sud.

Xi sera évidemment l'étoile du sommet de l'APEC à Bali. Puis le Premier ministre Li Keqiang mène la délégation chinoise au Sommet de l'Asie de l'Est à Brunei et pousse son voyage d'affaires plus loin en Thaïlande et au Viêt Nam.

Maintenant comparez cette offensive chinoise, impitoyable comme une Lamborghini Aventador entrain d'accélérer, avec la perception non dite mais palpable, à travers toute l'Asie du Sud-est, d'une Chevrolet grinçante que représente le « virage » américain. On peut, peut être parier que le monde du Think-tankétasunien râlera une fois encore sur la perte de fiabilité américaine ou, mieux encore, « de crédibilité » – même puisqu'il défend l'avenir du virage, en le justifiant non seulement comme une décision stratégique US, mais au nom des intérêts du Sud-est asiatiques.

C'est absurde. La majorette en chef du virage US est le Japon – et le Japon est largement considéré, dans différentes nuances de gris à travers toute l'Asie du Sud-est, comme une marionnette américaine. Ce qui est certain c'est que le non-show d'Obama renforce seulement la perception prédominante que la politique étrangère américaine actuelle est un désordre total. Et que pendant que les Etats-Unis sont en situation de « paralysie administrative », la Chine fait des affaires.

Pepe Escobar pour Asia Times
Texte original : China: We don't do shutdowns, Asia Times, le 4 octobre 2013.
Traduit de l'anglais pour « El Correo » par  : Estelle et Carlos Debiasi
El Correo. Paris, le 4 octobre 2013.