lundi 21 septembre 2015

Le petit jeu géopolitique de la Turquie

Les autorités turques semblent être tombées sur un os. Dans un effort pour assurer sa position de leader dans le monde turc, Ankara a déstabilisé son propre pays qui se trouve sous la menace croissante d'une autre "révolution de couleur". Cependant, cette fois, la nature du combat sera interethnique.
Le fait que le flux principal de l'assistance matérielle aux militants de l'État islamique passe à travers le territoire de la Turquie fait parler d'elle. Tout cela est surprenant car recouvert du drapeau de l'aide américaine dans la lutte contre l'Etat islamique et les troupes du gouvernement syrien de Bachar al-Assad.

Ankara a activement soutenu (avec le plein appui de Washington) l'opposition syrienne : le siège de l'Association des groupes d'opposition syriens (le Comité national de coordination pour le changement démocratique) est basé en Turquie. Mais dans les rangs de l'opposition il y a de nombreux militants de l'Etat islamique. Ils étaient "parqués" provisoirementv en Turquie, où existe depuis longtemps des "bases de loisirs" légales, ainsi que des camps d'entraînement de l'"opposition syrienne". Un grand nombre de citoyens turcs se battent aux côtés des adversaires d'Assad. Et c'est la Turquie qui fut le principal canal d'alimentation de nouveaux partisans de l'Etat islamique à travers du monde entier.

L'établissement d'un centre de transport et de logistique si puissant ne serait pas possible sans l'autorisation et le soutien de l'extérieur et sans l'assistance des autorités de la Turquie. Et au premier plan apparaissent les intérêts de la même Maison Blanche, menant une lutte active contre Assad et sa tentative de renforcer sa propre position dans la région d'Ankara.

Si le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan se limitait au rôle de zone de transit, cela serait compréhensible. Ankara a longtemps été d'essayer de gagner l'attention des États-Unis et de l'Europe (le pire est qu'il est le seul membre de l'OTAN dans la région). Cependant, sous les auspices de l'agitation en Syrie, Erdogan tente de résoudre la question nationale de liquidation physique des intentions séparatistes kurdes pour la création d'un Kurdistan unifié. En fait, il était l'une des raisons pour le soutien actif de l'Etat d'Ankara de l'Etat islamique (les Kurdes se battent aux côtés des adversaires de l'EI).

Le rêve des Kurdes d'avoir leur propre Etat, y compris aux dépens de la Turquie, est le principal problème d'Ankara. Il a empiré depuis le début du conflit en Irak, où les Etats-Unis ont utilisé activement les forces kurdes de renverser Hussein. Maintenant, les Kurdes irakiens et syriens tout à fait légalement obtenu des armes et des approvisionnements en provenance des États-Unis et de l'UE pour la lutte contre l'Etat islamique. Et cela ne convient pas à la Turquie, qui craint sérieusement un renforcement les forces kurdes indépendantiste sur son propre territoire.

L'entrée d'Ankara dans une phase militaire active dans le conflit syrien se transforme finalement en une destruction des forces aériennes kurdes dans tous les territoires adjacents aux frontières des territoires turcs. Selon Ankara, sa volonté est d'exclure la possibilité d'un soutien par l'extérieur des Kurdes de Turquie. Tout d'abord, il existe une alliance entre les Kurdes du territoire autonome syrien Rojava et l'Armée syrienne libre (ASL) en Irak. Donc, la première chose que la Turquie a fait après son entrée dans la guerre, a été de demander à son armée de l'air d'attaquer les positions des Kurdes dans le nord de l'Irak.

Après cela, le gouvernement du Kurdistan irakien a appelé les militants séparatistes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) à retirer ses troupes de leurs établissements afin d'éviter les victimes civiles dans les attaques des avions turcs. Dans le même temps, il a accusé les autorités turques d'avoir réalisé des frappes aériennes sur des cibles civiles en Irak et en Syrie.

Mais la chose la plus intéressante est que sous les auspices de la lutte contre l'EI, Ankara a commencé à utiliser activement la force sur son propre territoire habité par des Kurdes. Cela a été fait apparemment en réponse à une attaque terroriste dans la ville turque de Suruç situé près de la frontière syrienne. Malgré les blâmes de M.. Erdogan contre l'EI pour ce qui est arrivé, les représentants de l'État islamique n'ont pas confirmé leur participation.

Pendant ce temps, lors d'une réunion d'urgence de l'OTAN, M. Erdogan a exprimé l'idée de créer une «zone tampon» le long de la frontière turco-syrienne et la frontière turco-irakienne. Et bien que la raison officielle exprimée fut activité militaire de l'Etat islamique sur les frontières de la Turquie, l'idée de base était de liquider la menace kurde dans l'intégrité du pays et de garder sous contrôle tous les territoires habités par des Kurdes. Au Kurdistan syrien, le parti  "Union démocratique" (affilié avec le Parti des travailleurs du Kurdistan, qui a lutté contre l '«Etat islamique» en Syrie) a pris le contrôle de 400 kilomètres de la frontière syro-turque.

En fait, aujourd'hui, la Turquie est confrontée non seulement à la menace extérieure de l'Etat islamique, mais aussi de l'intérieur, avec le renforcement des forces kurdes. Après une série d'attaques terroristes dans le pays, les autorités turques ont déjà commencé des raids à grande échelle, au cours de laquelle des milliers de personnes ont été arrêtées.

Il est possible que des troubles internes en Turquie puisse changer la politique de longue date d'Ankara. Ce n'est pas un secret que dans les deux dernières décennies, la Turquie est apparue (officieusement, bien sûr) comme la principale source de soutien moral et matériel aux mouvements radicaux à travers le monde turc. Tout d'abord, sur le territoire de l'Asie centrale et en Afghanistan. En fait, Ankara tente de tirer la couverture politique de «dictateur» et leader d'opinion pour tous les Etats de la région. C'est ainsi qu'il exerce son influence internationale dans le monde. Mais apparemment, Ankara devra faire face à un long et douloureux désordre politique interne dans lequel la politique de M. Erdogan a finalement conduit.

vendredi 18 septembre 2015

Au Japon, bagarre au Parlement lors d'un débat sur le pacifisme

 
Des sénateurs en sont venus aux mains, jeudi 17 septembre, dans l’enceinte très feutré habituellement du Parlement japonais, avant l’adoption, en commission, de nouvelles lois de défense autorisant l’envoi de militaires à l’étranger pour aider un allié en difficulté, une première depuis la seconde guerre mondiale.
 
La voie est désormais ouverte pour un vote en session plénière au Sénat, procédure qui entérinerait les textes et qui doit intervenir dans les heures ou jours à venir, malgré une opposition farouche.
 
Les nouvelles orientations de la politique de défense japonaise – qui prônent l’abandon de fait du pacifisme constitutionnel – souhaitées par le premier ministre, Shinzo Abe, divisent les Japonais. Jeudi à deux reprises, devant le premier ministre, impassible, des membres de l’opposition et de la coalition au pouvoir ont encerclé le président d’une commission spéciale et se sont bousculés et empoignés vigoureusement.
 
Le député d’opposition Tetsuro Fukuyama a ensuite prononcé un discours enflammé pour expliquer pourquoi son parti avait déposé une motion pour tenter d’empêcher l’adoption de cette réinterprétation de la Constitution pacifiste du Japon. Il a lancé au bord des larmes :
« Le parti au pouvoir écoute-t-il les voix du public ? Vous pouvez faire tout ce que vous voulez parce que vous avez la majorité. Est-ce bien cela que vous pensez ? »
 
Manifestations quotidiennes
 
La tension est montée, dans la nuit de mercredi à jeudi, après le report à maintes reprises du vote d’une commission, au cours de laquelle les parlementaires bloquaient les portes et encombraient les couloirs en signe de protestation.
 
Treize personnes au total ont été arrêtées dans la soirée de mercredi, selon les médias japonais« pour entrave à agent de police » pendant une manifestation qui a rassemblé quelque 13 000 personnes devant le Parlement. Des dizaines de milliers de personnes ont défilé dans les rues presque quotidiennement ces dernières semaines, dans un pays où les manifestations sont rares.
 
Bien que la Constitution actuelle, qui empêche les soldats japonais de prendre part à des combats en dehors de l’autodéfense, ait été imposée par l’occupant américain, nombre de Japonais y sont attachés et estiment que tout changement remettrait en cause le caractère pacifiste de leur pays, inscrit pour la première fois dans une Loi fondamentale, et pourrait aussi le précipiter aux côtés des Américains dans des conflits au bout du monde. Mais, pour le premier ministre, Shinzo Abe, ce geste est nécessaire face à des menaces grandissantes venant de Chine et de Corée du Nord.
 
Selon un sondage de l’agence de presse Kyodo, réalisé à la fin de juillet 2015, 60 % des personnes interrogées étaient favorables au maintien de la Constitution actuelle.
 
Le 17/09/2015 sur www.lemonde.fr

jeudi 17 septembre 2015

Il y a davantage de millionnaires en Asie-Pacifique qu'en Amérique du Nord

La région Asie-Pacifique dépasse désormais l’Amérique du Nord en termes de millionnaires. Grâce à la croissance continue dans cette zone, il y a plus millionnaires en Chine, en Indonésie et en Thaïlande qu’aux Etats-Unis et au Canada, révèle l’étude annuelle « World Wealth Report » de Capgemini et RBC Wealth Management repérée par le Guardian ce mercredi.
 
Selon cette étude, il y 4,69 millions de ces super-riches en Asie-Pacifique, contre 4,68 millions en Amérique du Nord. Ces personnes fortunées sont à la tête d’actifs équivalant à au moins 1 million de dollars US (environ 890.000 euros), sans compter leur résidence principale et les biens de consommation.
 
14,65 millions de personnes fortunées dans le monde
 
« L’Asie-Pacifique poursuit sa course incroyable dans la création de richesse et elle ne semble pas ralentir de sitôt », explique au quotidien Barend Janssens, chef de RBC Wealth Management en Asie. « Malgré quelques récents problèmes économiques, la richesse de cette région [Asie-Pacifique] devrait mener la croissance mondiale. »
 
L’étude ne reflète cependant pas les turbulences du marché en Chine, où les marchés boursiers font des montagnes russes depuis plusieurs mois à cause, notamment, des dévaluations du yuan.
En 2015, on comptait 14,65 millions de ces super-riches dans le monde, selon cette même étude.
 
Par Anne-Laetitia Béraud sur www.20minutes.fr le 16/09/2015

lundi 7 septembre 2015

L'attractivité économique du Kazakhstan

Dans les conditions géopolitiques complexes d'aujourd'hui, de nombreux représentants d'entreprises occidentales se concentrent davantage sur l'Asie centrale et son chef de file régional, la République du Kazakhstan.
 
L'intérêt pour le Kazakhstan se développe d'année en année. Il a réussi à rester un pays stable dans une région compliquée, ce pays aujourd'hui montre une capacité importante, la capacité de négocier. Le territoire, qui jouxte d'une part la Russie, et d'autre part la Chine, qui est largement tourné vers les entreprises des États-Unis et de l'Union européenne est peut-être l'un des rares endroits où la concurrence se transforme en une coopération multilatérale efficace. Voilà pourquoi les entreprises s'intéressent au Kazakhstan. Après tout, l'argent aime le silence et aller là où se trouve de la stabilité. Cela est au moins attesté par le fait qu'au cours des vingt dernières années le Kazakhstan, a réussi à devenir un chef de file dans la CEI pour attirer les investissements étrangers directs, dont le volume total s'est élevé à environ 200 milliards de dollars.
 
Les industries qui ont eu le plus grand intérêt à investir sont tout d'abord, celles du secteur des matières premières. Dans les entrailles de cette république, sont rassemblées la quasi-totalité des éléments de la table périodique, dont la plupart sont extraits avec succès.
 
Cependant aujourd'hui, sa structure économique est en train de changer, en poursuivant activement sa diversification et en créant toutes les conditions pour que les investissements soient dirigés non seulement dans le secteur du pétrole et du gaz et des mines, mais aussi dans l'industrie de transformation. Ici, devant les investisseurs s'ouvrent de nombreuses possibilités.
Que fait le Kazakhstan pour qu'il soit si attractif d'y investir ?
 
Tout d'abord, parlons de l'ouverture de la république aux entreprises étrangères. En Juillet 2014, le autorités ont lancé un projet pilote pour un régime de coopération sans visa pour lequel Astana accorde une importance primordiale. La liste comprend les pays suivants : Australie, Hongrie, Italie, Monaco, Belgique, Espagne, Pays-Bas, Norvège, Suède, Malaisie, Émirats arabes unis, Singapour, Royaume-Uni, Etats-Unis, Allemagne, Finlande, France, Suisse et Japon. Avec la République de Corée il a été signé un accord mutuel pour des voyages sans visa pendant 30 jours.
 
Deuxièmement, il a été créé un environnement institutionnel favorable au développement des affaires. Le gouvernement du Kazakhstan a approuvé un plan global visant à attirer les investissements directs étrangers et nationaux, prévoyant l'exonération fiscale des investisseurs.
 
Dans ce pays se trouvent 10 zones économiques spéciales. Dans ces territoires, il est fournit un support complet pour les entrepreneurs selon leurs préférences fiscales. Les investisseurs dans les secteurs prioritaires sont exonérés d'impôt sur le revenu des sociétés et de la taxe foncière pour une période de 10 ans, et de l'impôt foncier pendant 8 ans. Les investisseurs ont la garantie de la stabilité de la législation fiscale. L'Etat est prêt à compenser jusqu'à 30% du capital d'investissement, après la mise en service des structures dans les secteurs prioritaires de l'économie, a dit en particulier le président du Kazakhstan, Noursoultan Nazarbaïev, en parlant à des investisseurs potentiels à Milan.
 
De manière générale, le gouvernement du Kazakhstan est en train de faire un excellent travail dans ce sens : proposition de nouvelles incitations, procédures simplifiées, élaboration d'un "gouvernement électronique", mis en œuvre du principe de «guichet unique» pour les investisseurs, et plus encore. Les représentants d'entreprises étrangères peuvent compter sur une garantie de commandes de l'Etat et leurs droits seront protéger par des médiateurs pour l'investissement.
 
Une nouvelle initiative est la création du centre financier international "Astana". Il sera lancé d'ici le 1er janvier 2016. La base du centre "Astana" a été choisi comme modèle de DIFC. Les activités sont prévues dans plusieurs domaines : le développement du marché des capitaux avec des investissements étrangers, la finance islamique comme une alternative aux services bancaires traditionnels, la gestion d'actifs.
 
Le centre permettra de créer les conditions les plus favorables pour les activités (fourniture d'avantages fiscaux et douaniers, liberté de circulation des capitaux, du travail, et ainsi de suite) et la garantie de protection des investissements. Pour le règlement des différends relatifs aux investissements, il est prévu un tribunal financier avec la participation de juges étrangers, en utilisant le système juridique anglo-saxon et la langue anglaise dans les procédures.
 
En général, le Kazakhstan a créé un système intégré verticalement qui attire avec succès des capitaux étrangers. Le travail commence par le front office à l'étranger. Ensuite, une connexion est réalisée avec  l'agence nationale KAZNEX INVEST, qui fournit aux investisseurs les contacts avec les agences gouvernementales, les ministères, les entreprises nationales. Ensuite, les partenaires potentiels continuent à travailler au niveau régional.
 
Toutes ces mesures et d'autres, ont apporté au Kazakhstan la 77ème place sur 189 pays du classement de la Banque mondiale relatif à la «Facilité de faire des affaires en 2015». Par ailleurs, sur cet indicateur Astana a même dépassé de Beijing, qui est à la 90ème place.
 
Troisièmement, le Kazakhstan va devenir intéressant pour les entreprises étrangères selon d'autres critères. L'emplacement géostratégique unique du pays offre de grandes perspectives. A travers le pays, il existe cinq corridors internationaux de transport : le corridor Nord du Chemin de fer transasiatique (TARM), le corridor Sud TARM, le corridor central (Asie centrale), le corridor Nord - Sud et le TRACECA.
 
En abordant le processus de l'intégration globale, à son tour, il élargit considérablement le volume du marché de la république.

La mise en œuvre réussie du « projet eurasien» a ouvert  un espace de plus de 170 millions d'âmes et permis un PIB combiné de plus de 2000 milliards de dollars. Au début, c'était une union douanière, puis la CES, et aujourd'hui l'Union économique eurasienne.

Ajoutez à cela qu'en décembre, il est prévu de toutes les procédures de ratification de l'adhésion du Kazakhstan à l'OMC seront achevées. Tout cela suggère que le marché du Kazakhstan est de plus en plus ouvert et offre de grandes perspectives pour les capitaux étrangers.

mercredi 2 septembre 2015

Singapour, le nouvel eldorado pour start-up en Asie

 
Pour son 50e anniversaire, Singapour s'offre la 10e place du classement Compass des meilleurs écosystèmes pour start-up. Il y a trois ans, elle n'était que 17e. La cité-Etat fait tout pour s'imposer comme le hub des start-up en Asie.
 
Bienvenue au Block 71, à l'ouest de Singapour. C'est ici dans cet immeuble bleu de 7 étages qu'ont éclos les premières start-up du cru. Aujourd'hui il y en a plus de 250, aux côtés d'accélérateurs, d'incubateurs et d'investisseurs de tout poil. En face du campus de l'Insead et à quelques encablures de l'Université Nationale de Singapour, le gouvernement façonne son quartier high-tech. Baptisé LaunchPad, il est le symbole des ambitions de la cité-Etat : devenir le hub asiatique des start-up. Au-delà du block 71 qui devrait attirer 750 start-up d'ici 2017, le block 73, mais aussi 79 hébergent les acteurs de la scène tech. D'autres espaces sont déjà en construction et devraient sortir de terre à horizon 2016 et 2017. Des projets tous azimuts qui font rentrer Singapour dans le top 10 des meilleurs écosystèmes de start-up selon une étude publiée par Compass. Une prouesse pour ce pays qui vient tout juste de fêter ses 50 ans.
 
En un peu moins d'une décennie, Singapour a vu son tissu de start-up se développer considérablement. Il y aurait plus d'un millier de jeunes pousses à Singapour, un chiffre qui a doublé en 5 ans seulement. " C'est véritablement ces deux dernières années que le mouvement s'est accéléré " observe Greg Unsworth, le spécialiste technologie du cabinet d'audit Pricewaterhouse Cooppers à Singapour. La cité-Etat peut même se targuer d'avoir engendré trois licornes (des start-up qui valent plus d'un milliard de dollars) en un temps record. Grabtaxi, le concurrent asiatique d'Uber créé il y a 3 ans à peine est déjà considéré comme la success-story d'Asie du sud-est, Garena Online, une plateforme de jeux en ligne créée en 2009 et Lazada, souvent appelé l'Amazon d'Asie du Sud-est fondé en 2012 par Rocket Internet. Mais impossible de parler de start-up à Singapour sans parler des géants comme Propertyguru, site spécialisé dans l'immobilier depuis 2006 qui vient de lever 129 millions de dollars ou encore RedMart, un supermarché en ligne présent depuis 2011 et qui vient de lever plus de 26 millions de dollars et de débaucher au passage un ancien vice-président d'Amazon.
D'autres start-up ont déjà été rachetées, c'est le cas par exemple de Zopim, créé il y a 6 ans et spécialisée dans la messagerie instantanée, acquise 30 millions de dollars par l'américain Zendesk en 2014. Mais il y a aussi le groupe français LVMH qui a mis la main sur Luxola, un site de commerce de cosmétiques en Asie. A ce jour, le rachat le plus spectaculaire est encore celui de Viki, un spécialiste du streaming vidéo par le géant japonais Rakuten pour 200 millions de dollars.
 
"Ces premières start-up qui réussissent sont des modèles pour les futurs entrepreneurs et certains deviennent à leur tour des business angels, explique Arnaud Bonzom, directeur des projets spéciaux pour le fonds de capital-risque 500 Startups. Cela aide à booster l'écosystème". "Cela aide à booster l'écosystème" ajoute-t-il. Selon une étude sur le paysage des start-up qu'il a réalisée, les secteurs privilégiés des jeunes pousses sont encore le e-commerce, les logiciels et les médias. Mais la fintech commence à attirer l'attention. "Il y a un fort potentiel sur les fintech explique le Français. Singapour est déjà une place financière, donc l'évolution est naturelle". Preuve de cet engouement pour la fintech, un certain nombre d'accélérateurs s'y sont installés. C'est le cas de Startup Bootcamp, l'un des accélérateurs les plus actifs d'Europe qui a lancé un programme de 3 mois à Singapour dédié aux start-up de la fintech. "Nous avions le choix entre Singapour et Hong-Kong explique Markus Gnirk, le cofondateur de l'incubateur. Mais nous avons opté pour Singapour car nous avons obtenu un large soutien de la part des autorités".
 
Le gouvernement : premier accélérateur de start-ups
 
A l'image d'Israël, le rôle du gouvernement de Singapour a été un élément pour faire émerger en un temps record l'écosystème des start-up. Le pays se rêve plus largement en "smart nation" plaçant l'innovation et les technologies au cœur de son développement économique. Une mission confiée à l'Infocomm Development Authority (IDA), organe officiel du gouvernement, qui a récemment mis en place Infocomm Investments, un fonds dotée 180 millions d'euros pour stimuler l'émergence et la croissance de start-up singapouriennes. "Il y a une très forte volonté gouvernementale d'attirer et de connecter les acteurs qui pourront stimuler l'innovation", explique Eric Saint-André, le fondateur d'Amplification Lab, une société singapourienne dont le but est d'accélérer le développement des start-up ainsi que l'innovation au sein des entreprises.
 
"Quand j'ai lancé Bitsmedia en 2009, l'action du gouvernement consistait principalement à donner de l'argent aux start-up, explique Erwan Macé, le fondateur de Bitsmedia, dont l'application phare Muslim Pro compte plus d'un million d'utilisateurs actifs par jour. Mais ce qui fait la force de la Silicon Valley c'est son écosystème". Singapour l'a vite compris et a alors cherché à attirer aussi bien les fonds de capital risque que les départements de recherche des grandes entreprises. Au total, ce sont plus de 10 milliards d'euros qui ont été injectés pour doper la scène tech instaurant tout un dispositif d'aides, de subventions et déroulant le tapis rouge aux investisseurs. "J'ai été invité pendant 1 mois par le gouvernement et on m'a présenté plus de 80 start-up", explique Vinnie Lauria de Global Gate Ventures, un fond de capital-risque installé à Singapour et dans la Silicon Valley. Si l'Américain a décidé de s'installer en 2012 Singapour, c'est qu'à l'époque l'Asie du Sud-Est était largement délaissée par les grands investisseurs lui préférant la Chine ou l'Inde. "Cette région de l'Asie reçoit enfin l'attention qu'elle mérite explique Dave McClure, le fondateur de 500 Startups. Et c'est justement dans cette région du monde que les investisseurs recherchent de nouvelles pépites. "Certains de mes meilleurs investissements sont en dehors des Etats-Unis comme Baidu en Chine ou Skype en Estonie. Je veux maintenant en trouver un autre en Asie du sud-est " confiait Tim Draper, le millionnaire et investisseur bien connu de la Silicon Valley au magazine VentureBeat.
 
Money Money
 
En quelques années seulement, la donne a changé. "En 2010-2011, il y avait 3-4 série A (premier tours de table de levée de fonds) par an, maintenant il y en a 3-4 par mois" observe Vinnie Lauria, qui a accueilli Eduardo Saverin, le cofondateur de Facebook (résidant à Singapour) et le fonds souverain singapourien Temasek au capital de Global Gate Ventures. Excusez du peu ! Les grands acteurs du capital-risque, comme l'Américain Sequoia, ou les japonais Softbank, Rakuten Ventures ou Gree se sont depuis posées sur les rives de la cité-Etat. Car les opportunités en Asie du sud-est commencent à aiguiser l'appétit des chinois. La start-up chinoise Didi Kuaidi et le fonds souverain chinois CIC viennent justement d'investir dans Grabtaxi. En seulement trois ans les investissements des fonds de capital-risque à destination des start-up ont été multipliés par 60, passant de 27,9 millions de dollars en 2011 à plus d'1 milliard de en 2014, selon le Wall Street Journal.
 
A ces fonds étrangers, viennent s'ajouter également de nouveaux fonds singapouriens comme Monk's Hill ou RedDot Ventures. Singapour compte également sur des "anges" influents comme Eduardo Saverin ou Toivo Annus, le cofondateur de skype, attirés par la fiscalité avantageuse du pays. "Il y a un effet boule de neige observe Greg Unsworth les investisseurs s'attirent les uns les autres".
 
L'argent ne manque donc pas à Singapour. Mais les fonds sont surtout disponibles pour les phases d'amorçage. "Singapour, c'est le bon endroit pour démarrer et pour les séries A explique Dinesh Batiao, le fondateur de TradeHero, une application de trading avec de la monnaie virtuelle. Au-delà cela devient plus compliqué".
 
Pour développer son écosystème de start-up, Singapour a pu compter sur ses atouts traditionnels. N'est-elle pas depuis 8 années consécutives la ville au monde où il est le plus facile de faire des affaires ? "On peut enregistrer une entreprise en quelques heures, l'environnement fiscal est favorable et il y a de nombreuses aides de la part du gouvernement" explique Thierry de Panafieu, fondateur de Hera Capital, fonds de private equity. Sans compter sa localisation géographique stratégique au cœur de l'Asie du Sud-Est, à quelques heures d'avion seulement de la Chine et de l'Inde. Car si les start-up s'implantent à Singapour, elles visent naturellement des marchés plus grands. C'est le cas de Grabtaxi, incorporé à Singapour mais présent dans plus de 22 villes à travers 6 pays en Asie du sud-est. Le rival d'Uber a d'ailleurs annoncé début juin qu'il se lançait sur le marché indien. C'est aussi à Singapour que se concentrent les sièges sociaux des grandes multinationales. Un avantage pour Scott Montgoméry, le cofondateur de GlobeTrekker, une application destinée aux entreprises pour encourager leurs employés à développer une bonne hygiène de vie. "Mes clients sont les grandes entreprise comme Allianz ou Disney, ils sont tous présents à Singapour donc j'ai intérêt à être ici" explique l'entrepreneur néo-zélandais qui vient de lever 600 millions de dollars auprès d'investisseurs privés.
 
Si la scène des start-up est bel est bien en effervescence, il est encore prématuré de comparer Singapour à la SiliconValley. "Cela n'a pas de sens affirme Vinnie Lauria. Ici c'est un écosystème naissant alors que la Silicon Valley existe depuis 60 ans". Et si le gouvernement se donne tous les moyens et notamment financiers pour atteindre ses ambitions, il est conscient que son modèle économique a jusqu'à présent laissé peu de place à la culture entrepreneuriale et à la prise de risque. "Lorsque j'ai lancé ma start-up 2008, la plupart de mes camarades à l'époque voulaient plutôt travailler dans les banques ou les grandes entreprises explique Royston Tay, le fondateur de Zopim. Aujourd'hui les mentalités commencent à évoluer petit à petit". Se pose également le problème du recrutement. "L'informatique n'a jamais été considérée comme une filière prestigieuse à Singapour. Les rares développeurs de talent partent le plus souvent dans la finance, résultat il manque aujourd'hui des développeurs constate Erwan Macé. Il faut donc souvent recruter de la main d'œuvre étrangère, mais les visas sont de plus en plus difficiles à obtenir". Mais selon Dave McClure, l'un des inconvénients majeurs de Singapour reste la petite taille de son marché. "Le marché régional se développe et les investisseurs vont être tentés d'aller directement en Malaisie ou en Indonésie explique-t-il. Singapour doit donc continuer ses efforts pour développer un écosystème attractif ".
 
Par Marion Zipfel sur www.journaldunet.com le 02/09/2015

En Asie centrale, la fonte des glaciers a commencé

 
Douchanbe (Tadjikistan) (AFP) – Tout a commencé par un grondement sourd. Puis la boue a déferlé et semé la destruction dans Barssem, un village à flanc de montagne du Tadjikistan, victime de la fonte des glaciers d’Asie centrale qui selon les scientifiques s’accélère dangereusement.
« La boue a tout emporté sur son passage : les maisons, les voitures… », se souvient Chakarbek Kourbonbekov, un villageois de 60 ans, plus d’un mois plus tard. « Ceux qui ont pu se sont échappés vers des terrains en hauteur, on n’avait pas le temps de réfléchir », poursuit-il, joint au téléphone par l’AFP.
Le villageois tadjik en est persuadé : le 16 juillet, il ne doit sa survie qu’à sa propre chance. Au total, coulées de boues en série et inondations ont fait au moins 12 morts et détruit une centaine de maisons dans l’est de l’ex-république soviétique.
Le phénomène, conséquence d’une vague de chaleur qui a débuté ce jour-là, témoigne des bouleversements écologiques en cours en Asie centrale, une région pour laquelle les réserves d’eau apportées par les glaciers sont vitales.
Ces glaciers du massif du Pamir au Tadjikistan et des monts Tian au Kirghizstan alimentent les fleuves Amou-Daria et Syr-Daria, qui jouent un rôle stratégique dans la région en permettant depuis des siècles l’irrigation des terres agricoles.
Mais selon une étude publiée récemment par le centre de recherches allemand GFZ, le volume des glaciers des monts Tian diminue actuellement quatre fois plus vite que la moyenne de ces dernières décennies. Pour ces experts, ces glaciers, après avoir fondu d’un quart depuis 1961, auront totalement disparu d’ici 2050.
Les signes de réchauffement de cette chaîne montagneuse au carrefour du Kirghizstan, du Kazakhstan, de l’Ouzbékistan et de la Chine, sont criants dans les stations de ski de la région, qui datent souvent de la période soviétique.
« La saison devient plus courte chaque année faute de neige et de températures assez froides », assure Oleg Tchernogorski, qui organise des voyages dans ces montagnes depuis 30 ans. Preuve « indéniable » selon lui du réchauffement climatique, la saison de sports d’hiver, qui commençait encore dans les années 1990 le 1er décembre, ne peut désormais être lancée qu’à l’approche du Nouvel An.
Au Kazakhstan, la fonte des glaces a conduit en juillet à la saturation d’un barrage, provoquant des inondations aux portes de la plus grande ville du pays, Almaty, et privant 3.000 personnes d’électricité.
Pour Piotr Plekhanov, ancien directeur de l’Institut d’hydrologie et de géo-écologie du Kazakhstan, l’Asie centrale doit se préparer à vivre ce genre de situations de plus en plus souvent. « Les plus riches comme le Kazakhstan seront capables de mieux y faire face. Les plus pauvres comme le Kirghizstan ou le Tadjikistan, avec de vastes montagnes et peu d’argent, sont plus vulnérables », prévient-il, interrogé par l’AFP.
A l’époque soviétique, le partage des eaux en Asie centrale était décidé à Moscou, mais le système a éclaté avec l’indépendance des cinq pays de la région en 1991, faisant craindre que la rivalité pour cette ressource ne dégénère en conflits.
Les zones frontalières sont d’ailleurs le théâtre de heurts sporadiques, comme entre le Kirghizstan et le Tadjikistan: un garde-frontière kirghiz a ainsi été tué cette année dans une vallée où les populations des deux pays se disputent l’usage de l’eau d’une rivière.
Ces deux Etats ruraux veulent par ailleurs construire des barrages pour limiter l’accès à l’eau de leurs voisins riches en hydrocarbures que sont le Kazakhstan, le Turkménistan et l’Ouzbékistan.
En Ouzbékistan, un pays qui est un gros producteur de coton avec d’importants besoins en eau, le président Islam Karimov a déjà prévenu que de tels ouvrages risquaient de provoquer une guerre dans la région.
Pour certains experts, une meilleure gestion de la consommation en eau pourrait en partie compenser les pénuries redoutées. La revue scientifique Nature a estimé l’an dernier que le Turkménistan, désertique et riche en gaz, était le premier consommateur au monde d’eau par habitant, les autres pays de la région suivant non loin derrière.
« Il y a un manque de responsabilité », confirme M. Plekhanov. « Beaucoup d’eau se perd simplement à cause d’une mauvaise irrigation ».
Les projets d’irrigation de la période soviétique sont déjà jugés responsables dans la région d’une catastrophe environnementale majeure : l’assèchement de la mer d’Aral, entre l’Ouzbékistan et le Kazakhstan.
Sur www.goodplanet.info le 02/09/2015