Manifestation contre le film anti-islam à Makassar,
sur l'île de Sulawesi en Indonésie, le 21 septembre.
REUTERS / YUSUF AHMAD
Les manifestations contre le film anti-islam produit aux Etats-Unis ont dégénéré en violences, vendredi 21 septembre, dans plusieurs villes du Pakistan. Trois personnes sont décédées et une quinzaine d'autres ont été blessées. Les autorités avaient décrété ce vendredi férié et l'avaient rebaptisé "Jour de l'amour du Prophète" pour permettre à la population de manifester pour la défense de l'islam et de Mahomet, tournés en ridicule dans le film américain L'Innocence des musulmans.
Les forces de sécurité étaient en alerte, notamment dans l'enclave diplomatique de la capitale Islamabad, et les marchés, commerces et stations d'essence étaient fermés dans de nombreuses villes, dans un accès de prudence général d'une ampleur rare dans le pays.
L'ambassadeur américain convoqué
Dans la matinée, le premier ministre, Raja Ashraf, avait pourtant appelé la population au calme. "Une attaque contre le Prophète est une attaque contre la croyance première de 1,5 milliard de musulmans. C'est inacceptable, a-t-il déclaré. [Mais] il est de notre responsabilité collective de protester pacifiquement."
Les Etats-Unis diffusaient de leur côté des publicités en ourdou, la langue nationale du Pakistan, sur différentes chaînes du pays afin de calmer la colère populaire, soulignant qu'ils n'ont rien à voir avec L'Innocence des musulmans, produit sur leur territoire il y a un peu plus d'un an.
Vendredi, les autorités pakistanaises ont "convoqué" le plus haut diplomate américain en poste au pays pour demander aux Etats-Unis de "prendre des mesures immédiates" afin de retirer le film anti-islam de YouTube. Le gouvernement pakistanais a "fait part de sa vive protestation" à Richard Hoagland, à propos de ce film "blasphématoire". Le Pakistan comme le Soudan, l'Afghanistan, le Bangladesh ou encore l'Arabie saoudite avait dans la semaine bloqué l'accès à YouTube, où le film était visible.
Manifestations dans le monde musulman
Au Yémen, des centaines de manifestants protestaient contre le film islamophobe vendredi à Sanaa, sans pouvoir s'approcher de l'ambassade des Etats-Unis, fortement protégée par les forces de sécurité. Les manifestants ont notamment scandé des slogans appelant "au départ de l'ambassadeur américain et des forces étrangères du Yémen", en allusion à une cinquantaine de Marines dépêchés la semaine dernière en renfort pour la protection de l'ambassade à Sanaa, suite à la mort, le 13 septembre, de quatre Yéménites lors d'une prise d'assaut de l'ambassade américaine par des manifestants.
En Indonésie, quelques dizaines de manifestants ont défilé devant des entreprises américaines et des représentations consulaires de la France et des Etats-Unis en Indonésie. Environ 200 personnes ont protesté devant le consulat de France à Surabaya (est de Java) aux cris de "Mort à l'Amérique, mort à la France". Des échauffourées avaient auparavant mis aux prises plusieurs centaines de policiers aux manifestants qui s'étaient attaqués à un McDonalds.
A Benghazi, dans l'est de la Libye, où quatre Américains, dont l'ambassadeur, ont été tués le 11 septembre, le groupe salafiste Ansar Al-Charia a appelé à une manifestation pour défendre le prophète Mahomet. Mais des militants exaspérés par la montée en puissance des groupes islamistes radicaux en Libye ont de leur côté appelé à un rassemblement pour "sauver Benghazi" de l'extrémisme et de la violence.
Des manifestations étaient aussi prévues au Liban et chez les Palestiniens en Cisjordanie. Le puissant mouvement chiite libanais Hezbollah a appelé à manifester après la grande prière hebdomadaire, et l'armée libanaise a renforcé sa présence autour de la résidence de l'ambassadeur français à Beyrouth.
En Tunisie, le ministère de l'intérieur a annoncé l'interdiction de toute manifestation dans le pays vendredi. L'ambassade de Grande-Bretagne, ainsi que les services consulaires allemands à Tunis étaient fermés. Paris a ordonné la fermeture vendredi des ambassades, consulats et écoles françaises dans une vingtaine de pays musulmans.
Le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, a estimé que le film islamophobe était le fruit d'un "complot israélien visant à diviser [les musulmans] et provoquer un conflit sectaire", dans un discours à l'occasion d'un défilé militaire organisé vendredi à Téhéran pour l'anniversaire du début de la guerre Iran-Irak (1980-1988). Que les Etats-Unis prétendent n'avoir pu, au nom de la liberté d'expression, censurer ce film est une "tromperie", a déclaré M. Ahmadinejad dans ce discours retransmis à la télévision lors du défilé auquel ont participé des milliers de soldats, des chars et des missiles chargés sur des camions.
Sur www.lemonde.fr le 21/09/2012
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