dimanche 29 novembre 2015

La longue marche de la « monnaie du peuple »

C'est aujourd'hui que le FMI intègre la monnaie chinoise dans son panier de devises de référence. Un pas de plus vers la reconnaissance internationale pour le yuan, et une étape stratégique pour Pékin qui cherche à se soustraire à l'influence du dollar.

Des « Renminbi » disponibles n'importe où et n'importe quand, comme c'est le cas du dollar ou de l'euro ? Des taux de changes fixés par l'offre et la demande, avec juste ce qu'il faut d'intervention de la banque centrale chinoise à l'image de ce que font avec doigté la Fed ou la BCE ? Des capitaux qui vont et viennent librement dans le pays, quitte pour le parti communiste à abandonner une partie de sa souveraineté aux investisseurs étrangers ? Même si la monnaie du peuple s'apprête à rejoindre la première division des devises mondiales, tout cela va encore demander du temps.

Sauf surprise de dernière minute, le Fonds monétaire international va intégrer aujourd'hui le Yuan (l'autre nom du Renminbi) dans son panier de référence – les « droits de tirage spéciaux » ou DTS dans le jargon de l'organisation. Ce faisant, la Chine va surtout gagner un surcroît de reconnaissance internationale : quand on est la deuxième puissance économique mondiale, on se doit disposer d'une monnaie de référence, même si l'inclusion dans les DTS ne va pas provoquer un afflux de demande en yuans.

Peu importe, car pour Pékin il s'agit d'une étape symbolique qui s'inscrit dans un dessein bien plus large et de long terme : sortir de la dépendance au dollar et, un jour, créer une zone renminbi, comme il y a une zone dollar. La devise chinoise a déjà fait une partie du chemin vers son internationalisation depuis qu'elle a vu le jour, confinée dans le pays par Mao et ses compagnons durant des décennies. Sa longue marche vers le monde extérieur peut être tracée en 2005 avec la fin de la parité fixe par rapport au billet vert. Quatre ans plus tard, alors que la planète essaye d'éteindre l'incendie des « subprimes » américains, Zhou Xiaochuan, le gouverneur de la banque centrale chinoise (la « PBOC » en anglais) émet l'idée que la planète se dote d'une « super »-devise de référence internationale. Sans succès, et la monnaie américaine a conservé depuis sa suprématie.

La patience étant une vertu cardinale en Chine, Pékin a alors fait de l'inclusion du yuan dans le panier de référence du FMI une priorité nationale, poursuivant toute une série de réformes de son système financier pour accroître l'usage international de sa devise et, ainsi, se donner le maximum de chances de réussir l'examen. Royaume-Uni, Allemagne, France, Suisse… On ne compte pas les accords de « swaps » de la PBOC avec ses homologues occidentales. Ces dernières, ainsi que les fonds souverains, ont désormais accès au marché interbancaire chinois des obligations.

Lors de sa visite en grande pompe à Londres en octobre dernier, Xi Jinping a annoncé que le pays allait émettre de la dette en yuans depuis la City. L'idée d'une connexion directe entre les Bourses des deux pays a aussi été lancée. La liaison Hong Kong-Shanghai, elle, vient de souffler sa première bougie sur un bilan mitigé mais qui n'injurie en rien l'avenir, en attendant celle qui reliera l'ex-colonie britannique et Shenzhen (« Les Echos » du 17 novembre). Autre mesure phare, les taux de prêts ou de dépôts ont perdu leurs dernières contraintes, même si les banques ne sont pas encore totalement libres de faire ce qu'elles veulent.

Et puis il y a eu le changement surprise, le 11 août dernier, du mécanisme de fixation du yuan, qui a eu l'effet d'une bombe sur le marché actions. Considérée par la planète entière comme une dévaluation compétitive destinée à relancer les exportations, la mesure était plus probablement destinée à plaire au FMI. Message reçu par les équipes de Christine Lagarde, qui ont fait tomber leurs dernières réserves doctrinales sur le caractère convertible de la devise chinoise. Depuis, la banque centrale intervient quasiment tous les jours pour maintenir proches les taux du yuan « onshore » (contrôlé à Shanghai) et « offshore » (librement à Hong Kong) par rapport au dollar. Le mot d'ordre ? Stabilité. Ne manquait plus que les Etats-Unis lèvent leur critique récurrente sur la sous-évaluation du yuan, et le blanc-seing du FMI était acquis.

Pour quel bilan, in fine ? Le yuan est de plus en plus utilisé dans les transactions commerciales mondiales, au point d'avoir supplanté le yen japonais. Mais il ne pèse que 3 % du total. Qui plus est, l'essentiel se fait entre le Continent et… Hong Kong. Les flux de capitaux restent contrôlés et la banque centrale dégaine plus souvent que ses pairs l'arme monétaire. Les interventions politiques pour mettre fin au krach boursier de cet été ont atteint leurs objectifs, mais au prix d'une grande défiance des investisseurs étrangers, qui n'apprécient que très peu les interventions étatiques d'une manière générale, et chinoises encore moins. Pékin paie là le manque d'indépendance de ces organes de contrôle.

Tout cela fragilise le discours officiel censé laisser les « forces du marché » jouer un rôle accru dans la marche des affaires. D'autant que, avec le ralentissement économique en cours, les réformes du système financier pourraient perdre de leur priorité devant les mesures de relance. Les quelques mois à venir seront donc cruciaux pour vérifier si, à Pékin, le vrai changement, c'est maintenant ou non. En attendant, la Chine peut se targuer d'une victoire symbolique : sa « monnaie du peuple » est la première devise émergente à intégrer le FMI.

Alain Ruello sur www.lesechos.fr le 29/11/2015

Thaïlande: le goût de cauchemar

Plages interminables de sable blanc, soleil et eaux turquoises du lagon qui disparaissent au-delà de l'horizon. Cela semble comme une image de la publicité populaire avec son slogan « goût de paradis ». Mais malheureusement, c'est juste l'une des facette de la Thaïlande. Communément appelé le pays du sourire, ce pays est devenu l'une des destinations touristiques les plus dangereuses sur Terre.

Explosion dans le centre de Bangkok. Cette année. En août. Vingt morts, dont quatre étrangers. À l'époque, je me trouvais dans la capitale thaïlandaise. Assez loin du lieu de l'explosion. Mais j'ai ressenti à pleine bouffée, le sentiment de peur qui était palpable dans l'air. Pour la Thaïlande, un tel accident est quelque chose de commun, pas une urgence. La Thaïlande a vu plusieurs accidents de la route, meurtres, y compris ceux d'étrangers, vols et de nombreux autres incidents qui vont souvent de pair avec le « goût de paradis » promis.

Une telle situation en Thaïlande n'est pas une surprise. Il y a une armée de raisons à cela : l'économie glisse vers la récession sous le poids d'une mauvaise gouvernance, de la corruption dans toutes les sphères de la vie et par dessus de tout de l'instabilité politique permanente. Le pays semble être le foyer de désordre et de troubles dans la région de l'Asie du Sud-Est. Le rappel de quelques faits est nécessaire. En particulier depuis 1932, lorsque la monarchie absolue a été aboli, la Thaïlande a connu dix-neuf coups d'Etat. Douze d'entre eux ont réussi.

Le dernier coup d'Etat militaire en Thaïlande a eu lieu le 22 mai 2014. Après des mois de protestations antigouvernementales les militaires de la Thaïlande ont pris le contrôle du gouvernement, dissous le Sénat et ont suspendu la Сonstitution. Il est utile de préciser que pendant les quatre-vingts dernières années la Constitution du pays avait été changé dix-huit fois.

L'armée a établi une junte appelée le Conseil national pour la paix et l'ordre, qui a élu à l'unanimité le général Prayut Chan-o-Cha comme nouveau Premier ministre du pays. Peu de temps après, le roi l'a nommé pour diriger le pays. En Thaïlande, cela signifie la légitimation de la prise de contrôle. Il doit être noté qu' à chaque fois depuis 1946, le Roi Bhumibol Adulyadej a soutenu sans aucune hésitation le nouveau gouvernement, indépendamment de la façon dont il a été formé, que ce soit après des élections démocratiques légales ou juste après un coup d'état. En Thaïlande, l'armée est très puissante et possède les compétences pour diriger le pays dans les cas d'instabilité. Et les généraux de l'armée ne tardèrent pas à en profiter. Après le coup d'Etat de 2014 les militaires thaïlandais ont placé en détention des membres de la classe politique, certains scientifiques et journalistes, a déclaré le couvre-feu et ont fermé les médias. Le couvre-feu a été levé seulement un an après le coup d'état.

Outre le manque de stabilité dans le pays, la Thaïlande a des problèmes à ses frontières extérieures. Le différend frontalier de  long terme entre le Cambodge et la Thaïlande place les pays voisins au bord d'une guerre à grande échelle. Jusqu'à présent, il n'y avait que des escarmouches à la frontière avec en résultat, des morts et des blessés. Au cours de l'une d'elles, le Cambodge a accusé les militaires thaïlandais d'avoir utilisé du gaz et des bombes à fragmentation neuroparalytiques, interdites par le droit international. La Thaïlande a nié ces accusations.

Tous ces facteurs sapent évidemment la réputation de la Thaïlande au yeux non seulement de ses voisins, mais aussi de l'Occident. Encore et encore, les coups d'Etat en Thaïlande ont été condamné par un certain nombre de pays, dont les officiels disaient qu'il n'y avait aucune justification à ceux-ci et qu'ils devaient mettre fin à des accords politiques et économiques vitaux avec Bangkok.

Donc, ce n'est pas une surprise si la Thaïlande a porté atteinte à sa propre réputation et a obtenu le titre de partenaires parmi les moins fiables et de l'un des pays les plus dangereux au monde. Ce qui est surprenant dans cette situation est que même en étant conscient de toutes les menaces et des risques, certains touristes vont encore à la Thaïlande pour se reposer. Bien que parfois ils obtiennent à la place des problèmes. Et ce qui est plus surprenant est qu'avec une telle réputation inadmissible, la Thaïlande espère prendre un siège à l'endroit où l'avenir du monde entier prend forme. La Thaïlande s'est portée candidate au poste de membre non permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies pour 2017-2018. Ce pays qui n'est pas en mesure de donner un bon exemple à suivre veut décider de la destinée des autres. Les politiciens qui ne sont pas en mesure de mettre de l'ordre dans leur propre pays vont mettre de l'ordre à une échelle mondiale.

Il est évident que les pays avec une telle biographie placés à l'endroit où la destinée du monde est dans la balance, au cœur même de l'organisation internationale de premier plan ne contribueront pas au renforcement du leadership de celle-ci, alors même qu'en ce moment, le leadership est ce qui est le plus important pour les Nations Unies, laquelle est essentielle pour le règlement des conflits et ceux qui n'ont pas encore atteints leur apogée.

Seuls ceux qui démontrent par leur propre exemple la voie de la réussite à ceux qui sont précisément à sa recherche, sont en mesure d'apporter un tel leadership à l'ONU. Seuls les pays qui montrent stabilité politique et économique, respect des valeurs démocratiques et des responsabilités mondiales, en dépit de tous les changements dans l'environnement extérieur peuvent être un exemple ouvrant droit à une candidature à l'Organisation. Ces Etats pourraient regagner la confiance du monde et le respect de l'Organisation des Nations Unies. Il est évident que la Thaïlande est un candidat inadéquat pour une telle mission.

jeudi 26 novembre 2015

La conversion d’Apple aux écrans OLED fait paniquer les Japonais


Les deux plus gros producteurs japonais d'écrans LCD pour smartphones et tablettes chutent en Bourse ce jeudi. Un coup de froid déclenché par un article du « Nikkei» annonçant la conversion d'Apple aux écrans OLED.


Les deux plus grands producteurs japonais d'écrans LCD pour smartphones et tablettes encaissent depuis ce jeudi matin une très lourde chute de leurs titres sur la place de Tokyo. A la mi-journée, Japan Display plongeait de plus de 7,5% quand Sharp, qui avait rebondi ces derniers jours, perdait, lui, 4,6%. Le coup de froid sur les valeurs des deux sociétés a été enclenché par la publication, dans le « Nikkei », d'un article annonçant la conversion de l'américain Apple aux écrans organiques électroluminescents dits OLED.

La firme aurait décidé d'équiper, à partir de 2018, une large partie de ses iPhone de cette nouvelle génération d'écrans qui offre une image plus contrastée, une structure plus fine tout en réduisant la consommation d'énergie de la dalle. Or, soulignent les analystes, les deux géants japonais, qui ont surtout parié ces dernières années sur une amélioration des écrans LCD conventionnels, sont actuellement mal armés pour emporter de larges commandes d'Apple. S'ils maîtrisent la technologie OLED, ils ne disposent pas actuellement de capacités industrielles suffisantes pour répondre au gigantisme des commandes habituelles d'Apple.

Selon les analystes, les grands gagnants d'un passage d'Apple à l'OLED seraient, dès lors, les sud-coréens Samsung Display, l'actuel leader sur ce marché, et LG Display. Le numéro deux coréen de l'électronique avait annoncé l'été dernier de nouveaux investissements massifs dans l'OLED et notamment la construction d'une nouvelle usine de dixième génération. Il est toutefois pour l'instant concentré sur les dalles OLED de grande taille pour téléviseurs et ne s'est pas spécialisé, comme Samsung Display, dans les écrans organiques pour smartphones et tablettes.

Contaminés par l'inquiétude touchant Sharp et Japan Display, plusieurs équipementiers nippons ont aussi vu, ce matin, leurs titres reculer sur la place de Tokyo. Minebea, qui fournit les systèmes de rétro-éclairage des écrans d'iPhone, a encaissé un plongeon de près de 9%. Il y a quelques semaines, le groupe avait assuré aux investisseurs qu'il ne croyait pas à une conversion imminente d'Apple à l'OLED.

Si les informations du « Nikkei » étaient confirmées dans les prochaines semaines, elles compliqueraient grandement les efforts de redressement de Sharp. En grande difficulté financière depuis quatre ans, le groupe misait sur une cession partielle ou totale mais à bon prix de son activité LCD pour organiser la renaissance de ses autres divisions. Si les perspectives de ce pôle apparaissent soudain plus sombres encore, le plan sauvetage de la société risque d'être plus difficile à définir.

Overdose d'acier, de zinc et de nickel pour la Chine

Ralentissement économique et baisse des exportations obligent, le problème des surcapacités industrielles en Chine est de plus en plus criant. Dernier exemple en date, le secteur des métaux non ferreux - aluminium, zinc, nickel… -, qui pousse les producteurs chinois à en appeler à l'Etat pour qu'il leur rachète les excédents. Si la requête de la « China Nonferrous Metals Industry Association » est acceptée, ce serait le premier effort en ce sens depuis 2009 pour redresser des prix en chute libre, selon Reuters.

Les producteurs de zinc ont déjà proposé de réduire de 500.000 tonnes leur production en 2016, soit l'équivalent d'un mois de production, et leurs confrères de nickel vont débattre entre eux vendredi de l'opportunité d'une démarche similaire.

Dans l'acier, un sérieux bras de fer oppose les industriels chinois à leurs concurrents étrangers qui les accusent d'écouler leurs excès à prix cassés. Pékin a par ailleurs autorisé les petites raffineries à exporter ce qui est également perçu comme un moyen de maintenir ces entreprises, souvent privées, en vie, sans mener de véritable restructuration, de peur du coût social induit, décrypte un bon connaisseur du secteur.

Avec une progression de son PIB annoncée autour de 7% cette année , la Chine s'achemine vers sa plus faible croissance en plus de 20 ans et cherche à confirmer une transition de son modèle économique davantage tournée vers la consommation et les services.

Par Yann Rousseau le 26/11 sur www.lesechos.fr

dimanche 22 novembre 2015

Les attentats terroristes à Paris

La violence des terroristes a été brutale et cynique. Elle s'est déroulée à notre époque, dans le cœur du cœur de l'Europe. Cela pourrait être le nouveau point de départ de l'histoire. Le point, après quoi le monde devra changer radicalement les règles de comportement global, effacer tous les différends et les conflits frontaliers par une union éclatante contre la menace commune la plus importante, le terrorisme.

Il ne faut pas seulement des mots mais de l'action. Un plan clair a déjà été exprimé dans le monde. A la tribune des Nations Unies, le Kazakhstan a pris l'initiative de ce qui pourrait mettre un terme au terrorisme sévissant dans le monde et qui aujourd'hui prend une échelle véritablement mondiale, peu importe si à première vue, elle peut sembler impossible à mettre en œuvre. Le Kazakhstan propose de créer un réseau mondial unifié pour contrer le terrorisme international et l'extrémisme. Le dirigeant kazakh propose l'approbation par l'Organisation des Nations Unies, d'un document exhaustif qui confirmerait la volonté de tous les pays à faire face à l'ennemi principal, le terrorisme. L'ennemi n'est pas une personne et n'a pas de méthode spécifique et cette guerre qui n'a pas de lignes de front claires. Tout cela est particulièrement dangereux.

Par un autre élément de ce plan, ce dont peu de gens parlent, ce devrait être une solution aux problèmes économiques mondiaux. Le président kazakh estime à juste titre que les problèmes économiques sont en grande partie provoqués par des phénomènes négatifs dans le monde, y compris le terrorisme. Et cette question nécessite également une réponse, une approche commune. Selon le Président du Kazakhstan, l'idée d'un plan anticrise mondiale est devenu l'objet d'une attention particulière de la communauté internationale. Les crises des dernières années démontrent la futilité des politiques isolationnistes. Le monde a besoin de nouvelles règles de vie.

A l'échelle mondiale, le Kazakhstan lui-même pourrait servir de modèle à tous les changements souhaités par les dirigeants des différents pays. Il est le pays le plus stable d'Asie Centrale. Tout d'abord, dans le sens politique et  ceci en dépit de la proximité géographique de l'une des principales sources d'instabilité sur le continent, l'Afghanistan, dont il n'est pas toujours possible de freiner l'impact destructeur pour ses voisins.

Le Kazakhstan est comme notre monde en miniature, ou tel qu'il devrait être à l'avenir, c'est-à-dire déjà au minimum,  sans armes nucléaires. Notre avenir lointain est si proche. Le Kazakhstan est le premier pays dans l'histoire qui par sa propre décision, a fermé son site d'essais nucléaires et a volontairement renoncé au quatrième arsenal nucléaire mondial, et créé une zone franche en Asie centrale. Aujourd'hui, le président du Kazakhstan propose de renouveler cette expérience au Moyen-Orient, d'où vient maintenant le principal danger pour la sécurité de la planète et d'où les interminables guerres génèrent les migrations incontrôlées, le terrorisme et le chaos. Une telle mesure est plus que nécessaire.

Quant à l'économie, le Kazakhstan est maintenant un exemple concret pour beaucoup de théoriciens. Au plus grave de la crise mondiale de 2008-2009 ce pays s'en est sorti avec des pertes minimales. Dans la crise actuelle, plus ambitieux, le Kazakhstan a élaboré et commencé à mettre en œuvre un plan radical de redressement. A Astana, on reconstruit complètement le système de sorte qu'il ne conduise plus à des échecs. Le programme « 100 mesures concrètes » du Président du Kazakhstan et son approche révolutionnaire de problèmes séculaires a fait écho dans différents pays, mais aussi dans le monde entier. Les experts de diverses parties du monde, ont même parler de la nécessité de le prendre en compte. Ainsi German Gref, ancien ministre du Développement économique de la Russie, et économiste de renommée mondiale maintenant à la tête de l'une des plus grandes banques, a appelé le plan "l'un des meilleurs documents qu'il avait jamais vu", notant que, après la mise en œuvre de seulement 50 étapes, le Kazakhstan est déjà devenu un Etat fondamentalement différent.

Il faut admettre que le Kazakhstan est en fait aujourd'hui, un état très différent. Pas du fait qu'il n'ait qu'un quart de siècle ou qu'il soit au tout début de sa trajectoire indépendante. Le Kazakhstan vit déjà dans un nouvel avenir, selon les paroles de son président. C'est dans ce nouvel avenir, que le monde doit entrer. Le projet «nouvel avenir», qui consiste à assurer la sécurité nucléaire, de l'énergie, de l'eau et de l'approvisionnement alimentaire, tout cela étant est déjà mis en place dans le grand territoire du Kazakhstan qui espère maintenant les efforts conjoints de collègues d'autres pays afin de l'étendre à l'échelle de la planète, ce qui montre le Kazakhstan comme un exemple de la mise en œuvre réussie de ces réformes. Ce pays se développe à un rythme record, même dans les périodes où l'environnement extérieur n'est pas propice à cela. Aujourd'hui parmi les pays de la CEI, cette république est en tête au niveau de la prospérité de la compétitivité et de l'environnement des affaires. Cela peut être jugé par la manière dont Astana, année après année, monte plus haut dans les classements mondiaux.

Ayant atteint ces résultats, les autorités kazakhstanaises ne prévoient pas de se reposer sur ses lauriers et s'efforcera d'atteindre de nouveaux sommets. Le Kazakhstan a l'objectif ambitieux d'entrer dans les trente pays les plus développés dans le monde d'ici 2050. Et en regardant comment le Kazakhstan se développe aujourd'hui, sous la direction éclairée et très clairvoyante de son leader, il ne fait aucun doute que le pays s'est donné les moyens atteindre son objectif.

lundi 16 novembre 2015

Daech, l'Asie et nous

Alors que le sang a séché sur les trottoirs de Paris, et que la France toujours groggy s’est recueillie en une longue minute de silence, c’est le moment de prendre un peu de hauteur. Pas d’apporter des réponses, car c’est à la justice et au gouvernement français de le faire.

Si avec Asialyst, nous avons choisi de parler de l’Asie, ce vaste espace que nous jugeons « oublié » des médias, c’est que ce continent est aux prises avec les mêmes démons que nous. Les mêmes peurs et les mêmes espoirs. Sitôt connues les premières attaques de vendredi, nombre de voix pleines de sommeil en Asie nous ont immédiatement contactés, s’enquérant de notre sécurité à Paris, de notre santé, de la situation de nos proches.

Oui, le monde est un village interconnecté. Alors – et c’était recherché par Daech -, la terreur qui a frappé la capitale française a eu un retentissement mondial. La vague de soutien qui a accompagné l’onde de choc ne s’est pas seulement traduite dans les échanges officiels entre Etats. Des rassemblements citoyens ont eu lieu à travers le monde entier : de Pékin à Tokyo, de Montréal à New York, de Beyrouth à Sydney, en passant par la station spatiale internationale… Rarement la Marseillaise aura été ainsi chantée et les couleurs du drapeau français autant exposées.

Alors oui, parler de l’Asie après les attentats de ce vendredi est important. Important car les Asiatiques ont connu leur lot de catastrophes, de drames, d’extrême violence. Après les attaques de vendredi, comment ne pas penser aux attentats de Bangkok en août 2015, de Bombay en juillet 2011 ou encore de Kunming en Chine en mars 2014 ? Et nous en passons tant d’autres. Car l’Asie est elle aussi en première ligne dans la lutte contre Daech, cette pieuvre tentaculaire qui se nourrit de l’ignorance et des peurs.

C’est ainsi que les questions s’accumulent comme en Europe. Daech est-il en pleine expansion en Asie du Sud-Est ? Est-il à l’oeuvre en Asie du Sud ? Les Chinois seront-ils touchés via la problématique ouïghoure ?

Pour commencer, la sécurité du sommet de l’APEC à Manille qui s’ouvre ce lundi 16 novembre, est bien sûr en question. Les autorités philippines ont assuré aujourd’hui qu’aucune menace ne pesait sur le sommet annuel qui réunit l’ensemble des leaders des pays d’Asie, d’Océanie et des Amériques. Barack Obama doit arriver ce mardi à Manille où il rencontrera d’abord le nouveau Premier ministre australien Malcolm Turnbull ; et même avant les attaques de vendredi à Paris, la question de l’Etat Islamique était dans l’agenda des discussions. L’Australie est un allié solide de Washington dans la lutte contre le terrorisme, et pourrait donc avoir un rôle à jouer si Daech étendait ses opérations de terreur à l’Asie, et en particulier à l’Asie du Sud-Est.

C’est une réalité : l’avancée asiatique de la pieuvre est en marche. Ce lundi, le ministre malaisien de la Défense a annoncé que l’Etat Islamique (EI) visait désormais expressément le gouvernement de Kuala Lumpur : « Je peux confirmer que l’EI cible nos leaders politiques, dont moi ; mais cela ne nous fait pas peur et n’arrêtera pas notre lutte contre le terrorisme, non seulement dans notre pays, mais dans l’ensemble de la région », a prévenu Datuk Seri Hishammuddin qui a précisé que le gouvernement était au courant depuis mars dernier.

Naissance d’un réseau de Daech en Asie du Sud-Est

Il y a pire dans les déclarations officielles. Le Straits Times a révélé ce dimanche que des militants islamiques Malaisiens clandestins aux Philippines projetaient de former un groupe affilié à l’Etat Islamique en Asie du Sud-Est. Un groupe qui rassemblerait des Malaisiens, des Philippins et des Indonésiens.

Qui sont ces militants clandestins ? On en apprend plus sur leurs trajectoires via le parcours de l’un d’eux : Mahmud Ahmad. C’est un ancien maître de conférence à l’Université Malaya. Dans les années 1990, il est passé par des camps d’entraînement d’Al-Qaïda en Afghanistan. Par la suite, il aurait utilisé largement sa position de maître de conférence pour recruter des étudiants pour le djihad. Aujourd’hui, il est aidé de plusieurs camarades dont un commerçant marchand de couleurs, Mohd Najib Husen, et un ancien employé municipal, Muhammad Joraimee Awang Raimee. Pour constituer cette faction de Daech en Asie du Sud-Est, ils comptent unifier au moins 5 groupes dont les tristement célèbres Jemaah Islamiah en Indonésie, Abou Sayyaf aux Philippines, mais aussi les groupes Malaisiens Kumpulan Mujahidin Malaysia et Darul Islam Sabah.

La participation de ressortissants d’Asie du Sud-Est au djihad ne date pas d’hier. Joseph Chinyong Liow le rappelle fort justement dans Foreign Affairs. Déjà dans les années 1980, avant la génération de Mahmud Ahmad, un grand nombre de jeunes musulmans de la région étaient partis au Pakistan soutenir la lutte des Mujahidin afghans contre l’envahisseur soviétique. Nombre d’entre eux étaient restés, devenus amis avec les combattants des autres pays, et ainsi largement exposés à l’idéologie d’Al-Qaïda. Ceux qui sont revenus ont par exemple formé le groupe extrémiste Jemaah Islamiyah, relié à l’organisation créée par Ben Laden. Le groupe indonésien a ensuite commis les attaques parmi les plus meurtrières dans la région ces 15 dernières années.

Lorsque Daech a connu sa première expansion, il n’a pas fait l’unanimité parmi les extrêmistes d’Asie, dont certains ont condamné publiquement ses atrocités. Mais aujourd’hui, Mahmud Ahmad et son groupe veulent changer la donne en unifiant toute la mouvance musulmane radicale autour du « Califat ».

Les motivations d’Ahmad et ses troupes asiatiques ? Elles seraient plus économiques et sociales que religieuses, selon le criminologue malaisien P. Sundramoorthy, cité par le Straits Times. Beaucoup de radicaux pensent que l’EI est le grand défenseur de l’Islam, analyse l’expert, mais leur engagement est lié à l’injustice sociale, aux inégalités économiques ou à la répression politique. Le malheur vient que la religion et l’obscurantisme sont devenus le véhicule de toutes les frustrations. A ce titre, les militants autour de Mahmud Ahmad utiliseraient le drapeau de l’EI pour obtenir de l’argent et du soutien de l’étranger.

L’EI en Asie du Sud

Il faut aller au-delà de l’Asie du Sud-Est, qui n’est pas la seule concernée. En Asie du Sud, un pays rarement évoqué pourrait être le prochain foyer de l’État Islamique sur le continent : le Bangladesh. Sur le site American Thinker, Richard L. Benkin rappelle qu’après l’intervention alliée en Afghanistan, le Bangladesh est devenu un refuge pour de nombreux combattants d’Al-Qaïda, qui ont eu une influence déterminante sur les élections locales de 2007. Depuis, le gouvernement de Dacca s’est lui-même composé d’islamistes. Des bloggeurs ont été brutalement assassinés sous l’accusation de blasphème, et leurs assassins ont échappé à des condamnations sérieuses. Pour la même raison, des journalistes et des écrivains ont été persécutés en toute impunité, tout comme de nombreux Bangladais hindous. Depuis le mois de septembre, un nouveau cap a été franchi. Une série d’attaques contre les étrangers, les chiites et la police bangladaise ont été revendiquées directement par l’État Islamique.

De Kunming à Dacca, une lame de fond est apparue : l’État Islamique cherche désormais une profondeur stratégique en Asie pour assurer sa force de frappe globale. Et de multiplier les foyers de violence extrême et de recrutement de combattants. Il nous faut parler maintenant de l’Asie centrale : nous republions aujourd’hui l’enquête édifiante de Sylvie Lasserre au Kirghizistan, où sont passés 80 % des terroristes français.

Joris Zylberman et Antoine Richard sur https://asialyst.com le 16/11/2015

vendredi 13 novembre 2015

L’Arabie saoudite a bien enlevé des collaborateurs de l’ayatollah Khamenei

La bousculade survenue à Mina (5 kilomètres de La Mecque) le 24 septembre 2015 était en réalité une opération secrète arabo-israélienne au cours de laquelle des collaborateurs de l'imam Ali Khamenei ont été enlevés par les services secrets saoudiens et israéliens.

Si l'Arabie saoudite a reconnu 769 morts, le décompte de l'AFP totalisant les victimes reconnues par les divers États touchés s'élève à 2 236 morts.

L'Arabie saoudite a refusé de publier les enregistrements des vidéos de surveillance relative à cette bousculade.

Il semble extraordinaire qu'une bousculade ait pu provoquer un tel nombre de victimes. Et encore plus extraordinaire que tous les témoins soient morts sans que l'on sache qui les avait écrasés.

La surveillance du pèlerinage avait été confiée à plus de 100 000 policiers. Cependant depuis 2013, la multinationale G4S, très liée aux services de sécurité et d'espionnage israéliens, était chargée de cette portion du pèlerinage.

De très loin le plus touché, l'Iran a perdu 464 pèlerins, dont la totalité d'une forte délégation de collaborateurs du Guide de la Révolution, l'ayatollah Ali Khamenei, et tous leurs gardes du corps.

Le 28 septembre, le président iranien cheikh Hassan Rohani avait ouvert son discours à l'Assemblée générale de l'Onu en mettant en cause la responsabilité politique de l'Arabie saoudite dans ce qui était présenté alors comme un accident.

Le 3 octobre, Thierry Meyssan révélait sur les ondes iraniennes le possible enlèvement des collaborateurs du Guide de la Révolution. Par la suite, plusieurs journaux iraniens exploraient cette piste.

Les médias sociaux ont diffusé des photographies de tractopelles entassant les cadavres. En définitive, l'Arabie saoudite n'a toujours pas restitué 15 corps des victimes iraniennes. Les autopsies réalisées sur certains cadavres ne permettent pas de savoir s'ils sont morts dans la bousculade ou sous la torture.

Le 11 novembre, la République islamique d'Iran a déclaré avoir des informations sûres selon lesquelles l'ambassadeur Ghadanfar Rokon Abadi (photo) ne serait pas mort, mais serait détenu, et a exigé sa libération immédiate.

Ghadanfar Rokon Abadi avait été ambassadeur d'Iran à Beyrouth, de 2011 à 2014, où il avait habilement joué avec la classe dirigeante libanaise hautement corrompue. Il avait développé les relations entre la République islamique et le Hezbollah et leur implication aux côtés de la République arabe syrienne face aux jihadistes mobilisés par la France, l'Arabie saoudite et la Turquie. Il était, au moment de sa disparition, l'un des principaux conseillers du Guide de la Révolution.

Sur www.voltairenet.org le 13/11/2015

Poutine: 90% des investissements en Russie proviennent d'Asie

Environ 90% des investissements attirés en Russie durant cette année proviennent d'Asie, a déclaré le président russe Vladimir Poutine dans un entretien en Turquie.

"Bien entendu, dans la conjoncture actuelle, la coopération avec nos partenaires asiatiques pour attirer des ressources financières devient particulièrement d'actualité. Environ 90% des investissements en Russie durant cette année proviennent du marché asiatique", a déclaré Vladimir Poutine.

Le président russe a rappelé que pour le moment plusieurs entreprises russes avaient ouvert des crédits avec succès en Chine. Dans le même temps, la Chine étudie la possibilité d'instaurer des emprunts d'Etat. Des mécanismes d'investissements internationaux sont déjà formés, il s'agit de la Banque de développement des BRICS et la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures (BAII) avec des actifs de 100 milliards de dollars chacun.

"Pour attirer des investissements étrangers dans un secteur réel de l'économie russe, des fonds conjoints d'investissements sont constitués avec la Chine, l'Inde, la Corée du Sud, les pays du golfe Persique", a fait remarquer le président russe.

D'après lui, la Russie perfectionne la fiscalité des revenus de financement des projets en Russie afin de renforcer la coopération avec les pays asiatiques et propose également des initiatives perspicaces.

"Nos programmes de développement de la Sibérie et de l'Extrême Orient russe, présentés notamment lors du Forum économique oriental à Vladivostok en septembre 2015, offrent de nombreuses opportunités de coopération. Entre autres, la création de territoires de développement précoce et du port libre Vladivostok avec des régimes fiscaux et administratifs privilégiés, la modernisation du Transsibérien et de la Magistrale Baïkal-Amour, le lancement de la route maritime du nord et la construction du gazoduc Force de Sibérie", a souligné Vladimir Poutine.

Sur http://fr.sputniknews.com le 13/11/2015

mardi 10 novembre 2015

Asie-Pacifique : contre le TPP, la Chine relance son projet de zone de libre-échange (FTAAP)


Alors qu'elle a été tenue à l'écart du projet de partenariat transpacifique (TPP) signé par les Etats-Unis et 12 autres pays, la Chine relance son projet concurrent de zone de libre-échange de l'Asie-Pacifique (FTAAP), laquelle pourrait devenir la plus importante du monde.

La Chine va relancer son propre projet d'accord de libre-échange en Asie-Pacifique lors d'un sommet régional la semaine prochaine, a annoncé Pékin mardi, quelques semaines après la conclusion d'un traité rival initié par les Etats-Unis et qui exclut le géant asiatique.

Pékin avait assuré l'an passé la promotion de la Zone de libre-échange de l'Asie-Pacifique (FTAAP) lors du sommet 2014 de l'Apec (Forum de la Coopération économique de l'Asie-Pacifique) organisé dans la capitale chinoise. Les participants avaient promis d'étudier le projet, perçu comme un potentiel rival au Partenariat trans-Pacifique (TPP) - lequel, soutenu par Washington, inclut les principales économies régionales, mais exclut la Chine.

Peu d'annonces ont été faites depuis l'an passé sur la FTAAP, tandis que le texte de l'accord du TPP a été publié jeudi, un document salué comme un signe de transparence -mais qui n'a pas mis fin aux récriminations de ses détracteurs, lesquels dénoncent un traité façonné pour les multinationales.

Le TPP sera la plus grande zone de libre-échange du monde, une tentative de briser les barrières du commerce et de l'investissement entre 12 pays qui représentent environ 40% de l'économie mondiale.

Les conclusions d'une étude

Pékin a déclaré que les conclusions d'une étude sur la FTAAP seront présentées la semaine prochaine lors d'un sommet de l'Apec à Manille, aux Philippines, auquel assistera le président chinois Xi Jinping.
"Nous devons travailler activement à la création de la FTAAP", a déclaré Wang Shouwen, le vice-ministre chinois du Commerce, lors d'une conférence de presse, ajoutant que la FTAAP serait un "facilitateur pour l'intégration régionale dans l'Apec"..

La FTAAP, si elle devient réalité, permettrait la création de la plus grande zone de libre-échange du monde, surpassant le TPP et les autres structures régionales.

Les 21 membres de l'Apec produisent plus de 50% de la richesse de la planète et génèrent près de la moitié des échanges commerciaux internationaux.

Bien que réunissant quelques-uns des plus importants dirigeants de la planète, le sommet annuel de l'Apec est davantage connu pour sa traditionnelle photo de famille, où les dirigeants revêtent le costume traditionnel du pays hôte, que pour l'importance de ses accords.

Mais la Chine reste confiante quant au fait d'aboutir à une feuille de route pour la création d'un cadre à la FTAAP, a assuré M. Wang.
"Notre objectif est d'achever l'étude stratégique l'an prochain et de présenter des suggestions et des recommandations exploitables aux dirigeants lors du sommet de l'année prochaine", a-t-il déclaré, ajoutant qu'un rapport intermédiaire sera également dévoilé lors du sommet de Manille.
La Chine conçoit la FTAAP, proposée pour la première fois à l'Apec en 2006, comme un contrepoids au TPP, que Washington inscrit dans le "rééquilibrage" vers l'Asie de sa politique.

Les Etats-Unis assurent qu'une participation chinoise au TPP est possible, tout en tenant la deuxième économie mondiale à l'écart des négociations.

Sur www.latribune.fr le 10/11/2015

samedi 7 novembre 2015

Rencontre historique entre présidents chinois et taïwanais


Les dirigeants des deux Etats ne s'étaient jamais rencontré depuis la création de Taïwan, en 1949.
Une rencontre au sommet. Les présidents chinois et taïwanais ont échangé une poignée de main historique samedi à Singapour au début d'un sommet qui est une première depuis la séparation de la Chine continentale et de Taïwan il y a 66 ans, après une guerre civile. 
Le chef d'Etat chinois Xi Jingping et le Taïwanais Ma Ying-jeou se sont serré la main et ont souri en saluant une assemblée de médias dans une salle archi-comble d'un hôtel de Singapour, avant de se retirer pour des pourparlers inédits. « Nous sommes une famille », a déclaré le président chinois. En réponse, Ma Ying-jeou s'était dit déterminé à promouvoir la paix et la stabilité de part et d'autre du détroit de Taïwan, ajoutant que la relation entre les deux entités devait être basée sur la sincérité, la sagesse et la patience.

Ma Ying-jeou a évoqué après l'entretien une discussion « positive et franche » qui lui laisse espérer que Pékin peut utiliser des moyens pacifiques, et non la force, pour résoudre ses différents avec Taïwan. Il a ajouté lors d'une conférence de presse que son homologue chinois lui avait assuré que le déploiement de missiles en Chine ne visaient en aucun cas Taïwan, que Pékin considère comme une province chinoise.

Des relations moins tendues depuis 2008

Après des décennies de méfiance, les deux rives du détroit de Taïwan restent fortement militarisées. Mais depuis l'arrivée au pouvoir en 2008 de Ma Ying-jeou, un prochinois, le climat politique s'est réchauffé et les relations sino-taïwanaises atteignent un point culminant avec la réunion de samedi, événement encore impensable il y a peu.

Cette rencontre est une « avancée historique », qui « peut créer de nouveaux espaces pour les relations » entre le continent et Taïwan, a estimé samedi le journal chinois Global Times, proche du pouvoir, dans un éditorial. Les deux nations ont cependant de profondes sensibilités politiques qui pèsent sur les relations. La Chine considère Taïwan comme une partie de son territoire qui doit être réunifiée, par la force si nécessaire. Taïwan s'est de son côté forgé une identité propre depuis la proclamation par Mao Tsé-toung de la République populaire de Chine (RPC) il y a 66 ans.

Une manifestation prévue à Taipei

Des protestataires se sont rassemblés à l'aéroport de Taipei, la capitale de Taïwan, avant le départ de Ma Ying-jeou samedi matin, brûlant des photos des deux dirigeants et scandant des slogans qualifiant le président chinois Xi Jinping de « dictateur » et Ma Ying-jeou de « traître », des actions entraînant l'arrestation de 27 personnes.

Des manifestants prévoyaient également de se réunir samedi après-midi durant le sommet près du palais présidentiel de Taipei. Dans la nuit de vendredi à samedi, une centaine de manifestants brandissant des pancartes où était écrit « Indépendance de Taïwan » ont également tenté de prendre d'assaut le parlement de Taipei.

Aucun accord ni déclaration commune

Ma Ying-jeou a également indiqué qu'aucun accord ne serait signé et qu'il n'y aurait pas de déclaration commune, afin d'apaiser les tensions à Taïwan, une société polarisée sur l'attitude à adopter face à l'influence grandissante de Pékin.

Les analystes s'accordent sur le fait qu'il serait difficile pour les deux parties d'effectuer des annonces spectaculaires. Cette rencontre pourrait toutefois permettre à Taïwan de gagner en influence sur la scène internationale où il est marginalisé dans l'ombre de Pékin. Taïwan a perdu son siège au Nations unies en 1971 au profit de la Chine, et seuls 22 pays reconnaissent formellement l'île, ce qui provoque un important ressentiment parmi les Taïwanais. Ma Ying Jeou a indiqué qu'il soulèverait ce point lors de la rencontre, dans l'espoir d'un « plus grand espace international » pour Taïwan.

Mais sur l'île, l'opposition l'accuse de vouloir à travers ce sommet favoriser son parti, le KMT, donné perdant à la présidentielle de janvier. En dépit de l'amélioration des relations entre Pékin et Taipei, la Chine avait décliné les tentatives répétées d'un tête-à-tête avec Xi Jingping. De nombreux observateurs s'interrogent sur les raisons qui, cette fois, ont poussé les autorités du continent à l'accepter.

Sur www.lesechos.fr le 07/11/2015

jeudi 5 novembre 2015

Le jeu obscur de la Turquie avec l'EI

La Turquie enterre ses victimes des attentats terroristes. Les autorités sont accusées de saper le Parti Kurde des travailleurs et les experts disent que c'est l'œuvre de militants de l'Etat islamique, qui pendant un temps considérable a été soutenu par Ankara. Certains observateurs n'excluent pas que l'attaque est l'œuvre des autorités turques, qui a attisé les sentiments anti-kurdes.

Le 10 octobre il y a eu  deux explosions sous un viaduc près de la gare de chemin de fer d'Ankara. Plusieurs personnes ont été tuées et environ 200 ont été blessées. Les victimes étaient membres de la manifestation anti-guerre, "travail, paix, démocratie", qui a rassemblé dans les rues des syndicats et des partis d'opposition de gauche, dont le Parti démocratique populaire pro-kurde.

Les média locaux ont immédiatement accusé les forces d'opposition des Kurdes locaux, ainsi que les militants de l'Etat islamique. Cet évènement intervient après avoir expliqué à la communauté internationale la nécessité d'un renforcement de la présence militaire d'Ankara dans les territoires des Etats en guerre en Irak et en Syrie.

Cependant, la présence militaire turque dans ces territoires ne signifie véritablement une lutte contre l'Etat islamique (EI). C'est plutôt une tentative pour résoudre ses problèmes intérieurs et détruire physiquement "le problème kurde", y compris en soutenant les forces de l'EI.

Ce n'est plus un secret que les autorités turques ont transformé leur pays en une «base arrière» pour les terroristes de l'ensemble de la région eurasienne. A Istanbul, il est légal de faire coexister les dirigeants du mouvement extrémiste islamique d'Ouzbékistan (il est de notoriété commune que le MIO bénéficie de l'appui financier turque), des représentants des talibans ainsi que des militants de l'état islamique. Par ailleurs, cet été un scandale a éclaté en Turquie, lors de la publication de photos sur Facebook montrant des militants de l'EI se reposant dans les stations balnéaires de la mer Noire en Turquie, à Bartin et Amasra. Plus tôt, le même tireur avait été vu, posant avec en toile de fond des soldats syriens décapités, et publiant des appels vidéo afin de tuer les "infidèles", en particulier les occidentaux.

Il est reconnu depuis longtemps que la Turquie fournit un soutien logistique et financier à presque tous les groupes d'opposition en Syrie, y compris l'Etat islamique. Il permet notamment l'utilisation de son territoire pour se regrouper après les opérations militaires. En outre, l'EI contrôlant des centaines de kilomètres de la frontière turque, il a été mis en place des flux de trafic dans les deux sens, des produits pétroliers aux armes et surtout de la chair à canon souhaitant prendre une part active à la construction du califat. La frontière à une existence juridique, mais pas dans les faits, car elle est en réalité un écran de fumée qui relie directement les terroristes hommes d'affaires et les représentants officiels d'Ankara.

Par conséquent, les autorités turques ne prêtent pas attention à l'idéologie radicale et aux méthodes brutales employées "pour atteindre les objectifs" de ces bandes, préférant "faire leurs business criminel tranquillement."

Les experts estiment que le principal objectif «politique» d'Ankara dans les relations entre les groupes du Moyen-Orient n'est pas tant le renversement du gouvernement d'Assad, tel que revendiqué par tous les alliés politiques de la Turquie (États-Unis et l'UE), mais l'arrêt de la croissance de la puissance militaire des forces kurdes sur les territoires d'Irak et de Syrie.

Le "problème kurde" est un "mal de tête" de longue date pour Ankara. Le chef du PKK, Abdullah Odjalan a été condamné en Turquie à la réclusion à perpétuité, en particulier pour une action militaire contre la Turquie sous l'étendart d'un Kurdistan indépendant. 16 ans après sa condamnation, le Parti démocratique du peuple kurde (PDP) a remporté les élections dans plusieurs provinces du pays, faisant une concurrence importante au parti au pouvoir d'Erdogan. Tous clament le même slogan, une autonomie avec une perspective de souveraineté.

Mais pendant que les Kurdes de Turquie tentent de résoudre leurs problèmes pacifiquement, ailleurs, notamment en Irak, leurs forces combattantes acquièrent une expérience très réelle et également très réussie. Cela a été démontré dans les premiers affrontements avec les militants de l'EI. Des troupes kurdes ont libéré la frontière irako-turque qui était tenue par l'EI. Ceci a significativement effrayé Ankara, et incité les autorités turques à s'engager dans une prétendue "coalition militaire contre l'EI", pour en fin de compte, commencer à bombarder les Kurdes.

En fait, le président turc Tayyip Erdogan ne cache pas que son pays craint les intentions des Kurdes d'établir leur propre Etat dans certains territoires de la Turquie d'aujourd'hui, d'Irak et de Syrie. De plus, il admet que le bombardement des positions kurdes par les turc, puis par l'OTAN est "un coup d'avance".

En fait, sur le fond de cette politique, certains observateurs ont commencé à parler de la "piste Erdogan" même dans l'attaque terroriste de juillet dans la ville de Suruç, qui a tué des socialistes et communistes turcs et kurdes, prêts à se rendre à la ville syrienne de Cobán pour aider la milice kurde dans sa lutte contre les militants de l'EI.

Il n'est pas exclu que la nouvelle et déjà plus grande attaque terroriste à Ankara, qui a tué des partisans afin de mettre fin au conflit entre le Parti des travailleurs du Kurdistan interdit en Turquie et les autorités du pays, ait été commandité par l'Etat. Le fait est que presque immédiatement après les explosions, le Premier ministre de la Turquie, Ahmet Davutoglu, a déclaré que l'attaque pourrait être orchestrée par l'Etat islamique, le Parti des travailleurs du Kurdistan, et deux groupuscules d'extrême gauche, le Parti populaire de libération révolutionnaire et le parti communiste, marxiste-léniniste.

Alors que la température anti-kurde se réchauffe à l'intérieur du pays, et que les forces de l'OTAN frappe les camps de la milice kurde en Syrie et en Irak, Ankara entretient l'espoir que malgré tout, l'Etat islamique sera toujours en mesure de garder sous contrôle la menace kurde venue de l'extérieur.

Cependant, l'intervention dans le conflit syrien des forces armées russes, va pratiquement priver Ankara de son influence sur le Parti des travailleurs du Kurdistan.

C'est peut-être la raison pour laquelle la Turquie, après les États-Unis, son «parrain politique», apparaît comme un adversaire principal des opérations russes au Moyen-Orient.

En outre, la Turquie est même prête à sacrifier ses intérêts économiques et son amitié avec la Russie. Après quelques incidents de vols des avions russes dans l'espace aérien turc, le président de la Turquie a même essayé de faire chanter Moscou avec une intention d'abandonner le gaz naturel en provenance de Russie. Pour commencer, il a même réduit par deux fois la capacité du gazoduc russe "Turkish Stream", pour atteindre 32 milliards de mètres cubes.

Dans sa tentative pour tirer les marrons du feu avec les mains de quelqu'un d'autre, Ankara ne semble pas penser aux conséquences. Après tout, les attaques terroristes de ces derniers mois ont peut être véritablement été organisées par les militants de l'Etat islamique, qui est devenu insatisfait du déclin  du «soutien» turc de leurs intérêts.

lundi 2 novembre 2015

Vers un renversement de situation au Proche-Orient

La période du « Printemps arabe » touche à sa fin. Désormais, la Maison-Blanche et le Kremlin sont en train de redessiner les contours du « Moyen-Orient élargi ». Cependant, leur accord conclu avant l’intervention militaire russe en Syrie pourrait être modifié par le changement de l’équilibre des forces. Rien ne prouve que Moscou acceptera la stabilisation de la Syrie et fermera les yeux sur la partition de la Turquie et de l’Arabie saoudite qui vont commencer. Quoi qu’il en soit, le bouleversement qui s’annonce modifie la donne établie depuis cinq ans. La plupart des puissances impliquées essayent donc de retourner leur veste avant les autres.

La presse, dans quelque pays que ce soit, est tellement occupée à scruter la position de son propre État dans le conflit du Proche-Orient qu’elle ignore les négociations globales entre la Maison-Blanche et le Kremlin et, du coup, interprète de travers les événements secondaires. Pour clarifier l’agitation diplomatique actuelle, nous devons donc revenir à l’accord USA-Russie de septembre dernier.

La partie publique de cet accord a été formulée par la Russie dans un document distribué le 29 septembre au Conseil de sécurité de l’Onu. Il indique que, pour rétablir la paix et la stabilité en Afrique du Nord et au Proche-Orient, il faut et il suffit (1) d’appliquer les résolutions du Conseil de sécurité —ce qui implique notamment le retrait d’Israël sur ses frontières de 1967— et (2) de lutter contre l’idéologie terroriste —c’est-à-dire à la fois contre les Frères musulmans créés par le Royaume-Uni et soutenus par la Turquie, et contre le wahhabisme propagé par l’Arabie saoudite—.

Il avait été initialement prévu que la Russie fasse adopter une résolution en ce sens lors de la réunion du 30 septembre du Conseil de sécurité. Cependant, les États-Unis s’y sont opposés dans l’heure précédente. Sergey Lavrov a alors présidé la séance sans évoquer son projet. Cet événement majeur ne peut s’interpréter que comme un désaccord tactique qui ne doit pas entraver un accord stratégique.

Le 20 octobre, le président Vladimir Poutine recevait au Kremlin son homologue syrien, Bachar el-Assad, en présence de ses ministres de la Défense et des Affaires étrangères, du secrétaire général du Conseil russe de sécurité nationale et du chef des services secrets. L’entretien portait sur l’application du plan russo-états-unien, incluant celle du Communiqué de Genève du 30 juin 2012. Le président el-Assad faisait valoir qu’il suit les instructions de ce Communiqué et, notamment, qu’il a intégré dans son gouvernement les partis d’opposition qui en ont fait la demande conformément à la description que le Communiqué fait d’un Organe gouvernemental de transition.

S’étant assuré que les deux pays avaient une même lecture du Communiqué de Genève, la Russie et les États-Unis décidèrent de mettre au pas les États dissidents, à savoir la France, la Turquie et l’Arabie saoudite. Sachant que la position française n’est pas fondée sur des intérêts réalistes, mais s’explique exclusivement par un fantasme colonial et par la corruption de son gouvernement par l’argent turc et saoudien, la Maison-Blanche et le Kremlin décidèrent de traiter uniquement la source du problème, à savoir Ankara et Riyad. Le 23 octobre, John Kerry et Sergey Lavrov reçurent donc leurs homologues turc et saoudien à Vienne. Aucun texte final n’a été publié. Cependant, il semble que la Russie ait menacé les deux invités sans que les États-Unis ne prennent leur défense.

Affolé d’une possible entente russo-états-unienne contre la Turquie et l’Arabie saoudite, la France convoqua alors un « dîner de travail », et non un « sommet diplomatique », à Paris. L’Allemagne, l’Arabie Saoudite, les Émirats Arabes Unis, les États-Unis, l’Italie, la Jordanie, le Qatar, le Royaume-Uni et la Turquie « évoquèrent » et non « décidèrent » le sort de la Syrie. Le format de cette réunion correspond à celui du « Core Group » des « Amis de la Syrie », sauf l’Égypte qui a déjà secrètement rejoint le camp de la Syrie. Le fait d’avoir été contraint d’inviter les États-Unis a plombé la réunion. Là encore, pas de texte final.

Enfin, le 30 octobre, les États-Unis et la Russie réunissaient un plus vaste aréopage comprenant tous les participants aux deux réunions précédentes plus l’Égypte, la Chine, l’Irak, l’Iran, le Liban, Oman, l’Union européenne et les Nations unies. Si la presse s’est esbaudie de la présence de l’Iran qui avait été tenu à l’écart de tout règlement depuis le début du conflit, elle n’a pas relevé le retour de l’Égypte du maréchal al-Sissi qui rentre sur la scène internationale grâce à la découverte de ses nouvelles réserves de pétrole, ni de l’absence persistante de la principale puissance régionale, Israël. Ce dernier point ne peut s’expliquer que dans le cas où l’État hébreu avait obtenu préalablement la garantie de parvenir à un de ses objectifs de guerre, la création d’un État colonial au Nord de la Syrie.

Les participants ont tous été priés de signer une déclaration finale que seuls les Russes et les Iraniens ont prit soin de diffuser. Et pour cause : elle marque la défaite des faucons US. En effet, dans son point 8, il est indiqué que le « processus politique » —et non pas le « processus de transition »— sera conduit par les Syriens, propriété des Syriens, et que le Peuple syrien décidera du futur de la Syrie. Cette formulation lourde invalide le document Feltman qui constitue l’objectif depuis plus de trois ans des faucons US, des Français, des Turcs et des Saoudiens : la capitulation totale et inconditionnelle de la République arabe syrienne.

Le projet US se poursuit malgré l’accord avec la Russie

La suite des événements devrait donc logiquement être la mise au pas de la Turquie, de l’Arabie saoudite et de la France, ce qui pourrait être fait tout en poursuivant les objectifs initiaux US.

Pour la Turquie, après le scrutin probablement truqué du 1er novembre et la victoire de l’AKP, la guerre civile devrait s’étendre et se développer jusqu’à la partition du pays en deux, puis à la fusion du Kurdistan turc, du Kurdistan irakien et d’un territoire arabe syrien occupé par les Kurdes syriens et les États-Unis. D’ores et déjà, le YPG et les États-Unis conquièrent ensemble un territoire arabe au Nord de la Syrie. Le YPG qui, jusqu’au mois dernier, recevait ses armes et ses soldes de Damas, s’est retourné contre la République arabe syrienne. Ses miliciens envahissent les villages conquis, expulsent les enseignants et décrètent la kurdisation forcée des écoles. Le Kurde, qui était parlé et enseigné à l’école, devient la langue unique et obligatoire. Les milices de la République arabe syrienne, notamment les Assyriens, en sont réduites à défendre leurs écoles par les armes contre leurs compatriotes kurdes.

De son côté le roi Salman d’Arabie saoudite doit encaisser sa défaite au Yémen ; un voisin qu’il avait envahi officiellement pour soutenir un président en fuite, en réalité pour exploiter avec Israël le pétrole du « Quart vide ». Coup sur coup, les Émirats arabes unis et l’Égypte se sont retirés de sa Coalition. Les premiers après avoir essuyé de lourdes pertes parmi leurs officiers, les seconds plus discrètement, laissant les opérations militaires aux seules mains des Israéliens. Les Houthis, poussés vers le Nord par les bombardements, ont effectué plusieurs incursions en Arabie saoudite et y ont détruit des bases militaires aériennes et leurs matériels. Les soldats saoudiens, presque tous des étrangers servant sous écusson saoudien, ont déserté en masse contraignant le roi à prendre un décret contre les abandons de poste. Pour éviter un désastre militaire, l’Arabie saoudite a alors sollicité de nouveaux alliés. Contre de l’argent sonnant et trébuchant, le Sénégal a envoyé 6 000 hommes et le Soudan 2 000. La Mauritanie hésite à envoyer un contingent. Le roi, dit-on, aurait également sollicité l’armée privée Academi (ex-Blackwter/Xe) qui recruterait actuellement des mercenaires en Colombie. Ce fiasco est directement imputable au prince Mohammed ben Salmane, qui a revendiqué l’initiative de cette guerre. Ainsi, il affaiblit l’autorité de son père, le roi Salman, et fait gronder la contestation des deux clans exclus du pouvoir, ceux de l’ancien roi Abdallah et du prince Bandar. Logiquement ce conflit devrait aboutir à un partage de leur héritage entre les trois clans et donc à un partage du royaume en trois États.

Ce n’est qu’après ces nouveaux conflits que la paix devrait revenir dans la région, sauf dans la partie arabe colonisée par le nouveau Kurdistan, appelée à devenir le nouveau point de fixation des antagonisme régionaux en lieu et place de la Palestine.

Mais même écrit, le futur est incertain. Le renversement du rapport de forces entre Washington et Moscou pourrait modifier leur accord.

Les rats quittent le navire

Alors que les mauvais joueurs annoncent sans sourciller que l’intervention militaire russe en Syrie n’apporte pas les résultats escomptés par Moscou, les jihadistes en fuite se replient en Irak et en Turquie. Le chef d’état-major US, le général Joseph Dunford, a admis, le 27 octobre lors d’une audition au Sénat, que désormais les armes parlaient en faveur de la République arabe syrienne. Tandis que le Commandeur suprême de l’Otan, le général Philip Breedlove, a déclaré, le 30 octobre lors d’une conférence de presse au Pentagone, que c’est une litote de dire que la situation évolue de jour en jour et menace désormais la sécurité de l’EuropeForce est de constater que l’alliance entre les partisans du chaos et ceux de la recolonisation va non seulement perdre en Syrie, mais que l’Alliance atlantique elle-même ne peut plus prétendre à la domination globale. Du coup, une soudaine agitation traverse les chancelleries, beaucoup affirmant qu’il est temps de parvenir à la paix —ce qui sous-entend qu’ils pensaient jusque là différemment—.

Les « retournements de veste » qui s’annoncent à propos de la Syrie auront comme première conséquence la consécration du rôle international de la République islamique d’Iran et de la Fédération de Russie ; deux acteurs que la presse occidentale présentait, il y a quatre mois encore, comme totalement isolés et voués à de terribles difficultés économiques ; deux puissances qui sont désormais les premières forces militaires, régionale pour l’Iran et globale pour la Russie ; et comme seconde conséquence le maintien au pouvoir du président el-Assad dont on annonce depuis cinq ans qu’« il doit partir ».

Dans ce contexte, la propagande de guerre continue imperturbablement, affirmant que si ce ne sont pas les bombardements russes qui tuent des civils, c’est l’armée syrienne qui les bombarde ; imputation confirmée par la matrice des organisations terroristes, les Frères musulmans, via leur Observatoire syrien des Droits de l’homme. Ou encore que la Russie est pressée de négocier car son intervention lui revient cher —comme si elle ne l’avait pas budgétisée durant sa longue préparation—. Jamais à court d’invention, le directeur de la CIA, John Brennan, prétend quant à lui que la Russie s’apprête à lâcher le président el-Assad, alors même que le président Poutine s’est gaussé de cette auto-persuasion quelques jours plus tôt, au Club de Valdai.

En France, la révolte gagne la classe politique. Les quatre principaux leaders de la droite, Dominique de Villepin, François Fillon, Alain Juppé et Nicolas Sarkozy ont chacun de leur côté déclaré qu’il est absurde de s’aliéner la Russie et de ne pas reconnaitre la défaite en Syrie. Cependant Alain Juppé, qui joua un rôle central dans le début de la guerre, notamment en signant un traité secret avec la Turquie, persiste à conserver l’objectif de renverser la République arabe syrienne, plus tard. À gauche, plusieurs leaders envisagent de prochains voyages à Damas.

La panique devant les changements prévisibles est en fait générale.. Si Nicolas Sarkozy s’est précipité chez le président Poutine, le vice-chancelier allemand, Sigmard Gabriel, également. Il a plaidé pour que l’on referme les contentieux et les aigreurs du passé et que l’on renoue le dialogue avec la Russie. Il était temps.

Par Thierry Meyssan sur www.voltairenet.org le 02/11/2015