New Delhi investit dans un port en Iran qui ouvre la voie vers l’Asie centrale. La diplomatie de Narendra Modi cible clairement la Chine.
Pour son deuxième anniversaire à la tête de l'Inde, Narendra Modi s'est, en quelque sorte, arrêté à New Delhi. Car le Premier ministre voyage beaucoup. A peine est-il rentré d'une visite historique en Iran qu'il s'apprête à repartir aux Etats-Unis, où il va effectuer son quatrième voyage depuis son élection. S'il a endossé à ce point son costume de grand voyageur, c'est certes pour faire davantage entendre la voix de l'Inde mais c'est tout autant pour ne pas laisser le champ libre à son voisin chinois. Narendra Modi comme le président chinois Xi Jinping sont au coude à coude en Asie du sud-est, en Afrique et au Moyen-Orient.
Le voyage en Iran que Narendra Modi vient d'effectuer en début de semaine est sur ce point tout à fait caractéristique. Parmi les douze accords que New Delhi a scellés avec Téhéran, un retient particulièrement l'attention, celui qui concerne l'investissement par l'Inde de 500 millions de dollars dans le port de Chabahar.
New Delhi est l'un des principaux importateurs de brut iranien et entend consolider ses approvisionnements. Selon l'Agence internationale de l'Energie, en 2040, la dépendance de l'Inde au pétrole importé atteindra 90 % de sa consommation totale. L'Iran, en plus de sa production de pétrole, détient les deuxièmes réserves mondiales de gaz après la Russie. Mais pas seulement. Chabahar est aussi un axe stratégique vers le Moyen Orient, l'Afghanistan ou l'Asie centrale.
Sino-scepticisme
Enfin, ce port se situe à quelques encablures (130 kilomètres) de Gwadar , port installé au Pakistan et développé par la Chine. Pékin s'offre ainsi un débouché dans l'océan indien. Moyennant un colossal investissement de 46 milliards de dollars, la Chine va créer d'ici à cinq ans un corridor économique à travers la province du Baloutchistan au Pakistan en partant de la frontière chinoise du Xinjiang jusqu'au port de Gwadar. L'ancien apôtre du non-alignement qui tenait les Etats-Unis à distance a depuis cette période considérablement revu sa position. A quelques jours de son voyage à Washington, Modi vient là encore s'assurer du soutien de Barack Obama.
« En ces temps de montée en flèche du sino-scepticisme à Delhi comme à Washington, ces deux capitales portant haut l'étendard de la démocratie trouvent réconfort dans l'affermissement de leurs rapports diplomatiques, politiques, commerciaux mais également de défense », écrit Olivier Guillard dans un document de l'IRIS.
Pour le Premier ministre indien, ces sujets diplomatiques sont à l'évidence moins préoccupants que les dossiers nationaux. Son parti le BjP vient certes de remporter quelques élections régionales. Mais il reste minoritaire au Sénat et en difficulté dans bien des Etats, ce qui freine les ardeurs réformatrices du Premier ministre.
Par Michel de Grandi sur www.lesechos.fr le 25/05/2016
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