mardi 17 octobre 2017

Faut-il prendre au sérieux la politique US contre l’Iran ?

 Le discours du président états-unien sur l'Iran a été précédé d'un point de presse au département d'État accusant le Hezbollah d'exporter le terrorisme dans le monde entier pour le compte de Téhéran. Joignant l'acte à la parole, une récompense a été offerte pour l'arrestation de deux de ses commandants. Mais —surprise !— pas un mot ni sur ses victoires face aux jihadistes, ni sur les 800 millions de dollars que le Guide Ali Khamenei vient d'offrir à la Résistance libanaise.
Puis, prenant la parole, le président Trump n'a pas manqué d'insulter autant que faire se peut l'héritage de l'imam Rouhollah Khomeini, les Gardiens de la Révolution et le Guide.
Il a relayé toutes sortes d'accusations anciennes dont ils ont pourtant été blanchis il y a longtemps et a jeté les bases pour les accuser d'animer la résurgence d'Al-Qaïda.
Avant même la fin de son discours, le pétrole était déjà en hausse de 85 cents le baril, le marché misant sur un arrêt des investissements pétroliers iraniens. Dans les heures qui suivirent, la totalité des États occidentaux et la Russie déplorèrent l'agressivité de Donald Trump, tandis qu'Israël et l'Arabie saoudite l'applaudissaient.
Or, les seules décisions annoncées par le président Trump et le département d'État sont la récompense mentionnée plus haut et l'arrêt de la certification de l'accord 5+1 devant le Congrès; cette dernière décision ne relève pas des relations internationales, mais exclusivement de la politique intérieure états-unienne. L'accord du 14 juillet 2015 a été adopté par le Conseil de sécurité des Nations Unies et ne peut être défait que par lui. Bien sûr, tous les diplomates savent que derrière cet accord multilatéral, les États-Unis et l'Iran sont convenus d'un protocole bilatéral secret qui régit leurs rôles respectifs au Moyen-Orient élargi. Au moment où j'écris, personne n'est capable de dire si le président Trump a remis en cause ou non ce protocole. Par conséquent toutes les réactions aux annonces du département d'État et à son discours du 13 octobre sont du pur théâtre.
Les classes dirigeantes des États-Unis et de l'Iran ont toujours été passionnées à propos de leurs relations respectives. Déjà, lors de la Révolution de 1979, l'administration Carter était divisée si profondément que le secrétaire d'État, Cyrus Vance, et le conseiller de Sécurité, Zbigniew Brzeziński, s'affrontèrent et menacèrent l'un et l'autre de démissionner si le président ne les écoutait pas. C'est finalement le second qui l'emporta sur le premier, non sans avoir travesti l'arrestation des espions de l'ambassade de Téhéran en une séquestration d'« otages » et sans s'être ridiculisé en échouant à les libérer. À partir de cet incident, les relations de Washington avec Téhéran sont une succession de mensonges médiatiques n'ayant aucun rapport avec la réalité.
Du point de vue iranien, le Royaume-Uni et les États-Unis sont des prédateurs et des menteurs qui ont colonisé et exploité leur pays. Ils continuent à écraser d'autres États qui ne se sont pas encore révoltés. C'est pourquoi, les Iraniens les désignent communément sous les sobriquets de « Petit Satan » et de « Grand Satan ». Selon l'ayatollah Ali Khamenei, chaque homme digne de ce nom se doit de lutter contre leurs agissements pervers. D'un autre côté, tout n'est pas mauvais chez les Anglo-Saxons et il n'y a pas de raison de ne pas faire d'affaires avec eux.
Durant l'administration Bush Jr., le vice-président Dick Cheney ne cessa de comploter avec Londres et Tel-Aviv pour attaquer Téhéran. Il créa le très secret Groupe pour la Politique et les Opérations en Iran et en Syrie («  Iran Syria Policy and Operations Group  ») autour de sa fille, Liz Cheney, et d'un vieux routier des opérations secrètes, Elliott Abrams. Il envisagea successivement de bombarder atomiquement ce pays, puis de soutenir une attaque israélienne depuis des aéroports loués à la Géorgie. Cependant, c'est exactement l'inverse qui advint : le président iranien Mahmoud Ahmadinejad et le chef d'état-major interarmes US, l'amiral Mike Mullen, se rencontrèrent secrètement le 2 mars 2008 à Bagdad. En renversant les Talibans afghans et le président iraquien Saddam Hussein, les États-Unis éliminèrent les ennemis de l'Iran à sa place et favorisèrent son influence régionale.
Durant l'administration Obama, la Maison-Blanche tenta de renverser le président Mahmoud Ahmadinejad en organisant la révolution colorée de 2009. Tirant les conclusions de son échec, elle prit contact avec ses opposants réunis autour de l'ancien président Hachemi Rafsandjani. Il se trouve que, dans la période 1983-86, le Conseil national de sécurité US organisa l'opération Iran-Contras. À l'époque le colonel Oliver North et l'éternel Elliott Abrams s'appuyèrent sur un député, cheikh Hassan Rohani, qui les introduisit auprès de l'hodjatoleslam Rafsandjani. C'est donc avec eux que l'administration Obama commença à discuter à Oman, en mars 2013. Et grâce à un tour de passe-passe, le candidat d'Ahmadinejad ne fut pas autorisé à se présenter à l'élection présidentielle que cheikh Rohani remporta cinq mois plus tard. Dès son arrivée au pouvoir ce dernier commença à négocier officiellement l'accord 5+1 qu'il avait imaginé lors des négociations d'Oman.
Donald Trump, quant à lui, n'a pas cessé de tenir un discours violemment anti-iranien durant sa campagne électorale. C'était aussi la position de son premier conseiller de Sécurité, le général Michaël Flynn. Depuis son arrivée à la Maison-Blanche, en janvier dernier, le président a pourtant éliminé un à un tous ceux de ses conseillers anti-Iraniens (à l'exception de Mike Pompeo, l'actuel directeur de la CIA). Au contraire ses trois principaux conseillers sont pro-Iraniens (son directeur de cabinet le général John Kelly, son secrétaire à la Défense le général James Mattis et son secrétaire d'État Rex Tillerson).
Il est d'ailleurs intéressant d'observer que lors de la nomination du secrétaire d'État, la presse pro-Obama annonçait comme une certitude que le poste échoirait à Elliott Abrams —encore lui—. Le président le reçut longuement, l'interrogea sur ses relations avec cheikh Rohani, puis le raccompagna à la porte et nomma Tillerson.
Il est tout à fait possible que le président Trump détruise l'accord irano-US sur un coup de tête et —beaucoup plus grave— s'en prenne aux Gardiens de la Révolution, mais il est bien plus probable qu'il joue une nouvelle fois la comédie pour apaiser ses alliés israéliens et saoudiens. Nous devons conserver à l'esprit que Donald Trump n'est pas un politicien professionnel, mais un promoteur immobilier, et qu'il agit comme tel. Il a réussi professionnellement en semant la panique par des propos excessifs et en observant les réactions qu'ils provoquaient chez ses concurrents et ses partenaires.
Pour trancher entre ces deux hypothèses, nous devons attendre les sanctions contre les Gardiens de la Révolution. Nous verrons alors si elles sont sérieuses ou relèvent uniquement à la fois de la manière de faire de Donald Trump et de la mascarade traditionnelle des États-Unis face à l'Iran.

Par Thierry Meyssan sur www.voltairenet.org le 17/10/2017

lundi 16 octobre 2017

Des élections sans choix...

Les dernières élections présidentielles au Kirghizistan ont toutes les chances de rester dans l'histoire comme un vote qui dessinera une ligne après une ère d'instabilité et marquera le premier passage du pouvoir complet et pacifique, dans la république. Après un président sortant qui a rempli ses fonctions jusqu’à la fin de son mandat, arrive un président élu légalement. Ces élections resteront dans l'histoire, comme le plus controversé dans les annales, non seulement de ce pays, mais de toute la région.

La question de la légitimité des élections présidentielles au Kirghizistan était encore aiguë au milieu de la campagne électorale. Dans tout le pays ont été enregistré des faits de campagne illégale. A ce propos, les membres du mouvement « Pour des élections justes », composé d’hommes politiques, d’hommes d'État et de personnalités publiques, ont à plusieurs reprises lancé un appel au Président du Kirghizistan, au président de la commission électorale centrale et au premier ministre afin de prendre des mesures. Mais personne n'en a jamais pris.

Ce qui n'est pas surprenant est que les hauts fonctionnaires du Kirghizistan ont été observés à plusieurs reprises en train de faire du lobbying pour les intérêts de l'un ou l'autre des candidats. Le président Almazbek Atambayev, compte tenu de sa position, prétend être équitable envers tous les candidats, mais il a ouvertement soutenu le candidat de son parti social-démocrate, l'ancien Premier ministre Sooranbaya Jeenbekov. Ceci est bien sûr une violation flagrante de la législation électorale. A la suite logique du président les membres du gouvernement et les leaders religieux doivent également respecter une égalité de traitement des candidats.

Apparemment, aussi sous la stricte supervision du chef intérimaire de la République, les autorités locales du Kirghizistan sont devenus un outil d'agitation. Lors d'une réunion du parlement kirghiz (Jogorku Kenesh) des alertes ont été exprimées à plusieurs reprises disant que dans certaines régions, des affiches portant des slogans politiques sont supprimées sur ordre des autorités, des réunions avec des électeurs sont perturbés et les quartiers généraux des candidats détestés par les autorités sont fermés. Ce n’est manifestement pas par hasard car ils sont les principaux adversaires de Sooranbaya Jeenbekov. La probabilité qu'une telle action puisse être une initiative personnelle des chefs de ces zones, sans ordre de leur hiérarchie est bien sûr faible.

Un autre aspect controversé de ces élections a été la détention d’un député du Jogorku Kenesh soupçonné d'avoir fomenté un coup d'Etat. Kanat Issaïev est le plus proche associé du chef du parti « République », Omourbek Babanov, principal rival du pro-gouvernement Jeenbekova. C’est une autre coïncidence qui ne semble pas aléatoire. Des accusations ont été portées contre lui, sans présenter d’éléments de preuves plus ou moins tangibles. Ce qui était intéressant a été mis en avant au moment de la campagne électorale, lorsque dans les sondages d'opinion, le score de Jeenbekov a commencé à baisser rapidement et sans espoir.
En plus de tous ces faits, il y en avait des certains autres, y compris l'envoi massif de messages contenant des informations inexactes sur le retrait des candidats de la course ou l'unification des forces politiques. Il y a eu des menaces de candidats les uns contre les autres, le harcèlement des journalistes qui tentaient de régler toutes ces bacchanales électorales et d'amener les contrevenants à plus de vérité, et des destructions massives de matériel compromettant. Les médias n'ont pas hésité à publier des documents clairement subjectifs et souvent même faux sur les candidats à la présidence. Les chaînes de télévision et de radio publiques ont été particulièrement zélées. Évidemment, cela ne s'est pas produit sans la participation des autorités officielles. Dans ce contexte, il est logique que ce processus ait abouti au refus de l'une des délégations d'observateurs de participer aux élections.

Mais, comme il s'est avéré plus tard, tout cela était juste un échauffement avant l'action principale. Le processus de vote était sans précédent en termes de nombre de violations. Emissions de bulletins de vote interdites le jour du scrutin, agitation et vote avec des papiers d'autres personnes, c’est ce qu'on appelle un ensemble complet. Un résident est détenu pour avoir tenté de mettre 20 bulletins de vote dans l'urne. La même chose a été faite par un membre de la commission avec 56 bulletins de vote. Et ce sont seulement les cas qui ont pu être corrigés. On peut imaginer combien d’autres événements sont passés inaperçus.

Objectivement, compte tenu de tout cela, les élections présidentielles au Kirghizistan peuvent difficilement reconnues comme légitimes. Il semble qu’il soit nécessaire de demander au minimum de les reprendre, dans des conditions complètement différentes, sous la surveillance étroite des observateurs internationaux. Par ailleurs, la suppression des leviers des ressources administratives de la direction actuelle de la République relève du devoir de la communauté internationale.

Après tout, on peut se souvenir que le Kirghizistan après avoir suivi un chemin long et douloureux avait fini par devenir un pays véritablement démocratique. Ici, c’est une volonté ponctuelle, voire le caprice de certains individus qui plongent à nouveau ce pays dans l'anarchie et le chaos.

dimanche 15 octobre 2017

Aux Seychelles, les écoles ferment par crainte de la peste

L'épidémie de peste qui ravage Madagascar inquiète les Seychelles voisines, où deux cas présumés ont été recensés. Vendredi 13 octobre, le gouvernement des Seychelles a décidé la fermeture des écoles pour au moins cinq jours.
L'épidémie de peste qui continue de sévir à Madagascar touche désormais les Seychelles, où le gouvernement a décidé la fermeture des écoles jusqu'à mardi 17 octobre. « Nous avons pris cette décision comme mesure de précaution pour rassurer les parents », a déclaré Merida Delcy, conseillère au ministère de l'éducation nationale de l'archipel.
La peste pulmonaire, une maladie extrêmement contagieuse
Fin septembre, un entraîneur de basket-ball seychellois était mort de la peste pulmonaire dans un hôpital d'Antananarivo, la capitale malgache. Deux cas présumés de peste pulmonaire ont par ailleurs été détectés sur le territoire même des Seychelles. L'un d'entre eux est un Seychellois revenant d'un séjour à Madagascar. Douze personnes montrant de possibles symptômes ont été admises à l'hôpital et placées sous antibiotiques, a précisé le ministère.
Au total, plus de 300 personnes ont été placées sous surveillance. La peste pneumonique, ou pulmonaire, est en effet une maladie extrêmement contagieuse, transmise par voie aérienne, comme la toux. Si le malade n'est pas rapidement pris en charge et traité, ses chances de survie sont nuls.
« Pour l'instant, il n'a pas encore été confirmé que les deux personnes malades aux Seychelles sont dues à la peste pulmonaire ; des échantillons doivent être envoyés ce week-end à l'Institut Pasteur », à Paris), a précisé le docteur Jude Gedeon, commissaire à la santé publique. En attendant, la peur gagne la population. Les pharmacies sont en rupture de stock de masques.
Plus de 50 décès liés à la peste à Madagascar
Le gouvernement des Seychelles a mis en place une quarantaine pour toute personne revenant de Madagascar depuis moins de sept jours. Sur cette île située à 1 500 kilomètres au sud, 18 des 22 régions sont désormais touchées par la peste, qui sévit depuis fin août. Selon le dernier bilan publié par le ministère malgache de la santé, 500 cas et 54 décès ont déjà été répertoriés sur l'ensemble du pays, dont 276 cas et 25 morts dans la seule capitale, Antananarivo.
Concernant les territoires français d'outre-mer à proximité de Madagascar, les préfectures de La Réunion et de Mayotte ont appelé à la « vigilance » et assuré que les services de l'État étaient mobilisés en cas de suspicion de peste. À ce stade, aucune restriction de circulation avec Madagascar n'a toutefois été mise en place.
Sur www.la-croix.com le 13/10/2017

Philippines: Duterte menace d'installer un «gouvernement révolutionnaire»


Le président philippin Rodrigo Duterte a évoqué vendredi la possible mise en place d'un « gouvernement révolutionnaire » pour évacuer ce qu’il qualifie de campagnes de « déstabilisation » menées par les opposants à sa politique d'extrême fermeté contre la criminalité.
Vendredi 13 octobre, dans un discours à la télévision publique, Rodrigo Duterte a attaqué frontalement l’opposition philippine. Il a notamment lancé : « si vos efforts de déstabilisation persistaient dans le chaos qui règne actuellement, je n'hésiterai pas à déclarer un gouvernement révolutionnaire jusqu'à la fin de mon mandat ».
Le président controversé a ensuite enfoncé le clou : « je pourrai alors tous vous arrêter et nous pourrons ensuite mener notre guerre contre les rouges », en référence à la guérilla communiste présente depuis plus de quarante ans dans le sud du pays.
Rodrigo Duterte a évoqué le précédent de la présidente Corazon Aquino. Elle avait limogé les députés, aboli le congrès et établi un gouvernement révolutionnaire après avoir mené le soulèvement qui avait provoqué la chute de Ferdinand Marcos en 1986.
Les opposants au dirigeant philippin, qui a souvent évoqué l'imposition d'une loi martiale, craignent qu’il ne soit tenté de glisser vers un pouvoir de plus en plus autoritaire.
Depuis son élection en 2016, Rodrigo Duterte, 72 ans, mène une sanglante guerre contre la drogue qui est déjà à l’origine de plusieurs milliers de morts, dont une grande partie non expliquées.

Sur www.rfi.fr le 14/10/2017

samedi 14 octobre 2017

Elections au Kirghizstan

Ces paroles du président actuel du Kirghizistan Almazbek Atambayev ont été prononcées au début de septembre, lors de la réunion du Conseil de sécurité à la résidence d'Etat « Ala-Archa ». Il a rappelé que lors des élections législatives en 2015, de nombreux résidents ont exprimé leur mécontentement et des doutes sur l'intégrité des élections. Plus tôt, il a annoncé qu'il rêve de tenir des élections propres et équitables.

Deux ans plus tard, avec ces mots du leader du Kirghizistan semble volontairement ou non, nier ce qu'il avait dit auparavant. Sans sa participation, la septième élection présidentielle dans l'histoire de la république a toutes les chances d'échouer comme les autres élections présidentielles vraiment honnêtes, justes et transparentes au Kirghizistan.

Dans la colonne "candidats" des bulletins de la campagne électorale en cours, il y a 11 noms. Le «successeur» conditionnel d'Atambayev est l'ancien premier ministre du pays Sooronbai Jeenbekov. Son principal adversaire est Omurbek Babanov. Selon le chef d'Etat par intérim Jeenbekov, dans les sondages d'opinion avant le vote il rassemble le plus grand nombre d'électeurs, avec  40,4% de l'électorat. Dans le même temps, qui a mené cette étude ? du côté d'Atambaev cela n'est pas indiqué, ce qui est étrange et c'est peu dire. Le fait de la forte augmentation de popularité de l'évidente "impopularité" de Jeenbekov parmi la population est également surprenant. Dans les mêmes sondages d'opinion, seulement un peu plus tôt, en Juin-Juillet, l'ancien chef du gouvernement kirghize de 59 ans, Sooronbai Jeenbekov, qui n'avait jamais participé à une campagne présidentielle, ne détenait que 16% d'intention de vote. Babanov était plus populaire, mais à l'approche de l'élection, son score a décliné, lui faisant perdre du terrain sur son rival pourtant franchement faible.

Les défenseurs des droits de l'homme disent aussi que l'organisation du combat électoral n'est pas net. Plus la date des élections s'approche, plus les déclarations des activistes du mouvement «Pour des élections équitables» sont nombreuses et fréquentes. Il n'y a pas si longtemps, ils se sont tournés vers le procureur général et la Commission électorale centrale pour demander d'envisager de faire un avertissement officiel au président Almazbek Atambayev. Selon leurs déclarations, leur exigence concerne les déclarations publiques du président, qui, selon eux, sont en violation de la loi électorale. En particulier, ils disent que les partisans d'« élections justes », le chef par intérim de la République a à plusieurs reprises ouvertement milité en faveur d'un candidat du gouvernement central. Il a été rappelé la publication des résultats de ce même sondage d'origine inconnue et peu fiable. Ils ont noté dans leur déclaration que les activistes du mouvement ont tenté d'exercer des pressions sur un autre candidat à la présidence présidentielle, Omurbek Babanov.

Cependant la Commission Electorale Centrale (CEC) a désavoué cette déclaration, affirmant qu'il n'y avait pas de traitement de ce genre dans leur discours. Les membres du mouvement sont repartis à l'attaque la veille du jour de trêve électorale, juste avant les élections. Lors d'une conférence de presse, ils ont signalé une obstruction de la période de campagne par des méthodes de lutte sans scrupules. Certains médias, selon eux, ont ouvertement diffusés des informations clairement fausses et diffamatoires à l'égard de presque tous les candidats, sauf un : le pro-présidentiel Jeenbekov. Dans le même temps, ils ont souligné l'utilisation notoire non dissimulée de la ressource administrative. Par ailleurs, un peu plus tôt, Temir Sariev, un autre favori de la course pré-électorale, a également déclaré à peu près la même chose. Dans une interview avec les médias russes, il a parlé de l'utilisation de techniques politiques vraiment difficiles, y compris les soi-disant délateurs noirs. Parmi les médias, a t-il dit, les chaînes gouvernementales travaillent pleinement à la couverture et au soutien d'un seul candidat, le pro-gouvernemental Sooronbay Jeenbekov.

Mais le signe le plus évident de l'utilisation de méthodes sans scrupules et franchement sales pour mettre la pression sur un adversaire politique pendant la campagne électorale est le comportement de Almazbek Atambayev. Des analystes ont consciencieusement surnommé "l'hystérie anti-kazakh", ses déclarations récentes et sensationnelles sur le côté kazakh. Quand il ne s'est pas contenté d'insulter toute une nation, fraternelle et proche d'esprit, mais ouvertement menacé de méthodes de confrontation énergiques. Atambaïev, n'étant alors clairement pas dans le meilleur état moral et psychologique, a menacé de « traiter » avec les candidats présidentiels Babanov et Sariev avant le 1er Décembre de cette année, quand ses pouvoirs présidentiels arriveront à échéance. Il a également menacé la direction du Kazakhstan, ce qui n'a montré qu'une chose : Atambaev a peur pour son avenir proche, dont les perspectives sont d'être soit un réfugié, soit condamné, ou simplement supprimé de la vie de l'élite politique de l'état, qu'il dirige encore.

Quelques jours avant l'élection, certains médias se sont fait l'écho qu'il voulait exclure le principal candidat au poste de chef de l'Etat, Babanov agé de 47 ans. Selon les politologues, il y a déjà eu plusieurs plaintes à la Commission Electorale Centrale. Ces plaintes sont l'œuvre des mains de son adversaire, Jeenbekov. Dans le cas où la CEC prend une décision non favorable à Babanov, il peut être exclu de la course préélectorale. Il se pourrait alors que Babanov puisse amener ses partisans dans les rues.

Les experts notent également ce qui suit : dans toutes les actes du leader du Kirghizistan, il y a un raisonnement clair et un certain calcul sobre, non sans une part d'émotion et de ferveur. Et l'objectif principal de toutes les dernières déclarations du dirigeant kirghiz est une tentative d'exposer le Kazakhstan comme un participant actif aux élections en faveur d’Omurbek Babanov. Dans le cadre de ce scénario, en cas de défaite, Babanov tentera de provoquer des troubles. Pour ce faire, ostensiblement, Atambaev n'a pas été autorisé à partir pour Sotchi, bien qu'il ait prévu. Cependant, il n'y a aucun signe d'intervention financière ou organisationnelle d'Astana, disent les politologues. Donc, la version du président sortant n'est pas bonne. Toutes les cartes sont sur la table, bien que le risque de confrontation avec le pouvoir après les élections soit tout à fait possible, selon les analystes.

Atambaev n'a rien à perdre, soulignent les experts. En tout état de cause, il devra être tenu responsable de ce qu'il a fait, en particulier, pour ses attaques contrer le Kazakhstan, un ami de longue date et dévoué du peuple kirghize. Le chef intérimaire de la république est déjà surnommé le kamikaze politique. Il a beaucoup trop parlé, inutilement et a claqué la porte. Mais il est lui-même resté derrière cette porte. Et personne ne voudra laisser Atambaev revenir en arrière. Si Jeenbekov gagne, il sera obligé de calmer le jeu, afin de ne pas gâcher les relations avec le Kazakhstan. Les gens eux-mêmes sont déjà fatigués d'Atambaev, de son sale jeu et de l'agitation dans le pays. Dans tous les cas, le nouveau président du Kirghizistan devra s'excuser pour son prédécesseur pendant longtemps.

vendredi 13 octobre 2017

Le délire anti-Iran de Donald Trump

Donald Trump confirme qu'il est bien le président du chaos. Sa tactique de gouvernance, de plus en plus autoritaire, est désormais connue. Elle consiste à injecter le maximum d'incertitude dans le système. Avec son discours extraordinairement belliqueux tenu vendredi à la Maison-Blanche, il n'a peut-être pas encore tué un accord «historique» conclu à Vienne entre l'Iran, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité et l'Allemagne. Mais il l'a clairement condamné à mort et laisse entrevoir sa volonté de ne pas empêcher l'inéluctable: une guerre contre l'Iran.
Le président républicain lègue temporairement la responsabilité de l'avenir de l'accord à un Congrès dominé par des républicains qui n'ont eu de cesse de fustiger la diplomatie iranienne de Barack Obama, mais qui commencent à s'en mordre les doigts. Agissant de façon «tripale» et non présidentielle, Donald Trump réussit le prodige de complètement isoler l'Amérique dans son délire anti-iranien. Il est prêt à créer un nouveau front de crise nucléaire avec Téhéran alors que la seule option qu'il ait pour l'heure trouvée pour résoudre le casse-tête de Pyongyang est de «détruire intégralement la Corée du Nord».
En Amérique, tous ceux qui restent encore enfermés dans l'Axe du mal de George W. Bush feraient bien d'y réfléchir à deux fois. Depuis janvier 2016, Téhéran voue un respect irréprochable à l'accord, dixit l'Agence internationale de l'énergie atomique, chargée de sa mise en œuvre. Plutôt que d'affaiblir l'Iran, le républicain offre une victoire morale à Téhéran, qui a su répondre à la main tendue de Barack Obama. L'Amérique apparaît comme le paria de la communauté internationale. Un peu comme George W. Bush l'avait fait à sa façon avec sa guerre d'Irak, Donald Trump finit par renforcer l'Iran dans son rôle de puissance régionale. De manière contre-productive, il met en difficulté les modérés iraniens et se met à dos tous ces Iraniens de l'ouverture qui ont réélu le président Hassan Rohani en mai dernier.
Parallèlement, Donald Trump, qui a décidé de se priver d'une diplomatie quasi inexistante dirigée par un de ses caniches, Rex Tillerson, a détérioré vendredi de façon considérable la crédibilité de la première puissance mondiale. Il a dynamité un consensus international solide. Or vingt et un mois d'âpres négociations ont débouché sur un compromis qui devrait servir de modèle dans les négociations internationales, notamment pour régler la crise nord-coréenne. Pyongyang a désormais une excuse en or pour ne pas traiter avec un gouvernement américain incapable de tenir parole.
Par Stéphane Bussard le 13/10/2017 sur www.letemps.ch

mercredi 11 octobre 2017

Les ventes d’armes chinoises explosent en Asie

La semaine dernière, l'ambassadeur de Chine aux Philippines, Zhao Jianhua, a remis 3000 fusils d'assaut à Manille au cours d'une cérémonie tenue au quartier général de l'armée. Fin juin, Pékin avait déjà offert à l'archipel une cargaison d'armes d'une valeur de 7,3 millions de dollars. La police et l'armée s'en serviront pour lutter contre un soulèvement islamiste dans la ville de Marawi et dans le cadre d'une vaste campagne anti-drogue qui a déjà fait plus de 13 000 morts.
Il ne s'agit que de la pointe de l'iceberg. «La Chine fait désormais partie des cinq plus grands exportateurs d'armes sur le plan mondial, juste derrière les Etats-Unis, la Russie et la France», note Siemon Wezeman, du Stockholm International Peace Research Institute, qui a mené une étude sur le sujet. Entre 2011 et 2015, la Chine a vendu du matériel militaire à 37 pays et 75% de ces exportations ont fini en Asie ou en Océanie. Le Pakistan se taille la part du lion (35%), suivi du Bangladesh (20%) et de la Birmanie (16%).

Nouveaux clients

Plus récemment, Pékin a acquis de nouveaux clients: l'armée thaïlandaise s'apprête à recevoir, cette semaine, sa première livraison de 28 tanks chinois. Elle a aussi commandé des sous-marins et des véhicules d'infanterie. En novembre dernier, la Malaisie a acheté quatre navires de patrouille à Pékin, d'une valeur de 277 millions de dollars. L'Indonésie, le Sri Lanka, le Cambodge et le Laos font également partie des clients de l'industrie militaire chinoise.
Celle-ci a connu une spectaculaire croissance. «Les investissements consentis par Pékin dans ce domaine sont passés de 21 milliards de dollars en 1988 à 215 milliards de dollars en 2015, ce qui en fait le deuxième pays le plus dépensier après les Etats-Unis, détaille Siemon Wezeman. Technologiquement, ses armes jouent désormais dans la même ligue que celles des Américains ou des Russes.»

Livraisons sans conditions

Pékin n'a pas eu de peine à trouver des clients. Les armes chinoises sont bon marché et leur achat donne souvent lieu à des transferts de technologie ou à l'octroi de prêts. Un drone de combat chinois vaut 1 million de dollars, quatre fois moins que son homologue américain. Ces armements sont aussi fournis sans conditions. Si Manille a accueilli avec autant d'empressement les fusils d'assaut chinois, c'est que le Congrès américain lui avait auparavant refusé une vente d'armes, craignant que ces dernières ne servent à commettre des abus contre les droits de l'homme.
Acheter des armes à la Chine permet en outre de s'assurer de son soutien en cas de conflit. Le Cambodge, le Laos et la Birmanie, très isolés sur le plan diplomatique, en ont notamment profité. «Les Etats-Unis ont négligé l'Asie ces dernières années, car ils étaient accaparés par les guerres en Afghanistan et en Irak, relève Collin Koh, un chercheur de l'Ecole de relations internationales S. Rajaratnam de Singapour. Cela a créé un vide dans lequel la Chine s'est engouffrée.»

Moyen d'influence

Pékin y trouve aussi son compte. En Asie du Sud-est, il cherche des alliés prêts à appuyer ses prétentions territoriales en mer de Chine méridionale. Le plus spectaculaire retournement provient sans doute des Philippines qui, après avoir dénoncé les convoitises de la Chine sur un chapelet d'îlots contestés devant une cour internationale à La Haye, semblent désormais prêtes à tout oublier en échange de ses cadeaux.
«En Asie du Sud, la vente d'armes au Pakistan, au Bangladesh, à la Birmanie et au Sri Lanka a permis à Pékin d'accroître son influence dans l'arrière-cour de l'Inde, ajoute Collin Koh. Celle-ci est désormais complètement encerclée par les alliés militaires de son grand rival.»
Par Julie Zaugg le 11/10/2017 sur www.letemps.ch