jeudi 14 mars 2013

Paris et Londres veulent livrer des armes aux rebelles syriens

Après le Britannique David Cameron, Laurent Fabius a marqué la volonté de la France d'enfreindre, s'il le faut, l'embargo de l'Union européenne sur la livraison d'armes à destination de l'opposition syrienne.

En lever de rideau du sommet européen, la France tord le bras à ses partenaires. Paris s'est aligné jeudi matin sur Londres pour demander la livraison rapide d'armes de guerre aux rebelles syriens, en passant outre l'embargo maintenu par l'Union européenne et malgré l'opposition résolue de l'Allemagne.

 

C'est Laurent Fabius qui a consacré le changement de cap, prenant le soin d'ajouter que c'est désormais la position du chef de l'État: Paris «demande aux Européens de lever maintenant l'embargo» sur les armes à destination de la Syrie. Si ce n'est pas possible la France, «nation souveraine», pourrait enfreindre l'interdit, ajoute-t-il. Dès mardi, le premier ministre britannique David Cameron avait annoncé fait qu'il entend agir «comme bon (lui) semble» pour livrer des armes à la révolte syrienne.

L'objectif des deux pays pourrait être de livrer des missiles sol-air aux rebelles syriens, désarmés face aux bombardiers et aux hélicoptères d'attaque de Bachar el-Assad. Dans une récente interview au Figaro , le général Salim Idriss, nouveau chef de l'Armée syrienne libre, réclamait aussi des armes antichars ainsi que des munitions pour les pièces d'artillerie prises à l'ennemi.

«Il faut aller extrêmement vite»

La France et le Royaume-Uni s'agacent de l'inertie européenne face à l'aggravation du conflit syrien et de l'entêtement du régime el-Assad, soutenu par Moscou et Téhéran, à refuser toute solution politique. À l'échelon européen, l'embargo ne peut être levé qu'à l'unanimité, à moins d'attendre qu'il ne s'éteigne de lui-même à la fin mai. Paris et Londres semblent bien plus pressés.

Faisant monter la pression, Laurent Fabius dit attendre une réponse de ses partenaires avant la fin mars. «Il faut aller extrêmement vite (…) On ne peut pas accepter ce déséquilibre actuel avec d'un côté l'Iran et la Russie qui livrent des armes à Bachar et de l'autre, des résistants qui ne peuvent pas se défendre.». Livrer des armes, explique-t-il sur France Info, c'est aussi «l'un des seuls moyens qui reste pour faire bouger politiquement» le régime de Damas.

Entre Européens, la discussion pourrait atteindre son moment de vérité à la fin de la semaine prochaine, lors d'un rendez-vous informel des chefs de la diplomatie à Dublin. L'alternative offerte par Paris et Londres est simple: soit lever l'embargo, peut-être à contrecœur, soit le voir ouvertement torpillé par les deux pays de l'UE qui pèsent le plus lourd en politique étrangère.

Berlin en situation inconfortable

Dans un geste sans doute calculé, Paris place aussi Berlin en situation inconfortable à quelques heures d'un sommet européen en principe voué à l'économie: sur la Syrie, le rendez-vous de Bruxelles pourrait se jouer à front renversé, une alliance inédite entre François Hollande et David Cameron, face à Angela Merkel.

L'Allemagne défend à tout crin les vertus de l'embargo. Sentant peut-être le coup venir, le chef de la diplomatie, Guido Westerwelle, ne cesse de mettre en garde contre les risques d'une «course à l'armement» en Syrie qui, dit-il, pourrait déboucher sur un conflit embrasant «toute la région». À Bruxelles, les dirigeants européens pourront difficilement échapper à une franche explication sur le sujet, d'autant que les relations «stratégiques» avec la Russie sont officiellement le deuxième chapitre du sommet.

Par Jean-Jacques Mevel le 14/03/2013 sur www.lefigaro.fr

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