vendredi 3 juillet 2015

Qui bénéficie de l'Etat Islamique ?

Il y a une étrange guerre au Moyen-Orient. Les États qui crient contre la menace de l’organisation terroriste « Etat islamique » détruisent ceux qui peuvent se battre contre ces mercenaires. En outre, à coté de cela, ils gagnent des milliards de dollars grâce à la guerre.

L’Organisation EIIL (État Islamique en Irak et au Levant ou tout simplement État islamique), selon de nombreux experts, a été créé par le Koweït en opposition à Al-Qaïda qui a été fondée et secrètement soutenu par l'Arabie saoudite. Cependant, il semble qu'aujourd'hui, même Riyad est plutôt satisfait de l'existence de l'EIIL.

La raison en est que, sous les auspices de l’EIIL, les pays de la région peuvent promouvoir leurs propres intérêts géopolitiques et (surtout) économiques. Aujourd'hui, l'État islamique répond à une logique de contrôle des flux de pétrole (grâce à laquelle il a gagné des millions de dollars). Néanmoins aujourd'hui, ce que montre principalement les conflits du Moyen-Orient, c’est une redistribution des sphères d'influence dans le monde.

Alors, qui lutte contre les mercenaires de l'Etat islamique aujourd'hui? De jure, il y a beaucoup d'Etats : les États-Unis et l'Union européenne, la Russie et presque tous les pays du Moyen-Orient résistent à l'EIIL. Mais cela est seulement théorique. Barack Obama, par exemple, ne peut pas soutenir Damas dans la lutte contre EI, parce qu’il finance les opposants politiques à Assad. La France, effrayée par les explosions à Paris, préfère traiter uniquement le blocage du retour des mercenaires sur son propre territoire. La Grande-Bretagne préfère résoudre ses problèmes internes. Et l'Allemagne, est maintenant occupée avec seulement essayer d'établir des relations économiques avec Moscou. Moscou essaie de ne pas provoquer un conflit et préfère appeler à la paix.

En conséquence, il y a très peu de pays, qui tentent de résister aux mercenaires. La police chiites, les Iraniens et les Kurdes aident Bagdad à lutter contre l'EI. Le Hezbollah et l'Iran ont appuyé Damas en fournissant des armes et des combattants dans la guerre de Bachar al-Assad contre l’EIIL et "Al-Qaïda".

Mais certains pays qui sont théoriquement contre les mercenaires se tiennent de facto aux côtés des terroristes, en se battant contre leurs ennemis. En particulier, on peut parler de l'opération de l'Arabie saoudite contre les Huthis au Yémen. Officiellement, l'Arabie saoudite et de l'Etats-membres de la coalition ont décidé de punir les Huthis (chiites) pour le renversement du gouvernement sunnite du président Abd Rabbo Mansour Hadi. En plus de cela, Riyad accuse Téhéran de soutenir les Huthis avec des armes et de l'argent. Le Yémen s’avère être une plate-forme de la confrontation entre l'Arabie saoudite et l'Iran. Cependant, en fait, le nombre de participants est beaucoup plus important.

Les pays occidentaux ont appuyé à l'unanimité Riyad. Le ministre britannique des Affaires étrangères Philip Hammond «a compris» les préoccupations de Riyad "au sujet d’un possible établissement d’un régime chiite au Yémen comme en Iran". Le président américain Barack Obama a appelé ouvertement l'Iran, «parrain du terrorisme d'Etat".

Il semble que sous le drapeau de l'Arabie Saoudite, l'Occident soutient l’EIIL en essayant de marginaliser l'Iran, qui lutte contre celui-ci. Cela signifie que l'Occident bloque les adversaires de l'État islamique, en dénouant les mains de ce dernier.

Et maintenant, voici la partie la plus intéressante. En plus des pays arabes de la région, la coalition, qui a bombardé le Yémen, a été ralliée par le Pakistan et la Turquie. Pourquoi ? Les frontières de ces pays sont assez loin du Yémen. Le Pakistan n’a aucune raison d'intervenir dans le conflit entre chiites et sunnites sachant qu’elle a déjà trop de problèmes avec les talibans sur son propre territoire.

Ayant les forces de l’EI à ses frontières, la Turquie ferait mieux de soutenir les Huthis et l'Iran, qui pourraient servir de force militaire contre l'Etat islamique.

Mais ...

Non seulement la Turquie n’empêche pas le développement de l'Etat islamique, mais elles prend également en charge ces terroristes. Officiellement, les autorités turques n’ont pas reconnu l'EI comme une organisation terroriste. Au lieu de cela, Ankara achète (bien sûr secrètement) du carburant à l'Etat islamique, qui est la principale source de revenus de l'EIIL. Le revenu mensuel du transit d'au moins 4.000 tonnes de carburant à partir de l'EI vers la Turquie est d'environ 15 millions de dollars.

Des centaines de partisans de l'Etat islamique pénètrent dans les territoires occupés de la Syrie à travers l'Irak. Beaucoup de combattants blessés de l'EIIL sont traités dans les hôpitaux publics turcs.

En outre, lors de l'agression du groupe terroriste de l'EI contre la ville Kobani peuplée de kurdes, les autorités turques ont par tous les moyens entravé la lutte des Kurdes contre l'EI et agi contre leurs intérêts nationaux.

On pourrait supposer que cette attitude d'Ankara envers les terroristes est le résultat de la corruption endémique dans le pays. Mais la Turquie est un membre de l'OTAN. En outre, la Turquie ne pouvait guère montrer cette fidélité aux terroristes sans le soutien des acteurs majeurs de l'Alliance. Ceci est démontré, par exemple, par les conseils que la coalition dirigée par l'Arabie saoudite selon lesquels la «situation» avec les Huthis aidera l'EIIL à renverser le gouvernement de Bachar al-Assad. C’est ce que la Maison Blanche n'a pas été capable de faire.

Néanmoins, Ankara a mené le jeu pendant très longtemps. Alors peut-être a-t’elle décidé de jouer avec ses cartes.

La Turquie a réclamé le leadership dans le monde turc depuis de nombreuses années. Comme il y a des dirigeants inamovibles très ambitieux dans un certain nombre d'autres pays turcophones (Islam Karimov en Ouzbékistan et Noursoultan Nazarbaïev au Kazakhstan), cela est encore assez difficile à faire. Mais l'expansion de l'EIIL en Afghanistan et en Asie centrale peut aider à renforcer l'influence de la Turquie. Même à présent, les mercenaires ont pris le contrôle d’une portion de frontière de 30 kilomètres entre l'Afghanistan et le Turkménistan, le long de la rivière Murgap. Il y a eu une attaque dans la province afghane de Kunduz près de la frontière avec le Tadjikistan. La principale organisation terroriste dans la région, le Mouvement islamique d'Ouzbékistan, a annoncé que l'organisation avait rejoint l’«Etat islamique» l'automne dernier. Un officiel de Tachkent a déjà informé ses voisins au sujet d'un début de flux massif de mercenaires à travers les frontières de la région.

Cette montée en pression se passe avec la participation directe de la Turquie. Les États d'Asie centrale ont accusé à plusieurs reprises Ankara de préparer des islamistes radicaux. En outre, certains des pays de la région ont été contraints d'interdire à leurs citoyens d’étudier dans certaines institutions religieuses de Turquie. Cela est arrivé parce que dans ces pays, il avait été vu l’émergence de sentiments islamiques radicaux après leur retour au pays.

Plusieurs milliards de revenus du transit de l'héroïne alimentent les intérêts d'Ankara. C’est peut-être pourquoi la Turquie a fait une offre à l'EIIL, qui commence une lutte active contre les talibans en capturant progressivement leurs territoires d'influence.

En fait, aujourd'hui, la Turquie est une forteresse cachée pour les terroristes. Même si Ankara travaille sous pression et comme un intermédiaire pour les intérêts occidentaux.

L’activation de l'EI en Asie centrale, avec l'appui indirect d'Ankara et de l'Arabie saoudite a un but direct qui est de saper l'arc d'instabilité dans la région de la Caspienne. Le client final de tout ceci peut être Washington, avec son aversion anti-russe. (La Turquie est un allié politique de Washington et elle a adopté une position pro-occidentale par rapport à la Crimée qui a rejoint la Fédération de Russie). Il y a sept ans, Washington a fait pression sur certaines révolutions de couleur dans cette zone. Cependant, avec le soutien de Moscou, la région pourrait y résister. Mais c’est une chose de s’opposer aux tentatives politiques d'influence, c’en est une autre chose de s’opposer aux mercenaires.

Il se trouve que par l'intermédiaire d'Ankara et de l'Arabie Saoudite, il a été créé une force qui est intéressée à la déstabilisation de la situation dans la région. En échange, il a peut-être été promis à la Turquie un soutien politique et l'adhésion attendue depuis longtemps dans l'UE, ainsi que l'expansion des limites de son influence politique et beaucoup d'avantages économiques.

Quoi qu'il en soit, aujourd'hui, dans le Moyen-Orient, quelque chose a commencé, que beaucoup de gens appellent la «troisième guerre mondiale». Elle implique directement ou indirectement la majorité des pays sur trois continents.

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