lundi 29 juin 2015

Un haut responsable chinois appelle à une coopération sino-espagnole renforcée dans le cadre de l'initiative "Ceinture et Route"

Un haut responsable du Parti communiste chinois (PCC) a appelé ce lundi la Chine et l'Espagne à promouvoir leur coopération pragmatique dans le cadre de l'initiative "Ceinture et Route", projet de nouvelle route de la soie qui prévoit des voies de communication renforcées entre la Chine et l'Europe à travers l'Asie centrale.
Liu Qibao, membre du bureau politique du Comité central du PCC, qui effectue actuellement une visite en Espagne, a lancé cet appel à l'occasion de sa rencontre avec Jesus Posada, le président du Congrès des députés (chambre basse du Parlement espagnol).
 
M. Liu a déclaré que la Chine considérait l'Espagne comme un partenaire important dans la mise en œuvre de l'initiative "Ceinture et Route".
 
M. Liu, qui est aussi à la tête du département de la communication du Comité central du PCC, s'est réjoui du développement continu des relations sino-espagnoles et de la coopération fructueuse entre les deux pays dans des domaines variés.
 
Après avoir rappelé que cette année est celle du dixième anniversaire du partenariat stratégique global sino-espagnol, M. Liu a souligné que la Chine accordait une grande importance à ses liens avec l'Espagne et espérait approfondir les échanges bilatéraux entre les gouvernements, les organes législatifs, les partis politiques et les peuples des deux pays. Il a ajouté que la Chine espérait renforcer la coopération avec l'Espagne dans les domaines de l'économie, du commerce et des investissements financiers, et amener les relations bilatérales à un stade encore plus poussé.
 
De son côté, M. Posada s'est félicité des relations amicales entre les deux pays et entre leurs organes législatifs. Il a par ailleurs souligné que la partie espagnole attachait une grande importance à la réalisation de l'initiative "Ceinture et Route" proposée par la Chine, et désirait y prendre une part active. Il a également déclaré que la visite de M. Liu permettrait d'approfondir les échanges culturels et les échanges entre les personnes, ainsi que la coopération entre les deux pays. 
 
Sur french.cri.cn/ le 30/06/2015

Le programme anti-corruption du Kazakhstan

En Chine, au cours de ces dernières années, la lutte contre la corruption est pratiquée de façon inhabituelle. Les responsables locaux de la prévention de la corruption organisent des visites dans les prisons où leurs anciens collègues ont été condamnés pour corruption. La méthode est intéressante, mais en l'absence de réforme globale, hélas elle est inefficace. La corruption est comme une maladie systémique de tout l'appareil d'Etat qui exige une approche systématique. La politique anti-corruption du Kazakhstan est un exemple d'une telle approche.
 
Aujourd'hui, malheureusement, pas un seul Etat ne peut se vanter d'une absence totale de corruption. En dépit des nombreux outils destinés à lutter contre ce mal, du durcissement des sanctions contre les fonctionnaires corrompus jusqu'aux campagnes innovantes qui sont menées en Chine, la corruption continue d'être un enjeu clé de tout Etat. Le problème est que la corruption réduit l'efficacité de l'administration publique, entrave le développement économique du pays, sape la confiance de la population dans les autorités et en fin de compte, menace la sécurité nationale.
 
Au Kazakhstan, la lutte contre la corruption a toujours été une priorité. Pendant les années de l'indépendance, le pays a mis en place des institutions et des mécanismes de lutte contre ce phénomène négatif, et dans ce sens, a mis en œuvre un certain nombre de programmes d'Etat. Leurs résultats ont pu être jugés par les experts de l'organisation internationale non gouvernementale «Transparency International». Dans le classement mondial, reflétant l'efficacité de la lutte contre la corruption, le Kazakhstan est en avance sur ses voisins d'Asie centrale et est parmi les chefs de file parmi les pays de la CEI. L'efficacité de la politique anti-corruption dans le Kazakhstan peut être jugée par les indicateurs économiques du pays. Le PIB du Kazakhstan montre une croissance régulière. En un quart de siècle, il a augmenté de 20 fois. Pendant ce temps, le Kazakhstan est devenu l'un des cinquante pays les plus compétitifs du monde et cimenté son statut de l'Etat avec le climat d'investissement le plus favorable dans la CEI.
 
Toutefois, les autorités kazakhes admettent qu'il y a encore du travail à faire. Par conséquent, le pays continue de travailler activement à améliorer les méthodes de lutte contre la corruption. Donc, à partir du début de 2015, le Kazakhstan a durci la sanction pour les fonctionnaires corrompus. Le nouveau Code pénal les prive de la possibilité de retourner à la fonction publique, quel que soit le délai de prescription de l'infraction. Les fonctionnaires corrompus ne peuvent pas compter sur la probation ou la libération conditionnelle.
 
La mission principale de lutte contre la corruption au Kazakhstan est affectée à une agence spécialement créée en 2014. Elle aborde la question de la lutte contre la corruption par une approche globale, qui comprend l'utilisation de méthodes scientifiques. Pour étudier et analyser les risques de corruption dans toutes les sphères de l'Etat et de la société, il a même été créé un Centre scientifique d'analyse. Il ne suffit pas de faire face aux conséquences de la corruption, il est important d'éradiquer ses causes et les conditions qui la rendent possible. La Stratégie anti-corruption de la République pour les 10 prochaines années est un guide d'action, une sorte de feuille de route qui identifie les lacunes existantes dans la lutte contre la corruption et identifie les moyens d'y remédier.
 
Aujourd'hui également, le Kazakhstan met en œuvre un ambitieux programme de modernisation du pays avec "100 mesures concrètes". Son but  est de "guérir toutes les maladies systémiques" de l'appareil d'Etat, y compris la corruption. Le programme d'éradication de la corruption au Kazakhstan touche tous les échelons de l'Etat. La fonction publique doit être un environnement concurrentiel dans lequel la voie à des postes supérieurs aura lieu à partir du bas. Elle doit être maintenue dans des conditions compétitives, sur une base concurrentielle avec une durée de probation, compléter par une certification et un salaire basé sur les résultats du travail. Le programme prévoit une responsabilisation accrue des autorités judiciaires et policières, et de l'État dans son ensemble, ce qui implique la transparence dans la prise de décision à tous les niveaux. Kazakhstan travaille également sur une nouvelle législation anti-corruption. Et dans l'actuelle Agence de la fonction publique et de lutte contre la corruption dans le pays, il est prévu de créer une unité spéciale pour le système de prévention et la prévention des infractions de corruption.
 
Son ampleur et sa nouvelle approche pour résoudre de vieux problèmes des programme de réforme Kazakhs a provoqué une réponse positive dans la communauté des experts. De nombreux experts ayant évalué les « 100 mesures » établissent des parallèles avec la modernisation de Singapour, qui a duré presque la totalité de la seconde moitié du XXème siècle. Grâce à des réformes de grande envergure, accompagnées par des réformes structurelles et une lutte sans merci contre la corruption, cette fois un pays du tiers monde, avec un taux de criminalité élevé, dépourvu de ressources naturelles et un avenir apparemment peu lumineux, est devenu un état progressiste et prospère avec l'un des niveaux de vie les plus élevés.
 
L'expérience de Singapour a démontré que la lutte contre la corruption peut être efficace quand il existe une volonté politique. Les autorités kazakhes montrent clairement une volonté, et cela signifie que ce pays va pouvoir bientôt donner toutes les chances pour son «miracle économique».

Boule de feu dans un parc à Taiwan : décès d'une jeune femme, plus de 500 blessés

Brûlée à 90%, une jeune Taïwanaise est morte des suites de ses blessures, lundi. Elle est la première victime signalée de ce drame qui a fait plus de 500 blessés, dont 200 grièvement. Lors d'un concert dans un parc aquatique samedi soir, de la poudre colorée a pris feu, embrasant les lieux où se trouvait un millier de personnes.
 
C'est le premier décès enregistré après le dramatique accident survenu samedi dans le parc aquatique de Formosa Fun Coast à New Taipei City, à proximité de Taipei. Une jeune Taïwanaise, qui assistait à un concert organisé dans le cadre de l'animation "Color Play Asia", a été brûlée à 90% après l'embrasement d'une poudre colorante. Elle a succombé à ses blessures à l'hôpital de Taichung. Lee Pei-yun, 20 ans, est la première victime de cette tragédie.
 
Un millier de personnes participaient à l'animation. La plupart des victimes étaient vêtues d'un simple maillot de bain pour danser sous des projections de poudres nappant les corps de bleu ou de vert. Pour une raison encore indéterminée, la poudre s'est embrasée, transformant les jeunes fêtards en torches humaines. Parmi les quelque 500 blessés, 200 l'ont été grièvement et sont soignés dans 43 hôpitaux de l'île.
 
Cinq personnes dont l'organisateur arrêté
 
"Les médecins ont prononcé le décès de Lee après que sa mère eut accepté d'arrêter le traitement" la maintenant en vie, a indiqué à l'AFP un responsable des autorités sanitaires de Taichung. Selon des médias locaux, son petit frère de 12 ans a été brûlé à 80%. Tous deux se trouvaient près de la scène quand s'est déclaré l'incendie, peut-être dû aux lumières de la scène ou à des cigarettes.
 
Cinq personnes arrêtées dimanche, dont l'organisateur de l'événement, ont été relâchées. Elles encourent jusqu'à cinq ans de prison. La poudre utilisée est produite à partir de farine de maïs, inflammable à haute densité en cas de fortes températures. L'entreprise Taiwon Food Industrial Co affirme avoir mis en garde les organisateurs contre les dangers de la poudre. Des avertissements figurent par ailleurs sur les emballages, selon elle. "Nous avons arrêté de vendre et de produire cette poudre conformément à l'interdiction prononcée par le gouvernement" après l'accident de New Taipei City, a indiqué à l'AFP Chou Hui-fang, vice-président de l'entreprise.
 
Sur lci.tf1.fr le 29/06/2015

Fondation à Pékin de la Banque asiatique d'investissement, outil du «rêve chinois»

 
Cinquante États – dont la France, l'Allemagne et la Grande-Bretagne – ont signé lundi à Pékin l'accord entérinant les statuts de la nouvelle banque asiatique de développement lancée à l'initiative de la Chine, laquelle aura un poids prédominant dans l'institution. L'Australie a été le premier pays à signer ce document établissant la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures (BAII), a rapporté un journaliste de l'AFP, lors d'une cérémonie au grand palais du peuple.
Quarante-neuf autres États ont suivi, soit un total pour le moment de 50 membres fondateurs. Représentés lundi, sept autres (Danemark, Pologne, Afrique du Sud, Koweït, Malaisie, Philippines et Thaïlande) devraient les rejoindre d'ici à la fin de l'année. Dotée d'un capital de 100 milliards de dollars, la BAII doit être opérationnelle d'ici à décembre et contribuer à financer des travaux d'infrastructures en Asie, région où les investissements dans ce domaine font souvent défaut. «Notre initiative est conçue pour répondre aux besoins de développement des infrastructures en Asie (...), mais aussi pour approfondir les coopérations régionales», a affirmé lundi le Président chinois Xi Jinping, qualifiant la cérémonie d'«étape d'importance historique».
Après un lancement en grande pompe fin 2014, Pékin a réussi à rallier au projet nombre de pays occidentaux, mais pas les États-Unis ni le Japon, respectivement la première et la troisième économies mondiales. Washington avait exprimé de vives réserves vis-à-vis de la BAII, s'inquiétant de son manque de transparence, de sa rivalité avec les organisations de développement existantes, ainsi que du risque que Pékin l'utilise pour ses propres intérêts géopolitiques.

La BAII constitue de facto un contrepoids au contrôle exercé par les États-Unis sur la Banque mondiale (BM) et – aux côtés du Japon – sur la Banque asiatique de développement (BAD). Et la Chine ne cache pas son intention d'en faire un instrument de «soft power», dont pourraient profiter à plein ses entreprises en quête de débouchés internationaux.
 
Poids de la Chine
 
Le fonctionnement de la BAII, dont le siège sera situé à Pékin, accorde à la Chine un rôle prédominant, du fait même qu'elle en est, de très loin, le plus important contributeur, avec environ 30% des parts. Ce qui permettra à Pékin d'obtenir 26% des droits de vote, selon le gouvernement chinois. Or, la majorité qualifiée des trois quarts des voix des membres étant exigée pour certaines décisions structurelles, la Chine disposera dans ce cas d'une minorité de blocage. «La participation de la Chine et son importance dans les votes résultent naturellement des règles décidées par l'ensemble des membres fondateurs», a répliqué Shi Yaobin, vice-ministre chinois des Finances cité par un média étatique. «Nous n'avons pas cherché de façon délibérée à nous emparer d'un pouvoir de veto», a-t-il ajouté, expliquant que l'inclusion à l'avenir de nouveaux États amènera automatiquement une dilution dans la répartition actuelle.
 
Pékin, par ailleurs, «recommandera un solide et puissant candidat» pour assurer la présidence de la banque, a assuré M. Shi, sans précisions. L’Inde est le deuxième plus gros contributeur de l'institution (8,4%), suivi par la Russie (6,5%). Parmi les États non asiatiques membres fondateurs, l'Allemagne est le principal contributeur (4,5% des parts), suivie de la France (3,4%) et du Brésil (3,2%). Des sources proches du dossier, interrogées par l'AFP, avaient récemment tempéré les inquiétudes suscitées, arguant que les pays «non régionaux» pourraient également, en votant de concert, bloquer certaines décisions fondamentales.
 
Et les Européens ayant rejoint le projet avaient expliqué vouloir peser sur les négociations plutôt que de rester à l'écart, et contribuer à définir les standards de gouvernance de la future institution. Ses statuts publiés lundi indiquent, mais de façon vague, que la BAII s'assurera de «la conformité (de ses investissements) à ses politiques opérationnelles (...) notamment en matière d'incidence environnementale et sociale». «Cela apportera de nouvelles opportunités à nos entreprises, et promouvra une croissance durable à travers l'Asie», s'est félicitée la ministre Singapourienne des Finances Joséphine Teo. Pour autant, le porte-parole du gouvernement japonais, Yoshihide Suga, réagissait lundi de façon circonspecte : «Nous allons regarder très attentivement, notamment la manière dont (la banque) opère en pratique».
 
Outre un «conseil des gouverneurs» réunissant des représentants des pays membres, les activités de l'institution seront pilotées par un conseil d'administration dont les 12 membres (neuf «régionaux» et trois «non régionaux) seront élus pour deux ans.
Par Julien Girault sur www.lematin.ma le 29/06/2015

dimanche 28 juin 2015

L’Occident impuissant face à Daech

L'organisation islamiste dispose, en plus de sa force de frappe, d'un formidable réseau de communication pour recruter, diffuser des messages, des vidéos, des appels au meurtre.
 
38 morts, en majorité britanniques, dans une fusillade dans un hôtel tunisien ; un chef d'entreprise décapité dans un attentat en France ; 27 morts dans l'attaque d'une mosquée chiite au Koweït ; des dizaines d'autres sur une base en Somalie ; plus de 200 civils, femmes et enfants massacrés lors de l'assaut des combattants de Daech sur la ville kurde de Kobané en Syrie : autant d'attentats sanglants qui ont marqué ce deuxième vendredi du ramadan 2015.
 
À l'exception de la tuerie en France, tous les attentats sont signés du sigle de Daech. Le groupe islamiste, né en Irak de la guerre menée par les Américains, montre à chaque fois sa capacité à frapper en plusieurs endroits, attisant la peur et le sentiment qu'il n'existe plus de sanctuaire.
Le message est clair : Daech n'a pas de limite géographique. Il est capable de frapper partout, étendant sa toile bien au-delà du Moyen-Orient où il est né, vers l'Europe, l'Afrique du Nord et jusqu'en Asie.
 
Terroriser les « croisés »
 
Il y a trois jours, le groupe qui combat en Irak et en Syrie, avait lancé un appel incitant les musulmans dans le monde à engager la guerre sainte contre les « mécréants » durant le ramadan, qui a commencé le 18 juin.
Les mécréants ce sont les Européens, les touristes en Tunisie. « Le soldat du califat (…) a pu parvenir au but », tuant près de 40 personnes « dont la plupart sont des sujets des États de l'alliance croisée qui combat l'État du califat », indique un communiqué diffusé après l'attentat de Sousse, par des comptes djihadistes sur Twitter, en faisant référence à la coalition internationale bombardant les positions de Daech en Irak et en Syrie.
 
Les « croisés », pour Daech, ce sont les Français qui combattent les djihadistes au Mali et en Irak, et qui imposent des lois contre le port du voile intégral. L'espoir de Daech est de convaincre et de rallier à leur cause les musulmans de l'hexagone – la plus grande communauté d'Europe. Avec un certain succès si l'on considère le nombre de jeunes partis en Syrie rejoindre les djihadistes, dont, a annoncé hier Manuel Valls, 119 seraient déjà morts.
 
Abattre les chiites, leurs ennemis
 
Mais ce sont aussi les chiites considérés comme pires ennemis encore que les « croisés ». Avant la mosquée du Koweït le 26 juin, c'est, en mai, une mosquée chiite en Arabie Saoudite qui avait été visée par Daech lors de la prière du vendredi, faisant 21 morts et plus de 80 blessés.
Daech surfe sur le brasier de cette vieille rivalité confessionnelle ranimé déjà par les pays sunnites de la région, Arabie Saoudite, Qatar et pays du Golfe. Le choix du jour n'est pas non plus le fruit du hasard, le vendredi étant, dans les pays musulmans, le jour de la grande prière en islam. Que les attentats se déroulent pendant le ramadan renforce encore davantage le symbole.
 
Détruire les valeurs occidentales
 
En plus de cette force de frappe, Daech dispose d'un formidable réseau de communication que les Occidents peinent à contrer, sans même parler de le contrôler. Twitter, Internet, Facebook, tout est bon pour recruter, diffuser des informations, des vidéos, des appels au meurtre.
« Nous ne pouvons pas perdre cette guerre parce que c'est au fond une guerre de civilisation. C'est notre société, notre civilisation, nos valeurs que nous défendons », a déclaré le 28 juin le premier ministre, Manuel Valls lors de l'émission Le Grand Rendez-vous d'Europe 1-Le Monde-iTELE.
 
Aujourd'hui, les démocraties semblent bien prises de court et impuissantes pour contrer Daech et ses affidés.
 
Par Agnès Rotivel le 28/06/2015 sur www.la-croix.com

jeudi 25 juin 2015

Mer de Chine et cyber-espace: Washington met en garde Pékin

Washington a mis en garde Pékin mercredi contre ses ambitions territoriales en mer de Chine méridionale et face au piratage informatique. Ces avertissements ont été adressés au terme d'un sommet de trois jours entre les deux premières puissances mondiales.

Pour la 7e édition de leur "dialogue stratégique et économique" annuel, les Etats-Unis et la Chine ont mis sur la table cette semaine leurs multiples contentieux tout en vantant leurs coopérations, en premier lieu sur le changement climatique.

Côté américain, les discussions étaient pilotées par le secrétaire d'Etat John Kerry et le secrétaire au Trésor Jacob Lew et, côté chinois, par le vice Premier ministre Wang Yang et le conseiller d'Etat Yang Jiechi qui a la main sur la politique étrangère de son pays. La partie chinoise a été reçue mercredi Barack Obama pour préparer la visite d'Etat de Xi Jinping en septembre.

M. Obama "a évoqué les inquiétudes des Etats-Unis concernant le comportement de la Chine dans les domaines maritime et informatique et a appelé la Chine à prendre des mesures concrètes pour faire baisser les tensions", selon la Maison Blanche.

Les ambitions territoriales de Pékin en mer de Chine méridionale, auxquelles s'opposent des pays d'Asie du Sud-Est soutenus par les Etats-Unis, sont source de tensions récurrentes dans la région. Les zones maritimes disputées sont stratégiques pour le commerce mondial et recèlent potentiellement d'importantes réserves d'hydrocarbures.

Piratage sur la table

Le piratage informatique est aussi source de vifs échanges entre Washington et Pékin. Des médias américains et des responsables ont vu la main de la Chine derrière la récente cyber-attaque ayant visé les données de millions de fonctionnaires américains. En mai 2014, cinq militaires chinois avaient été inculpés aux Etats-Unis pour "piratage informatique" et "espionnage économique".

John Kerry s'est dit "profondément préoccupé par les questions de cyber-sécurité, évoquant des discussions "franches" avec ses interlocuteurs chinois, mais "sans que l'on s'accuse ou l'on se montre du doigt". Il s'est plaint des "dommages causés aux entreprises américaines".

M. Lew avait été plus accusateur mardi, dénonçant "le vol électronique, parrainé par le gouvernement chinois", d'informations économiques confidentielles et de technologies brevetées. "La Chine exhorte les Etats-Unis à s'en tenir aux faits", a rétorqué le conseiller d'Etat Yang, dont les propos étaient traduits.

Climat et taux de change

Les deux géants, présentés comme des rivaux voire des adversaires en Asie-Pacifique, se sont aussi efforcés d'afficher leur bonne entente sur des problématiques mondiales: changement climatique, nucléaire iranien et nord-coréen, guerres au Moyen-Orient ou aide humanitaire.

Sur le climat, les deux pays, liés depuis novembre par un accord sur la réduction de leurs émissions, ont affirmé "leur détermination à obtenir un accord ambitieux et mondial en décembre à Paris". Washington et Pékin ont également annoncé une initiative commune en vue de protéger les océans, notamment par la lutte contre la surpêche et la création de zones marines.

Au plan économique, alors que les Etats-Unis souffrent d'un déficit commercial record de plus de 342 milliards de dollars en 2014, dû en partie à une sous-évaluation du yuan, le secrétaire au Trésor s'est félicité que "la Chine se soit engagée à n'intervenir qu'en cas de nécessité sur le marché des taux de change".

"La Chine a un rôle important dans l'économie mondiale et l'architecture financière", a loué M. Lew. John Kerry a lui réaffirmé que "les Etats-Unis saluaient l'émergence d'une Chine stable, pacifique et prospère".
 
Sur www.romandie.com le 25/06/2015

Birmanie : revers pour Aung San Suu Kyi

A l’issue de trois jours de débats, le Parlement birman a rejeté, jeudi 25 juin, un projet de loi visant à réduire le poids de l’armée en son sein. Une décision qui anéantit tous les espoirs de l’opposante et Nobel de la paix Aung San Suu Kyi de pouvoir un jour changer la Constitution de 2008, qui l’empêche toujours d’accéder à la présidence.

Le projet d’amendement n’a « pas été adopté », a déclaré le président du Parlement, n’ayant pas réuni les plus de 75 % de voix nécessaires. Aung San Suu Kyi avait pourtant réitéré, mardi, son appel à modifier la Constitution : « Si nous voulons un véritable changement dans ce pays, nous devons modifier la clause 436. »
 
Cette disposition polémique permet à l’armée de bénéficier d’un droit de veto au Parlement de facto. La clause 436 stipule en effet que plus de 75 % des votes sont nécessaires pour modifier la Constitution. Or au Parlement un quart des sièges sont réservés à l’armée. Cette clause lui donne donc la possibilité de bloquer toute décision à laquelle elle s’oppose.

Impasse

Aung San Suu Kyi a fait campagne sans relâche ces derniers mois pour une modification de la Constitution. Des élections législatives sont prévues pour la fin de l’année et vues comme un test crucial pour la Birmanie, en pleine mutation après des décennies de régime militaire. Mme Suu Kyi, qui a été enfermée pendant près de quinze ans par l’ancienne junte et est entrée au Parlement en 2012, est donnée grand vainqueur des prochaines élections avec son parti, la Ligue nationale pour la démocratie (LND).
 
Mais l’accès à la présidence est toujours impossible pour elle, en raison d’un article de la Constitution qui exclut les personnes ayant des conjoints ou des enfants étrangers, une disposition considérée comme visant directement Suu Kyi, dont les deux fils sont britanniques. L’armée s’oppose toujours à toute modification de cet article, et place Aung San Suu Kyi dans une impasse.
 
Sur www.lemonde.fr le 25/06/2015

mercredi 24 juin 2015

L'Australie adhère à la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures

 
L’Australie a annoncé mercredi 24 juin son adhésion en tant que membre fondateur à la nouvelle Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures (BAII), créée à l’initiative de Pékin. La contribution du pays, sur cinq ans, sera de 930 millions de dollars australiens (638 millions d’euros).
 
Cinquante-sept pays se sont portés candidats pour rejoindre la BAII, qui sera opérationnelle avant la fin de l’année et aura son siège à Pékin, en dépit des réticences des Etats-Unis et du Japon. La nouvelle structure, qui sera dotée d’un capital de 100 milliards de dollars, doit contribuer à financer des travaux d’infrastructures en Asie, où les investissements font cruellement défaut. « Le manque de financements en matière d’infrastructures est estimé à environ 8 000 milliards de dollars dans la région asiatique pendant la décennie actuelle. La BAII fait partie de la solution pour combler ce manque », affirment les ministres australiens pour expliquer leur participation.
 
Washington et Tokyo s’inquiètent de la gouvernance de la BAII et de son positionnement vis-à-vis de structures similaires, comme la Banque mondiale et la Banque asiatique de développement (BAD) sur lesquelles ces deux pays ont beaucoup de poids. Les Etats-Unis et le Japon sont réservés quant à la transparence de cette banque géante et au risque que la Chine l’utilise pour ses propres intérêts géopolitiques et économiques.
 
Sur www.lemonde.fr le 24/06/2015

jeudi 18 juin 2015

Gaz: l'Europe trouve une alternative à l'Ukraine

Alors que la Russie négocie actuellement avec Ankara au sujet du gazoduc Turkish Stream, elle pourrait être aidée par un atout de poids: l'Europe parle de relancer le projet Nabucco avec la participation de Moscou.

Gazprom est aujourd'hui prêt à toutes les concessions pour ne pas faire traîner les négociations avec les autorités turques. La perspective de rediriger le gazoduc vers la Bulgarie pourrait changer cette posture défavorable.
Rappelons que le projet Nabucco prévoyait un approvisionnement en gaz contournant la Russie: du Turkménistan et de l'Azerbaïdjan via la Turquie, la Bulgarie, la Roumanie et la Hongrie vers l'Autriche et l'Allemagne. Cependant, le projet a été abandonné en 2013 à cause de problèmes de financement et de l'absence de garanties des fournisseurs de gaz.

La Russie souhaite aujourd'hui cesser le transit via l'Ukraine et tente de construire un itinéraire alternatif pour les livraisons en Europe — il s'agissait d'abord du projet South Stream, dont la destination finale était l'Autriche mais qui avait été stoppé en raison de divergences avec l'UE. Le holding russe construit actuellement le gazoduc Turkish Stream pour acheminer le gaz jusqu'à un hub à la frontière gréco-turque. Toutefois, aucun contrat contraignant n'a encore été signé.
Dans le même temps, la Turquie ne s'empresse pas de signer un accord avec la Russie. Et ce n'est pas étonnant: les positions d'Ankara sont bien plus fortes aux négociations que celles de Moscou. Et plus la Turquie fera traîner la signature des accords, plus de concessions et de remises elle obtiendra de Gazprom. La Russie ayant annoncé la cessation du transit ukrainien, elle est ainsi dépendante des décisions d'Ankara. Cependant, la relance de Nabucco pourrait constituer un atout inattendu pour la Russie.

A moyen terme, la Russie pourrait partager le nouveau Nabucco avec d'autres exportateurs, par exemple l'Iran, qui était étudié comme fournisseur via ce gazoduc. Après tout, les fournitures de gaz iranien en Europe pourraient reprendre prochainement avec la levée des sanctions économiques internationales contre Téhéran.

La quantité annuelle de gaz russe acheminé par Nabucco pourrait avoisiner les 30 milliards de mètres cubes. Sachant que la capacité potentielle du Turkish Stream s'élève à 63 milliards de mètres cubes, dont 47 milliards sont prévus pour être livrés en Europe.

À l'heure actuelle, la Russie est effectivement prête à rejoindre tout projet pouvant au moins partiellement réduire le transit ukrainien — ainsi, fin mai, l'ambassadeur de Russie auprès de l'UE Vladimir Tchijov n'a pas écarté la possibilité d'une participation de Moscou au gazoduc transadriatique. 

Sur fr.sputniknews.com le 17/06/2015

mercredi 17 juin 2015

Vers la fin du système Erdoğan

Thierry Meyssan, qui avait annoncé la chute de Recep Tayyip Erdoğan dès décembre 2014 alors que tous les commentateurs internationaux persistaient à le croire gagnant des élections législatives, revient ici sur la carrière du président turc. Dans cette synthèse, il met en lumière les liens de l'AKP avec les Frères musulmans et le rôle de M. Erdoğan dans la coordination du terrorisme international après l'attentat contre le prince saoudien Bandar bin Sultan.
 

Échec aux élections législatives

Le résultat des élections législatives turques ne menace pas simplement les projets de Recep Tayyip Erdoğan, qui se voyait déjà en nouveau Sultan, mais le pouvoir même de son parti, l'AKP. Chacun des trois autres partis (MHP conservateur, CHP socialiste et HPD gauche) a indiqué refuser de former un gouvernement de coalition avec lui et souhaiter, au contraire, former une coalition à trois. Dans le cas où ils n'y parviendraient pas d'ici 45 jours, il conviendrait alors soit de confier aux socialistes le soin de former une coalition gouvernementale –une option déjà écartée par l'AKP–, soit de convoquer à nouveau des élections législatives.

Ce scénario semble encore improbable, comme le résultat de l'élection paraissait impossible à la quasi-totalité des commentateurs politiques jusqu'au scrutin du 7 juin. Cependant, en signant le 1er décembre 2014 un accord économique avec Vladimir Poutine pour lui permettre de contourner les sanctions de l'Union européenne (Turkish Stream), M. Erdoğan a défié les règles implicites de l'Otan. Ce faisant, il est devenu l'homme à abattre à la fois pour Washington et pour Bruxelles. Les États-Unis ont donc largement influé en sous-main durant la campagne électorale pour rendre possible le renversement de l'AKP.

Pour cette élection, M. Erdoğan s'était fixé comme objectif de remporter 400 sièges sur 550. En réalité, pour faire adopter une constitution taillée sur mesure qui lui accorde les pleins pouvoirs exécutifs, il espérait 367 sièges. À défaut, il se serait contenté de 330 sièges, ce qui lui aurait permis de convoquer un référendum qui aurait adopté le projet de constitution à la majorité simple. De toute manière, il lui en fallait 276 pour disposer de la majorité parlementaire, mais il n'en aura que 258, ce qui est insuffisant pour conserver seul le pouvoir.

La domination de l'AKP, depuis 2002, s'expliquait à la fois par ses bons résultats économiques et par la division de son opposition. Or, l'économie turque est en pleine déroute : le taux de croissance qui flirtait avec les 10 % pendant une décennie a chuté lors de la guerre contre la Libye, puis lors de l'opération secrète contre la Syrie. Il est actuellement de 3 %, mais pourrait rapidement devenir négatif. Le chômage se développe soudainement et atteint les 11 %. Ces guerres ont en effet été conduites contre des alliés de la Turquie et des partenaires économiques indispensables. Quant à la division de l'opposition, la CIA qui l'avait envenimée par le passé s'est empressée d'y remédier.

La chose était facile compte tenu de la kyrielle de griefs que l'autoritarisme de M. Erdoğan a suscitée. L'union de l'opposition avait déjà eu lieu, à la base, en juin 2013, lors des manifestations du parc Taksim Gezi. Mais le mouvement avait échoué, d'abord parce qu'à l'époque M. Erdoğan était soutenu par Washington, et parce qu'il était resté un soulèvement urbain. À l'époque, les manifestants protestaient certes contre un projet immobilier, mais principalement contre la dictature des Frères musulmans et la guerre contre la Syrie.

Constatant que ce mouvement n'avait pas pu le renverser, l'AKP se pensait, à tort, indétrônable. Il a donc tenté de faire passer en force son programme islamiste (foulards pour les femmes, interdiction de cohabitation pour les célibataires de sexe opposé, etc.). Et ce, alors que l'image pure du Sultan se trouvait soudainement remise en cause par la révélation de la corruption de sa famille. En février 2014, on entendait, sur ce qui paraît être une interception téléphonique, M. Erdoğan demander à son fils de cacher 30 millions d'euros en liquide avant une perquisition de la police [1].

Tout ceci sans parler de la purge contre les fidèles de son ancien allié, Fethullah Gülen [2], de l'incarcération massive de généraux, d'avocats et de journalistes [3], du non-respect des promesses faites aux Kurdes, et de la construction du plus grand palais présidentiel au monde.

Cet échec est la conséquence de sa politique étrangère

L'échec de Recep Tayyip Erdoğan ne provient pas de décisions intérieures, c'est la conséquence directe de sa politique étrangère. Les résultats économiques exceptionnels de ses premières années n'auraient pas été possibles sans l'aide en sous-main des États-Unis qui voulaient en faire le leader du monde sunnite. Ils ont été stoppés, en 2011, par le ralliement d'Ankara à l'opération de destruction de la Jamahiriya arabe libyenne qui était jusque là son second partenaire économique. La Turquie a réveillé les liens historiques qu'elle avait avec la tribu des Misratas, principalement des Aghdams, c'est-à-dire des juifs turcs convertis à l'islam et installés en Libye au XVIIIe et XIXe siècle.

La Turquie avait conscience qu'en attaquant la Libye, elle perdrait un très important marché, mais elle espérait prendre la tête des gouvernements tenus par les Frères musulmans, déjà en Tunisie, puis probablement en Libye, en Égypte et en Syrie. Ce qui a effectivement eu lieu dans les deux premiers États en 2012, mais n'a pas duré.

Ankara s'est engagé dans la guerre contre la Syrie. C'est sur le sol turc que l'Otan a installé le quartier général de coordination des opérations. Durant la première guerre (celle de 4ème génération), allant de février 2011 à la conférence de Genève I de juin 2012, l'Otan transférait en Turquie les combattants d'al-Qaïda en Libye de manière à créer « l'Armée syrienne libre ». M. Erdoğan se contentait de fournir des bases arrières camouflées en « camps de réfugiés », tandis que la presse occidentale aveuglée ne voyait qu'une « révolution démocratique » (sic) dans la lignée du « printemps arabe » (re-sic).

En juin 2012, la victoire électorale des Frères musulmans en Égypte pouvait laisser penser à un avenir radieux de la Confrérie. Aussi M. Erdoğan suivit-il le projet d'Hillary Clinton, du général David Petraeus et de François Hollande de relancer la guerre contre la Syrie, mais sur le mode nicaraguayen cette fois. Il ne s'agissait plus de soutenir une opération secrète de l'Otan, mais de jouer un rôle central dans une guerre classique de très grande ampleur.

Recep Tayyip Erdoğan, coordinateur du terrorisme international

Lorsque, en juillet 2012, l'Axe de la Résistance réagissait à l'assassinat des membres du Conseil de sécurité national syrien en tentant d'assassiner le prince saoudien Bandar ben Sultan, Recep Tayyip Erdoğan saisit sa chance. Il substitua la Turquie à l'Arabie saoudite dans la manipulation du terrorisme international.

En deux ans, plus de 200 000 mercenaires, venus des quatre coins du monde, transitèrent par la Turquie pour faire le jihad en Syrie. Le MIT —les services secrets turcs— mirent en place un vaste système de circulation d'armes et d'argent pour alimenter la guerre, principalement payée par le Qatar et supervisée par la CIA.

M. Erdoğan installait trois camps d'entrainement d'al-Qaïda sur son sol à Şanlıurfa (frontière syrienne), à Osmaniye (à côté de la base de l'Otan d'Incirlik), et à Karaman (près d'Istanbul) où il organisa une académie du terrorisme dans la tradition de l'École des Amériques [4] [5].

La police et la Justice turque ont montré que M. Erdoğan était —comme l'ancien vice-président états-unien Dick Cheney— un ami personnel de Yasin al-Qadi, le « banquier d'al-Qaïda ». C'est en tous cas ainsi que le FBI et les Nations unies l'avaient identifié jusqu'à ce qu'il soit retiré de la liste internationale des terroristes, en octobre 2012. Durant la période où il était mondialement recherché, Yasin al-Qadi se rendait secrètement à Ankara, en avion privé. Les gardes du corps de M. Erdoğan venaient le chercher à l'aéroport, non sans avoir d'abord désactivé les caméras de surveillance [6].

Le 18 mars 2014, un enregistrement diffusé sur YouTube laissait entendre un directeur de Turkish Airlines, Mehmet Karataş, se plaindre auprès d'un conseiller de M. Erdoğan, Mustafa Varank, que sa compagnie ait été utilisée par le gouvernement pour transférer secrètement des armes à Boko Haram au Nigéria. Le haut-fonctionnaire ne s'inquiétait pas d'avoir violé le droit international, mais déplorait que ces armes puissent servir à tuer non seulement des chrétiens, mais aussi des musulmans.

En mai 2014, le MIT transférait par train spécial à Daesh quantité d'armes lourdes et de pick-up Toyota neufs offerts par l'Arabie saoudite. L'Émirat islamique, qui n'était alors qu'un groupe de quelques centaines de combattants, se transformait en un mois en une armée de dizaines de milliers d'hommes et envahissait l'Irak.

Durant les quatre derniers mois de 2014, la Turquie empêcha les Kurdes du PKK de voler au secours des leurs à Kobané (Aïn al-Arab) lorsque la ville fut attaquée par Daesh. Au contraire, de nombreux journalistes ont attesté que les jihadistes pouvaient librement franchir la frontière [7].

Le 19 janvier 2015, la gendarmerie sur requête du parquet intercepta un convoi transportant des armes destinées à Daesh. Cependant, la perquisition fut interrompue lorsqu'on découvrit que le convoi était conduit par des agents du MIT. Par la suite, les procureurs et le colonel de gendarmerie furent arrêtés pour « trahison » (sic). Durant l'instruction de leur procès, un magistrat laissa fuiter que le MIT avait affrété au total 2 000 camions d'armes pour Daesh [8].

La colonne vertébrale du système terroriste turc est facilement identifiable : en 2007, l'Académie militaire de West Point a montré que les hommes de l'Émirat islamique en Irak provenaient d'al-Qaïda en Libye (GICL). Les mêmes mercenaires ont été utilisés pour renverser Mouamar el-Kadhafi en 2011 [9], puis pour former l'Armée syrienne libre (les « modérés ») [10]. Les membres syriens de l'Émirat islamique en Irak ont créé al-Qaïda en Syrie (Front al-Nosra). De nombreux combattants libyens et syriens sont revenus au sein de l'Émirat islamique en Irak lorsque celui-ci s'est renommé « Daesh » et a envoyé des cadres à Boko Haram (Nigéria).

L'implication publique de la Turquie dans le conflit

La Turquie tira un grand profit de la guerre contre la Syrie. D'abord en organisant le pillage de ses trésors archéologiques. Un marché public fut même installé à Antioche pour que les collectionneurs du monde entier puissent acheter les pièces volées et passer commande des œuvres à voler. Puis en organisant le pillage industriel d'Alep, la capitale économique de la Syrie. La Chambre de Commerce et d'Industrie d'Alep a montré comment les usines ont été systématiquement démontées, les machines-outil transférées en Turquie sous l'œil vigilant du MIT. Les Syriens ont porté plainte en Justice, mais leurs avocats turcs ont immédiatement été arrêtés par l'administration Erdoğan et sont toujours emprisonnés.

L'Armée turque n'a longtemps qu'envoyé des Forces spéciales en Syrie —plusieurs soldats turcs ont été faits prisonniers par l'Armée arabe syrienne—. Cependant, elle a coordonné l'attaque du village chrétien de Maaloula, en septembre 2013 ; un village qui n'offre aucun intérêt stratégique, mais qui est le plus ancien lieu de culte chrétien au monde. Surtout, en mars 2014, l'Armée turque entrait en Syrie pour escorter les jihadistes du Front Al-Nosra (Al-Qaïda) et de l'Armée de l'islam (pro-Saoudien) jusqu'à la ville arménienne de Kassab avec la mission de massacrer les habitants dont les grands-parents avaient fui le génocide perpétré par les ottomans [11]. Sans surprise, la France et les États-Unis s'opposèrent à une condamnation de cette agression par le Conseil de sécurité. Par la suite, l'Armée turque est entrée plusieurs fois en territoire syrien, mais n'y a jamais livré d'autres batailles.

Le poids des crimes de Recep Tayyip Erdoğan

La presse turque a largement traité les crimes de l'administration Erdoğan, ce qui lui a définitivement aliéné les populations alévies (proches des alaouites) et kurdes. Les premiers soutiennent massivement le CHP et les seconds le HPD. Mais c'était insuffisant pour faire chuter le nouveau Sultan.

L'erreur est survenue le 1er décembre 2014, lorsque M. Erdoğan a signé un gigantesque accord économique avec le président Poutine, qu'il perçoit à tort comme un Tsar et donc comme un modèle. Peut-être a-t-il craint que les États-Unis se retournent contre lui, une fois la Syrie tombée, à la manière dont ils s'étaient retournés contre Saddam Hussein une fois l'Iran épuisée. Toujours est-il qu'en prétendant jouer sur les deux tableaux, l'Est et l'Ouest, M. Erdoğan a perdu le soutien que lui apportait sans défaillir la CIA depuis 1998.

Le parcours de Recep Tayyip Erdoğan

Adolescent, M. Erdoğan pensait entreprendre une carrière de footballeur. Meneur d'hommes, personnalité charismatique, il vécu dans la rue à tête d'un groupe de délinquants. Il rejoignit rapidement la Millî Görüş (littéralement : « Vision nationale », doit être compris dans le contexte de la censure comme « Islam politique ») de Necmettin Erbakan, dont le programme était la ré-islamisation de la société. Il milita dans un groupe d'extrême droite anti-communiste et participa à diverses manifestations anti-juives et anti-maçonniques.

Élu au Parlement en 1991, il fut interdit d'occuper ses fonctions en raison du coup d'État et de la répression qui s'abattit sur les islamistes. Élu maire d'Istanbul, en 1994, il exerça ses fonctions sans imposer sa vision islamiste. Cependant, au moment de l'interdiction de son parti, il fut condamné pour avoir récité lors d'un de ses discours un poème pan-turkiste. Il purgea 4 mois de prison et fut interdit de se présenter aux élections.

Libéré, il prétendit avoir rompu avec les erreurs du passé. Il abandonna sa rhétorique anti-occidentale, provoquant la division du mouvement de Necmettin Erbakan. Avec l'aide de l'ambassade US, il fonda alors l'AKP, un parti à la fois islamiste et atlantiste auquel il intégra non seulement ses amis de la Millî Görüş, mais aussi les disciples de Fetullah Güllen, et les anciens partisans de Turgut Özal. Ce dernier, était un kurde sunnite qui fut président de 89 à 93. L'AKP gagna les élections de 2002, mais celles-ci furent annulées. Il gagna également les élections de 2003, ce qui permit à Recep Tayyip Erdoğan de devenir enfin Premier ministre, son interdiction politique étant terminée.

Arrivé au pouvoir, M. Erdoğan oublia d'imposer ses vues islamistes. Il développa l'économie avec l'aide des États-Unis, puis à partir de 2009 mit en œuvre la théorie du professeur Ahmet Davutoğlu (un disciple de Fetullah Güllen) de « zéro problème avec nos voisins ». Il s'agissait de résoudre, avec un siècle de retard, les conflits hérités de l'Empire ottoman. Entre autres choses, il mit en place un marché commun, en 2009, avec la Syrie et l'Iran, provoquant un boom économique régional.

L'AKP et les Frères musulmans

Bien qu'ayant une histoire différente, la Millî Görüş manifesta toujours un intérêt pour les Frères musulmans égyptiens. Aussi traduisit-elle les œuvres d'Hassan el-Banna et de Saïd Qotb.

L'AKP se rapprocha officiellement des Frères musulmans lors de la guerre conduite par Israël contre les Gazaouites, en 2008-09. Ce qui conduisit le gouvernement Erdoğan à soutenir et à participer au projet de Flottille de la liberté organisé par les Frères sous couvert d'une association humanitaire, l'IHH, et sous l'oeil vigilant de la CIA [12].

Dès les premiers jours du printemps arabe, l'AKP soutenait Rached Ghannouchi en Tunisie, Mahmoud Jibril en Libye et Mohamed Morsi en Égypte. Le parti fournit des spécialistes en communication politique aux Frères musulmans et les conseilla pour imposer leur vision commune de l'islam dans leurs sociétés respectives.

Signe de cette alliance, M. Erdoğan facilita, en septembre 2011, la création à Istanbul du Conseil national syrien, appelé à devenir le gouvernement syrien en exil ; une instance entièrement contrôlée par les Frères musulmans [13].

En 2012, M. Erdoğan accueillit au congrès de l'AKP les leaders des Frères musulmans au pouvoir, l'Égyptien Mohamed Morsi et le Palestinien Khaled Meschal. De même, il organisa une conférence des Frères, le 10 juillet 2013, auquel participèrent Youssef Nada, Mohammad Riyad al-Shafaka (le guide des Frères en Syrie) et Rached Ghannouchi. Par précaution, ce sont ses anciens amis de la Millî Görüş et non l'AKP qui lancèrent les invitations.

Lorsqu'en septembre 2014, le Qatar évite une guerre avec l'Arabie saoudite en invitant les Frères musulmans à quitter l'Émirat, M. Erdoğan saisit à nouveau sa chance et se trouve seul parrain de la Confrérie au plan international.

L'avenir de la Turquie

C'est par facilité que l'on a considéré Recep Tayyip Erdoğan comme un néo-ottoman. Son projet n'a jamais été de reconstituer l'Empire, mais d'en créer un nouveau avec ses propres règles. Il a cru pouvoir s'appuyer alternativement sur le fantasme du Califat (avec le Hizb ut-Tahrir, puis avec Daesh) ou celui du pan-turkisme (« la vallée des loups »).

C'est également à tort qu'on l'a décrit comme un politicien autoritaire. En réalité, il s'est toujours comporté comme un chef de meute et l'on ne dit pas d'un caïd qu'il est autoritaire. Pris en flagrant délit, dans de nombreuses affaires criminelles, il a toujours réagi en niant les évidences et en limogeant ou en arrêtant les policiers et les magistrats qui appliquaient la loi.

Même si Recep Tayyip Erdoğan parvenait à soudoyer le MHP, ou tout au moins 18 de ses députés, pour former une coalition gouvernementale, son parti ne restera pas longtemps au pouvoir.

De manière à être certain de ne plus avoir à affronter l'AKP, les États-Unis devraient en favoriser la division en encourageant les disciples de Fetullah Güllen et les partisans de feu le président Turgut Özal à former leur propre parti.

Le gouvernement qui succédera à l'AKP devra rapidement libérer les prisonniers politiques et poursuivre les leaders islamistes corrompus, puis abroger diverses lois islamistes pour satisfaire l'opinion publique. Il mettra fin à l'implication de la Turquie dans la guerre d'agression contre la Syrie, mais devrait faciliter l'exfiltration des jihadistes par la CIA, d'Irak et de Syrie vers une autre destination. Il bénéficiera du soutien financier des États-Unis dès qu'il aura remis en question le Traité signé par le président Erdoğan avec le président Poutine.

La chute de l'AKP devrait provoquer un repli des Frères musulmans sur le Qatar, seul État qui leur soit désormais favorable. Elle devrait aussi éclaircir l'horizon en Tunisie et en Libye, et favoriser la paix en Syrie et en Égypte.

Par Thierry Meyssan sur www.voltairenet.org le 15 juin 2015

vendredi 12 juin 2015

La Chine teste avec succès un missile hypersonique

La Chine a testé avec succès un engin hypersonique Wu-14 capable de pénétrer le système de défense antimissile des Etats-Unis et d'effectuer une frappe nucléaire.

Un missile balistique Wu-14 a été tiré depuis une base militaire de l'Ouest de la Chine le 7 juin. Il s'agit du quatrième test effectué ces 18 derniers mois.

Le missile chinois, qui consiste en une sorte de planeur expérimental, est lancé avec un missile balistique traditionnel, dont il se détache lorsqu'il atteint la stratosphère. Il plane ensuite dans la stratosphère avant de s'abattre sur la cible désignée.

Le missile peut contenir une charge militaire ordinaire, mais aussi une ogive nucléaire. Suite au détachement, la vitesse du bloc atteint près de 12.300 km par heure.

Selon le portail d'information numérique Washington Free Beacon, le missile a montré une meilleure capacité de manœuvre que lors des tests précédents. Ceci confirme qu'il est en mesure de pénétrer le système de défense antimissile américain.  

Rick Lehner, porte-parole de la Missile Defense Agency des Etats-Unis, s'est abstenu de tout commentaire concernant les capacités du Pentagone à abattre de tels missiles hypersoniques avec les systèmes utilisés actuellement par le département de la Défense US, a fait savoir Washington Free Beacon.

Entretemps, la commission exécutive du Congrès américain sur la Chine a souligné dans son rapport du novembre 2014 que "les missiles hypersoniques peuvent rendre les systèmes de défense antimissile moins efficaces et potentiellement démodés".

"Compte tenu des résultats des quatre tests que la Chine a effectué ces 18 derniers mois, il est possible que la production de la première version du missile soit bientôt terminée et que dans un ou deux ans l'appareil soit mis en service", a estimé Rick Fisher, expert du Centre international pour la stratégie et l'évaluation.

Le premier test du missile hypersonique Wu-14 s'est déroulé le 9 janvier 2014, le deuxième et le troisième ont eu lieu le 7 août et le 2 décembre respectivement.

A présent quatre pays travaillent sur l'élaboration de l'arme hypersonique: les Etats-Unis, la Russie, la Chine et l'Inde.

Sur
http://fr.sputniknews.com le 11/06/2015

lundi 1 juin 2015

Scandale dans l'affaire Aliyev

En Autriche, il y a eu une confusion dans la justice qui va entacher de façon indélébile des représentants de la justice. A Vienne, le juge Andreas Bem a remis en liberté Alnur Musayev et Vadim Koshlyak qui étaient soupçonnés d'avoir commis une série de crimes graves.
 
Cette décision était inattendue et ses motifs ne poseraient pas tant de questions s’ils n’étaient déroutants. Le bureau du procureur général a protesté à ce sujet auprès d’une autorité supérieure, et au début du mois de mai, la Cour suprême de la province de Vienne a commencé son enquête. Même les journalistes locaux sont surpris. Après tout, les défenseurs sont des protagonistes de l'affaire à sensations de Rakhat Aliyev, ce qui signifie qu’ils représentent un danger social extrême pour la société.
 
Que la vérité de l’affaire soit sacrifiée par du verbiage, que la vérité et le triomphe de la justice soit « maquillée », en particulier par des nuances et des détails mineurs, c’est une chose. Mais il en est une autre lorsque le juge influence le jury, consciemment ou inconsciemment. Soyons d’accord, c’est un domaine très sensible où l’équilibre est perdu au moindre coup de vent. Et si le juge montre soudainement sa «loyauté» à l'accusé, il jette ainsi le doute sur son statut d'arbitre impartial.
 
Si généralement les média autrichiens sont sur la réserve dans les affaires judiciaires, ce n’est pas par hasard qu’ont éclaté une série d'articles critiques à l'encontre de la justice.

Un des plus grands journaux autrichiens «Osterreish», a critiqué de façon cinglante l'ensemble du système judicaire : «  les étudiants en droit ont expliqué que le droit pénal autrichien est l'un des meilleurs dans le monde, mais il n’est pas aussi logique qu'il n'y paraît. Preuve en est, le procès de l’affaire Aliyev ».
 
Que dire de plus, si ce n’est qu’avant l’intervention de M. Böhm, il y a eu 16 instances judiciaires autrichiennes, y compris la Cour suprême qui ont conclu à l'unanimité que la détention de Musayev et Koshlyak était légale. Les ministères autrichiens compétents, y compris le ministère de la Justice, étaient tous d’accord sur l’accusation d’assassinat des banquiers kazakhstanais. Et soudain, un trait de plume a jeté une ombre sur l'ensemble du système judiciaire.
 
N’y a-t-il pas eu trop de scandales autour de cette affaire ? Tout d’abord, le principal accusé, Rakhat Aliyev, est mort dans la prison de Yozefshtand. Il règne maintenant la confusion dans la justice.

Les représentants de la justice se moquent ouvertement des témoins. En particulier, lors de l'interrogatoire du conducteur Sapojhnikov, M. Böhm, a dit que s’il avait été lui-même forcé à transporter des personnes recouvert d’un masque, il se serait immanquablement demandé ce qui se passe. Le juge a apparemment oublié que l'accusé représentait les forces de sécurité et pouvait, sans qu’aucune question ne lui soit posée, réquisitionner n’importe quel transport.
 
Lorsque les témoins ne se souviennent pas des détails parce que plus de huit ans se sont écoulés, le juge commence à appuyer psychologiquement et de façon menaçante sur leur responsabilité pénale pour faux témoignage.

Un exemple frappant de double standards est en évidence dans le cas présent. Le Juge Böhm, essayant apparemment de transférer l'affaire au plan politique, a appelé à témoigner Rysbek Sarsenbayev, frère du politicien Altynbek Sarsenbayev au Kazakhstan, qui a été tuée en février 2006.
 
Malgré la protestation du bureau du procureur à Vienne, M. Böhm décide de l'interroger. Imaginez sa surprise lorsque le témoin a parlé de l'implication de Musayev et Aliyev dans le contrat du meurtre de son frère. Le témoin a également suggéré la complicité de Musayev et Koshlyak dans l'assassinat des banquiers. Il a effectivement soutenu la ligne de l’accusation et apparemment cassé le scenario développé par le jury.

Pourquoi le juge Böhm a tant insisté, au mépris du bureau du procureur ? Son intérêt pour le témoin R. Sarsenbayev s’est, de façon spectaculaire, immédiatement refroidi. Il a interrompu ses mots: "C’est une autre affaire, laquelle ne nous concerne pas
."
 
Telle est justice, une comédie qui tourne.

Cette affaire fait grand bruit. Pour être honnête, tout est empêtré par le mensonge. Les défenseurs tentent d'éviter leur responsabilité, et pour être tout à fait honnête, ils exploitent l’égocentrisme européen. En particulier, nous parlons de l'absence totale de confiance vers les pays de l'Est de Vienne, utilisés par les voleurs et les criminels fugitifs. Le statut de combattant de la liberté d'une part et un gros portefeuille prévoyant une couverture juridique totale, de l'autre, et il est possible de vivre heureux pour toujours. Les affaires de ce genre, comme le montre la pratique, sont retardées pendant des années.
 
Mais quelqu'un a-t-il essayé de vérifier ses propos? Pendant ce temps, il est devenu connu que sa première femme et ses filles ne tolèrent aucune forme de harcèlement. La fille aînée, Almira Musayev, femme d’un diplomate kazakhstanais en République tchèque, la plus jeune s’est mariée à un citoyen de la Fédération de Russie. Ils se déplacent facilement entre les pays, et personne au Kazakhstan, ne les en empêche. La deuxième femme, est venue plusieurs fois en Autriche avec son fils, dont M. Musayev est le père.
 
Mais lui même, ex-général est bien adaptés au rôle de dictateur. Sa femme a été forcée d'abandonner le christianisme et de se convertir à l'islam, de changer non seulement sa religion, mais aussi son prénom. Toutefois, cela est une affaire privée.

Pour faire un portrait de Musayev, il suffit d’avoir assez de ces matière, lesquels sont maintenant considérés par la justice autrichienne. La chose principale est qu'elle soit vraiment objective et impartiale.