mercredi 17 août 2016

L'obstination de la société minière canadienne WWM

La société canadienne WWM est entrée dans une longue guerre judiciaire avec la République du Kazakhstan depuis environ 20 ans. Malgré la logique et le bon sens, elle continue à lutter, aveuglée par des paillettes d'un "veau d'or". Un nouveau cycle de confrontation est apparu en janvier 2016, quand le tribunal arbitral du Canada a examiné et confirmé la demande de WWM contre le Kazakhstan.

Quel est le cœur de la question ? Pour parler brièvement, cet investisseur est venu au Kazakhstan mais n'a pas rempli ses obligations, et pour cette raison se trouva très vite sur la touche. Toutefois, la société WWM est guidée par une logique tout à fait différente et voit l'événement sous un angle différent. À son avis, la raison pour laquelle les problèmes persistent vient du fait que le Kazakhstan a empêché le fonctionnement normal de l'investisseur.

L'histoire a commencé en 1996, lorsque la compagnie canadienne World Wide Minerals a signé un accord avec le Kazakhstan, sur la gestion du complexe d'extraction d'uranium du nord des terres vierges appelé Mining and Chemical Combine (TSGHK). Tout paraissait normal pour la nouvelle république indépendante qui a fait beaucoup d'effort en créant des conditions optimales pour les investisseurs. C'était une question de survie pour le jeune Kazakhstan qui possédait de riches ressources, mais n'avait ni les moyens ni les technologies pour son développement.

Qu'est-il arrivé ? En 1997, la société WWM a lancé un appel au gouvernement du Kazakhstan pour obtenir une licence d'exportation d'uranium pour la vente aux États-Unis. Et cela lui a été refusé. En fait, le droit exclusif de fournir de l'uranium aux États-Unis avait été accordé à la société américaine Nukem Inc.
Notez que craignant que l'uranium peu cher des anciennes républiques soviétiques, y compris celui des ogives nucléaires démantelées, n'entraîne une perte de contrôle du marché, les États-Unis ont eu une politique très agressive. En effet, l'uranium s'échangeait à des prix inférieurs aux coûts de production.

Par conséquent, le ministère du Commerce des États-Unis et de six représentants des pays de la CEI ont signé en 1992, un accord imposant des quotas sur les importations d'uranium aux États-Unis.. Parmi eux, la Russie, l'Ukraine, le Kazakhstan, l'Ouzbékistan, le Kirghizistan et le Tadjikistan. Selon les termes des accords américains, il est donné le droit de restreindre les importations pendant huit ans et de surveiller la transition d'un système de quota vers des importations illimitées pendant deux ans.

Quand les canadiens sont venus en 1996 sur le marché du Kazakhstan, il se pourrait qu'ils n'aient pas été au courant de la situation. En d'autres termes, dans cette affaire, les politiques se sont télescopées.

En conséquence, le Kazakhstan a été contraint de prendre le contrôle de la gestion du complexe nord des mines d'uranium et a résilié le contrat en raison des engagements de WWM de mise en faillite et du lourd passif économique et financier de la TSGHK. La résolution du gouvernement du 30 juillet 1997, relatif au droit de la société de portefeuille de gestion opérationnelle "Tselinny Mining and Chemical Combine" a été traitée par JSC Kazatomprom "NAC".

Cependant, les Canadiens ne lâchèrent pas prise. Un an plus tard, WWM déposa une plainte auprès de la Cour de district des États-Unis contre le Kazakhstan, au motif principal de refus illégal d'accorder une licence pour l'exportation de l'uranium aux États-Unis. La cour, cependant, a souligné que la décision d'émettre ou de ne pas délivrer une licence d'exportation est une action souveraine du Kazakhstan, sur la base des lois nationales et des décrets de cette République.

Le 8 août 2002, la Cour d'appel US a rendu une décision finale d'arrêter le procès, en faveur du Kazakhstan et de "Kazatomprom".

Et puis vint un nouveau cycle de confrontation, qui a débuté en 2016.

En janvier de cette année, le tribunal canadien a confirmé le procès de la société minière canadienne contre le Kazakhstan, ce qui a provoqué un fort refroidissement des relations entre les deux pays.

Astana reste perplexe devant cette décision. Assez curieusement, le tribunal fait allusion au cadre réglementaire de l'Union soviétique. Selon WWM, la signature le 20 juin 1989, au milieu de la perestroïka, d'un accord sur l'encouragement et la protection réciproque des investissements entre l'Union soviétique et le Canada, s'impose au nouvel Etat indépendant. Naturellement, le Kazakhstan tente d'expliquer que le pays a vécu dans une nouvelle réalité géopolitique et que l'ancien accord est illégitime.

Un autre fait intéressant a été ignoré. La Convention de Vienne de 1978 a été mise en vigueur le 6 Novembre 1996 par 19 Etats qui en sont signataires. Le Kazakhstan n'a pas signé ce document. Il semble donc être très controversé de dire que la Convention de Vienne de 1978 est une loi internationale généralement acceptée, créant des obligations contraignantes sur les  tous les principes d'héritage des engagements qui ont été pris par des pays qui n'existent plus. Cela signifie que la décision du Tribunal n'est pas fondée.

Il est un autre point de droit sur lequel il faut porter attention. Les actions du Kazakhstan dans les relations avec le monde des investisseurs du secteur minier sont largement centrées sur la protection de la sécurité nationale. Et dans cette affaire, cet aspect a un net avantage sur les traités.

Après tout, les questions de sécurité nationale ont été motivées par des actions américaines pour maîtriser le marché de l'uranium. C'est ainsi qu'agit tout Etat qui se respecte.
Le non-respect de ses obligations par le secteur minier canadien a donné lieu à une situation complexe. Le non-paiement des salaires, l'arrêt de l'activité, ont conduit au fait que des personnes se sont trouvés dans une situation difficile et on exiger des autorités de rétablir l'ordre. Par ailleurs, le budget n'a pas reçu pas les fonds nécessaires pour le développement. En comprenant que les investisseurs ne remplissent pas leurs obligations, freinent le développement économique et minent la stabilité du pays, le Kazakhstan a été forcé de prendre une décision impopulaire.

En conclusion, il est surprenant que cet ancien investisseur persiste à plaider contre le Kazakhstan. La position du gouvernement du Canada est également frustrante. Au lieu de comprendre cette question complexe, il prend le parti des aventuriers qui veulent voler un pays partenaire.

Tout ceci pourrait porter préjudice à d'autres investisseurs. Par leurs actions, World Wide Minerals peut mettre d'autres investisseurs canadiens travaillant au Kazakhstan dans une position inconfortable. Il faut rappeler que l'accord sur l'encouragement et la protection réciproque des investissements n'a pas été signé jusqu'à présent.

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