mercredi 30 novembre 2016

Bergey Ryskaliyev, acteur majeur du terrorisme au Kazakhstan

La perfide Albion, suite à une longue tradition, fournit à des escrocs des abris de couleurs différentes selon leur éventuelle utilité à la couronne.

Cependant, dans le cas de Bergey Ryskaliyev, fugitif d'Asie centrale qui a trouvé refuge en Grande-Bretagne, l’état de grâce ne s’est pas prolongé jusqu'à présent. Tout d'abord, bien que cet homme est un voleur, il s’est fait connaître du grand public récemment, il ne peut donc pas être comparé aux autres voleurs. D’autre part, il n’est pas suffisamment riche pour entrer dans les sphères les plus élevées. Et par ailleurs, la Grande-Bretagne guindée n'aime pas quand les gens compte sur sa miséricorde en étendant une traînée de crimes sanglants et des allégations de complicité du terrorisme. Elle est attentive à son image.

Cependant à Londres, Bergey est sans aucun droit. Il est en fait proche d’une extradition vers le lointain Kazakhstan, où il s’attend à une punition bien méritée.

Qui est Ryskaliyev? Il n'est pas un délinquant idéologiste, car alors il aurait au moins eu une petite chance. Il est un ancien fonctionnaire administratif. En fait, dans les steppes de la Caspienne, il est devenu un intermédiaire du wahhabisme, idéologie qui pour une raison étrange aime se propager dans les territoires riches en énergie.

En conséquence, étant à la tête de la région d’Atyrau (plus grande région pétrolifère du Kazakhstan), Bergey Ryskaliyev a transformé la région en un foyer de l'extrémisme religieux et du terrorisme. Dans son nid familial qui est le village Makat, ont été organisé des camps d'entraînement pour les militants. En parallèle, il y avait un travail idéologique. Il a été construits illégalement des mosquées, où ont été invités des prédicateurs particuliers. La signification approximative de prédication a été limitée à un seul postulat : la vie des infidèles ne coûte pas un centime, ils peuvent être tués et leurs biens saisis.

Pour autant les tentatives du parquet et des services de renseignement pour endigué le problème, a rencontré une très forte opposition.

La première sonnette d'alarme a sonné au Kazakhstan quand on eu lieu les évènements de Janaozen les 16 et 17 décembre 2011. Rappelons qu’il y a eu des émeutes, provoquées hommes de mains de Bergeyev. A la veille de l'événement qui a tué au moins 16 personnes et blessé des centaines d’autres, sont venus d’Atyrau (région de Mangystau) plusieurs escouades de Ryskaliev dans des véhicules SUV noir. Plus tard, les services secrets ont découvert qu’ils avaient un arsenal d'armes automatiques, ainsi que des explosifs. A Janaozen, une partie de ces forces a été maîtrisée, les autres groupes se sont infiltrés. Les émeutes ont acquis un véritable caractère de masse, y compris avec des tirs en direction des autorités.

Selon les autorités chargées de l'enquête, ce fut une action planifiée afin de déstabiliser la situation politique dans le pays et dans la région. Les experts ajoutent que, dans la théorie du chaos contrôlé - il y avait une tentative de certaines forces pour prendre le contrôle des régions pétrolifères du pays dans le but de faire sortir des concurrents des gisements de Tengiz, Kashagan et Karachakanak. En particulier, certaines structures occidentales étaient embarrassées par l'expansion économique de la Chine dans le secteur énergétique du Kazakhstan.

Il est possible que Bergey Ryskaliyev ait été un pion dans le jeu étrange de quelques autres. Il a probablement trop joué, avec ses contacts avec les terroristes et les extrémistes de tous bords. Il était à la tête d’une petite armée professionnelle, pour faire face à ces questions "sensibles", y compris pour créer une atmosphère de peur et de panique au Kazakhstan. Il est clair que cette année 2011 a été la plus fructueuse dans les attaques terroristes au Kazakhstan, et la tête de ces évènements se trouvait dans la région d'Atyrau.

Ainsi, il est évident que Bergey Ryskaliyev s’est montré fortement comme un homme étroitement associé non seulement avec les milieux criminels (sa garde personnelle est appelée «Makat OPG»), mais aussi à des organisations terroristes internationales.

Certains adeptes se sont aujourd'hui échappés du Kazakhstan et luttent contre la Syrie dans le cadre de l'Etat islamique. Ce seul fait rend l'Angleterre très méfiante de ce fugitif odieux, qu’elle ne serait même pas en mesure de blanchir, même par les groupe de pression les plus professionnelles.

Aujourd'hui pour Londres, la seule chance de sauver la face est d’extrader ce délinquant.

samedi 26 novembre 2016

Taïwan, avant-poste du mariage gay en Asie


Taïwan pourrait être le premier État d’Asie à l’égaliser l’union entre personnes du même sexe. Mais le projet de loi, à l’étude au Parlement, provoque la colère des chrétiens du pays.

Après la France, Taïwan ? Jeudi 17 novembre, une « manif pour tous » a rassemblé près de 10 000 personnes autour du Parlement de Taipei. Les deux associations organisatrices émaneraient de communautés chrétiennes conservatrices, proches des églises évangéliques américaines. Vêtus de blanc, bobs sur la tête, armés de pancartes dénonçant « la destruction de la famille et du mariage »,les manifestants ont expliqué à la presse qu’ils ne s’opposaient pas à la protection des droits des homosexuels, mais réclamaient la tenue d’un référendum et de plus amples discussions. Car Taïwan pourrait être le premier pays asiatique à légaliser le mariage gay.

Deux propositions d’amendements au code civil sont passées en première lecture le 8 novembre. Elles doivent encore subir des examens ultérieurs au sein de comités d’experts avant d’être votées par le Parlement, possiblement en février prochain.

L’électrochoc après le suicide d’un Français gay

La communauté LGBT taïwanaise pensait que la victoire en janvier du Parti démocrate progressiste (DPP) aux législatives et de sa candidate, Tsai Ing-wen, à la présidentielle ferait avancer sa cause. En vain. C’est le suicide à Taipei le 16 octobre d’un Français de 67 ans, Jacques Picoux, dont le compagnon taïwanais venait de décéder des suites d’un cancer, qui a vraiment changé la donne. Professeur de français à la retraite, cet artiste reconnu s’était vu dénier toute implication dans les décisions médicales concernant son conjoint depuis trente-cinq ans, avant d’être privé de tout droit sur leur logement commun. L’électrochoc provoqué par sa mort dans l’opinion a poussé une députée du DPP à soumettre un projet de loi.

Près de 80 000 personnes ont ensuite défilé fin octobre à Taipei lors de la Marche annuelle des fiertés, la plus fréquentée d’Asie. Dans les sondages, l’opinion publique se révèle en majorité favorable, ou indifférente, à l’ouverture du mariage aux couples de même sexe, avec un très fort taux d’approbation chez les jeunes. Quant aux députés (Taïwan n’a pas de Sénat), plus de la moitié d’entre eux seraient à ce stade prêts à voter l’un ou l’autre des amendements proposés.

Mais l’initiative n’en rencontre pas moins des résistances. L’opposition parlementaire, représentée par un Kuomintang (KMT) très divisé depuis son cuisant échec aux élections de 2016, semble hésiter entre défendre son propre projet d’amendement – proposé par l’un de ses députés pro-mariage gay – et gêner autant qu’il le peut la majorité, en réclamant des auditions publiques. Son porte-parole a profité de la manifestation surprise du 17 novembre pour s’attaquer à la présidente. Il l’a accusée de soutenir la « tentative de détruire le mariage hétérosexuel » au mépris des procédures démocratiques (le DPP a la majorité absolue au Parlement). Si elle le fait, a-t-il persiflé au sujet de Tsai Ing-wen, célibataire, c’est qu’elle a « une orientation homosexuelle à 99 % ».

Par Brice Pedroletti le 25/11/2016 sur www.lemonde.fr

L’élection de Donald Trump annonce la guerre commerciale en Asie

Le président nouvellement élu des États-Unis, Donald Trump, a de fait coulé le Partenariat Trans-Pacifique (PPT), le vaste accord sur le commerce et l'investissement qui constituait la pièce maîtresse du volet économique du « pivot vers l'Asie » contre la Chine du président Barack Obama. Dans sa brève vidéo de lundi sur les politiques qu'il suivra, Trump a confirmé son protectionnisme de « l'Amérique d'abord » en déclarant que le premier jour de sa présidence il émettrait une note d'intention de se retirer de l'accord.

L'annonce de Trump a été un camouflet pour les alliés des américains et les partenaires du TTP rassemblés au sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique (APEC) du week-end dernier au Pérou. Ce sommet avait exhorté le président élu à reconsidérer sa position. La décision ne peut que renforcer l'incertitude dans les capitales asiatiques dans le sillage de l'élection de Trump qui a non seulement mis en question le « pivot » d'Obama, mais la base de l'ordre d'après-Seconde Guerre dans l'Asie-Pacifique, en particulier du Traité de sécurité américano-japonais.

Au cours de la campagne électorale américaine, Trump a critiqué à maintes reprises le Japon, ainsi que la Chine, comme des partenaires commerciaux déloyaux et, avec la Corée du Sud, a suggéré qu'ils ne payaient pas assez pour le coût des bases militaires américaines sur leur sol. Il a vertement critiqué l'alliance américaine avec le Japon en disant : « Si quelqu'un attaque le Japon, nous devons aller commencer la Troisième Guerre mondiale […] Si nous sommes attaqués, le Japon n'est pas obligé à nous aider ».

Quelques heures avant la sortie de la vidéo politique de Trump, le Premier ministre japonais Shinzo Abe a déclaré que le TPP serait « vide de sens sans les États-Unis ». Il a refusé les idées de continuer la formation du bloc sans participation américaine émises par d'autres partenaires du TPP qui assistaient à l'APEC. Sans les États-Unis et le Japon, respectivement la plus grande et la troisième plus grande économies du monde, le TTP ne sera qu'une ombre de lui-même, si jamais il survit.

En fait, le TTP n'a jamais été un accord de « libre-échange ». C'était le moyen par lequel Washington cherchait à saper l'influence économique chinoise et à consolider sa propre domination en Asie et à l'échelle internationale. Comme l'a déclaré Obama, le TPP devait veiller à ce que les États-Unis, et non la Chine, écrivent les règles de l'économie mondiale du XXIᵉ siècle. Il comprenait la protection de la propriété intellectuelle américaine, des dispositions pour que les sociétés américaines puissent poursuivre les gouvernements en justice si les réglementations nationales réduisent leurs bénéfices, et des mesures contre les entreprises publiques.

Le TPP a toujours fait partie intégrante de l'offensive diplomatique de l'administration Obama et des préparatifs militaires en Asie-Pacifique pour la guerre avec la Chine. Le secrétaire à la défense d'Obama, Ashton Carter, a souligné son importance stratégique en déclarant que le « TPP est aussi important pour moi qu'un porte-avions supplémentaire ». Le renforcement militaire en Asie a inclus le renforcement des alliances dans toute la région, l'extension des bases militaires en Australie, aux Philippines et à Singapour, et prévoit de placer 60 pour cent des actifs navals et aériens dans la région Asie-Pacifique d'ici 2020.

Loin de se retirer, Trump prépare une guerre commerciale contre la Chine qui intensifiera considérablement les tensions dans toute l'Asie et augmentera le danger de guerre. Il a menacé de qualifier officiellement la Chine de « manipulateur de devises », ce qui ouvrirait l'imposition de droits de douane punitifs allant jusqu'à 45 pour cent sur les exportations chinoises vers les États-Unis. Un éditorial du journal belliciste Global Times dont l'État chinois est le propriétaire a suggéré en représailles : « Un lot de commandes de Boeing sera remplacé par Airbus, les ventes d'automobiles et d'iPhones aux États-Unis subiront un recul et les importations américaines de soja et de maïs seront stoppées ».

Les mesures commerciales punitives de Trump auront un effet non seulement sur la Chine, mais aussi sur des alliés des États-Unis comme le Japon, la Corée du Sud et l'Australie, pour lesquels la Chine est le plus grand partenaire commercial. Selon Daiwa Securities, un droit de douanes de 15 % sur les marchandises chinoises entraînerait une chute de 1 % de la croissance économique chinoise et une baisse importante des taux de croissance de ses partenaires commerciaux.

Au milieu de l'incertitude aiguë qui suit l'élection de Trump, les gouvernements d'Asie et du monde entier sont contraints de réévaluer leurs stratégies économiques et militaires.

Le Premier ministre japonais Abe et d'autres dirigeants étrangers ont déjà prévenu que si Trump tue le TPP, ils seront obligés de travailler avec la Chine pour conclure son accord commercial rival, un partenariat économique régional (RCEP). Comme l'a souligné à juste titre Abe avant la réunion de l'APEC, le RCEP comprend la plupart des pays asiatiques ainsi que l'Australie et la Nouvelle-Zélande, mais pas les États-Unis.

En déclarant que le TPP serait « vide de sens » sans les États-Unis, Abe a effectivement exclu un bloc commercial que le Japon mènerait de facto et qui poserait ainsi un autre défi à l'hégémonie américaine en Asie. S'il se peut qu'Abe ne soit pas prêt à affronter Washington, d'autres dans l'élite dirigeante japonaise suggèrent déjà que Tokyo doit envisager une défense plus agressive de ses propres intérêts économiques et stratégiques.

Shigeru Ishibi, un personnage puissant au sein du Parti libéral-démocrate au pouvoir dont il a deux fois brigué la direction contre Abe, a déclaré lundi que le Japon devrait adopter une approche différente après l'arrivée au pouvoir de Trump. « Le Japon ne peut pas simplement rester assis et se soumettre aux ordres des États-Unis. Nous devons faire des propositions actives et réformer rapidement notre politique étrangère là où cela est nécessaire », a-t-il déclaré. Mais il n'a pas suggéré la fin du Traité de sécurité entre les États-Unis et le Japon. Ishibi a appelé à une préparation intégrale et à une plus grande fermeté de la part de Tokyo.

Les mesures agressives de guerre commerciale de Trump exacerberont considérablement les rivalités géopolitiques dans toute la région, elles pourraient mettre les États-Unis en conflit non seulement avec la Chine, mais aussi avec leurs alliés traditionnels comme le Japon. En déclin historique, Washington n'a plus le pouvoir économique pour imposer la loi en Asie ou ailleurs et est obligé de recourir à des moyens militaires.

Trump a déjà indiqué qu'il va se focaliser sur le renforcement militaire des États-Unis en élargissant l'armée de 90 000 personnes et la marine de 40 à 350 navires de guerre. Le conseiller de Trump Rudy Giuliani s'est vanté la semaine dernière : « À 350, la Chine ne peut pas nous égaler dans le Pacifique […] Si vous les affrontez avec une armée moderne, gigantesque, écrasante et incroyablement bonne dans la guerre conventionnelle et asymétrique, ils pourraient bien la défier. Mais j'en doute.

En réalité, l'administration Trump s'apprête à lancer une guerre commerciale et une course aux armements en Asie qui risque de déclencher un conflit militaire ouvert. Les racines de cette poussée accélérée vers la guerre ne se situent pas dans la personnalité de Trump, mais dans la crise profonde du capitalisme mondial qui pousse les puissances mondiales et régionales à en imposer le fardeau à leurs rivaux à l'étranger et à la classe ouvrière à l'intérieur.

Par Peter Symons le 26/11/2016 sur www.wsws.org

dimanche 20 novembre 2016

Entre la Chine et la Russie : les enjeux de l'Asie Centrale

Prenons le large ce matin, éloignons-nous de l’Amérique de Monsieur Trump, des incertitudes de l’Europe post brexit, et de la guerre au Moyen Orient. Partons à la découverte de ces pays qui sont à la charnière géographique, politique, économique de plusieurs empires et qui tentent, chacun à sa manière, d’en tirer le meilleur profit.

Kazakhstan, Kirghizistan, Tadjikistan, Ouzbékistan, Turkménistan : ces 5 pays d’Asie centrale, à majorité musulmane, conjuguent plusieurs des défis que la mondialisation impose aux émergents, tout en s’accommodant tant bien que mal, des ambitions rivales de la Russie et de la Chine. Indépendants depuis l’écroulement de l’Union Soviétique, il y a 25 ans, ces 5 pays en « -stan », comme le disent certains experts, sont aux mains de dictateurs, formés à l’ancienne, inquiets des visées djihadistes venus de l’Afghanistan voisin.

Jusqu’où le Kremlin a-t-il gardé la main sur ces pays frontières ? Comment la Chine cherche-t-elle maintenant à imposer son jeu ? Les pays d’Asie centrale font-ils partie commune ou rivalisent-ils, en fonction de leurs atouts, énergétiques, en particulier ? Que font là-bas les États-Unis et l’Europe ?

Face à Trump, la Chine veut imposer sa vision du libre-échange en Asie

Pékin propose à ses partenaires d'Asie de nouveaux accords commerciaux pour remplacer le projet de Partenariat transpacifique (TPP), compromis par l'élection de Donald Trump.

La Chine prépare le plan B pour contrer Donald Trump. Depuis le sommet de l'Organisation de coopération économique Asie-Pacifique (Apec) qui se tient au Pérou, Pékin a fait savoir à ses partenaires commerciaux de la région Asie-Pacifique qu'elle était prête à assumer le leadership des négociations de libre-échange face aux projets protectionnistes du président américain élu. «Nous n'allons pas fermer la porte au monde extérieur mais l'ouvrir encore plus largement, a lancé le président chinois Xi Jinping. Nous allons nous assurer que les fruits du développement soient partagés».

Ce dernier a appelé les dirigeants de cette partie du monde à soutenir les initiatives chinoises de libre-échange en Asie-Pacifique, pour combler le vide laissé par le probable abandon de l'accord de libre-échange TPP par les États-Unis. Le TPP, signé en 2015 par 12 pays (États-Unis, Canada, Mexique, Chili, Pérou, Japon, Malaisie, Vietnam, Singapour, Brunei, Australie et Nouvelle-Zélande), sous l'impulsion de Barack Obama, exclut la Chine. Il vise à harmoniser les normes entre ces pays et supprimer des droits de douane. Aux États-Unis, le processus est compromis par l'arrivée au pouvoir de Donald Trump qui pendant toute sa campagne a fustigé ce «terrible» accord commercial et promis à son électorat un tour de vis protectionniste pour protéger les emplois américains contre la concurrence de la Chine ou du Mexique.

Le RCEP comme alternative
À Lima, la Chine a donc proposé à ses partenaires une autre solution portant le nom d'Accord de partenariat économique régional intégral (RCEP), accord de libre-échange entre les dix états membres de l'Association des nations du sud-est asiatique (Asean) et six autres États, dont la Chine et le Japon...mais pas les États-Unis. La signature de ce RCEP est présentée par Pékin comme une première étape essentielle dans la construction d'une Zone de libre-échange de l'Asie-Pacifique (FTAAP) qui rassemblerait tous les pays membres de l'Apec. «Nous allons pleinement nous investir dans la globalisation économique en soutenant le commerce multilatéral, en faisant avancer la FTAAP, en travaillant à la conclusion rapide des négociations sur le RCEP. La construction d'une Zone de libre-échange de l'Asie-Pacifique est une initiative stratégique vitale pour la prospérité à long terme de la région. Nous devons nous y atteler fermement», a déclaré Xi Jinping.

«Le pacte chinois de libre-échange ne compensera pas l'échec du TPP»

L'Australie s'est déjà montrée sensible à la proposition chinoise de RCEP. «C'est un accord plus traditionnel, qui réduit les droits de douane sur les biens et les services. Il ne va pas aussi loin que le TPP mais plus nous avons accès à plus de marchés pour nos exportations, mieux c'est», a déclaré le premier ministre australien Malcolm Turnbull. Mais certains pays, comme le Mexique, le Japon ou la Malaisie entendent bien appliquer le TPP, avec ou sans les États-Unis. D'autres appellent à en revoir les termes. Le premier ministre néo-zélandais, John Key, a ainsi suggéré d'y incorporer «des changements cosmétiques» pour rendre l'accord acceptable pour Donald Trump. «Le Partenariat Trump Pacifique par exemple, ce serait bien», a-t-il lancé en riant.

«Le pacte chinois de libre-échange ne compensera pas l'échec du TPP qui représente un coup dur pour les perspectives économiques de l'Asie émergente. Ses bénéfices pour la région seront probablement bien moins importants», prévient le cabinet Capital Economics dans une note d'analyse. En revanche, une chose est sûre: «le retrait des États-Unis a créé une opportunité pour la Chine d'accroître son influence en Asie», estime ce dernier.

Par Hayat Gazzane sur www.lefigaro.fr le 20/11/2016

mercredi 16 novembre 2016

Resserrer les liens entre l'Europe et l'Asie


L’accord de libre-échange entre l’UE et l’Asean, négocié en 2014, est toujours bloqué. Il est pourtant essentiel que l’Europe renforce ses échanges commerciaux avec ses partenaires asiatiques.
Pour la première fois, les Rencontres économiques sont organisées à Singapour, sur le campus de l'Essec, avec des personnalités françaises, européennes, singapouriennes et asiatiques. Au moment où elle semble mal en point, l'Union européenne se doit d'être conquérante.

Le 23 juin 2016, 51,89 % des Britanniques ont voté pour le Brexit. Secouée, l'UE est à la recherche d'un nouveau souffle tout en faisant face aux turbulences de l'économie mondiale. Les défis ne manquent pas : vieillissement de la population mondiale, ralentissement des gains de productivité, bouleversement numérique ou encore accroissement des inégalités. Comment envisager de surmonter ces défis majeurs sans une coopération internationale de qualité ?

«Période d'incertitude économique»

L'élection de Donald Trump et le Brexit sont des victoires du protectionnisme. Pourtant, un repli de chacun ne saurait être une solution contrairement à ce que l'on voudrait faire croire aux citoyens. Notre monde va changer, les bouleversements vont se succéder et l'UE ne peut rester passive et autocentrée. Elle doit combattre ses démons tout en entamant une véritable opération de séduction ; saisir les nouvelles opportunités que le départ britannique et le repli américain lui offrent, et notamment tourner son regard vers l'Amérique latine, l'Afrique et l'Asie.

L'Asie, justement, nous observe. Tharman Shanmugaratnam, vice-Premier ministre et ministre des Finances de Singapour, déclarait quelques jours après le vote anglais devant son Parlement : «Dans les prochaines années, nous devons nous attendre à une période d'incertitude économique [...]. Nous allons continuer à observer attentivement ces développements, nous préparer à leurs conséquences pour Singapour et en tirer des leçons.»

Les échanges commerciaux entre l'UE et l'Asean sont significatifs et Singapour est notre premier partenaire au sein de l'Asean. Pourtant l'accord de libre-échange négocié en 2014 est bloqué par un conflit entre la Commission européenne et le Conseil de l'Union européenne dans l'attente d'un arbitrage de la Cour de justice de l'UE. Comment ne pas le regretter quand on sait que l'Asean est le troisième partenaire commercial de l'UE et représente près de 600 millions de consommateurs ?

Faire des membres de l'Asean nos alliés

Il nous paraît également essentiel de renforcer nos coopérations culturelles et scientifiques entre nos deux régions, formidables réservoirs de talents. Garantir des connaissances fondamentales à tous les élèves, tenir compte des progrès technologiques, positionner les universités à la pointe de la recherche et de l'innovation : autant de défis en matière d'éducation, fondement de nos sociétés, à relever ensemble.

Plus que jamais nous devons être les leaders d'une gouvernance mondiale.

L'UE et l'Asean devront, dans les années à venir, être les figures de proue de la gouvernance économique mondiale et notamment monétaire. On le sait, le système monétaire international reflète des intérêts nationaux et des rapports de force parfois dangereux. L'élection américaine du 8 novembre et les suspicions autour du renminbi peuvent effrayer. Dans ce nouveau contexte, les pays membres de la zone euro ont une responsabilité majeure et ceux de l'Asean doivent être nos alliés. Michel Aglietta appelle à « une coopération monétaire et une liquidité ultime universelle qui ne soit la dette d'aucun pays » : nous devons l'entendre.

Plus que jamais nous devons être les leaders d'une gouvernance mondiale repensée cherchant à renouer avec une prospérité inclusive. L'Union européenne est un modèle et nous aurions tort de renoncer à être cet exemple unique de coopération et de paix. C'est ce que le Cercle des économistes, l'Essec et Paris Europlace vont défendre aux côtés de The Economic Society of Singapore lors des Rencontres économiques de Singapour les 24 et 25 novembre prochain. C'est notre responsabilité d'Européens et de Français, le monde nous regarde.

Jean-Michel Blanquer est directeur général de l'Essec Business School.
Par Jean-Hervé Lorenzi, président du Cercle des économistes, le 16/11/2016 sur www.lesechos.fr

Le Kazakhstan fait la promotion de son idée du G-Global

L'environnement international actuel est largement caractérisée par l'influence d'un certain nombre de facteurs d'instabilité. La poursuite de l’élargissement de zones de conflit dans diverses parties du globe forme une nouvelle gamme de défis dans l'économie mondiale, de nouveaux défis émergents à caractères démographique et civilisationnelle. La solution efficace à ces problèmes nécessite la révision du système de contrôle datant du XXe siècle et concernant l'amélioration des outils, à la fois économique et politique.

Dans la réalité actuelle, on ne peut pas nier que certains des mécanismes mondiaux de coopération "lourds" utilisés doivent être améliorés. Souvent, l’un des objets de cette critique est l'Organisation des Nations Unies, lorsqu’il est cité son incapacité à éviter un scénario négatif, et qu’elle est sans réelle capacité à arrêter la violence dans diverses parties du monde. La modernisation du dialogue international n’exigent pas uniquement une plate-forme institutionnelle. Surmonter les défis clés du monde moderne est impossible sans la modernisation des méthodes elles-mêmes et l'application d’instruments modernes adéquats.

Les conflits de la dernière décennie, ainsi que les processus turbulents en cours dans l'économie mondiale obligent les dirigeants de tous les États à développer leurs propres solutions plus acceptables. Une plus grande valeur doit être attribuée aux projets qui peuvent être utiles non seulement à un pays ou à une région en particulier, mais aussi à ceux qui peuvent offrir des solutions efficaces aux problèmes clés des processus actuels.

Une telle initiative de création d’une plate-forme mondiale de communication a été proposée lors du «G-Global» en 2011 par M. Nazarbaïev. Cette organisation unique est conçue pour consolider la communauté mondiale tout entière. «G-Global» n’est pas un exemple du «big seven», «huit», ou même «vingt», il est destiné à unir tous les pays, sans exception, et non pas en les divisant en pays majeurs et mineurs. Au Kazakhstan, on pense que le projet «G-Global» ne constitue pas une alternative aux groupes établis du G8 ou du G20, c’est un instrument supplémentaire de dialogue mondial.

Il est prévu que ce projet donnera un nouvel élan à la recherche de solutions globales anticrises et générera des opportunités de participation à toutes les entités de la communauté internationale pour un dialogue ouvert. Le chef kazakh a invité tous les pays à concentrer tous leurs efforts sur le développement d'une stratégie pour l'ensemble du globe, afin de débarrasser le monde de la menace de la guerre et éliminer ses causes possibles.

Actuellement, la plate-forme de communication «G-Global» est une plate-forme en ligne multifonctionnelle où les esprits du monde s’unissent pour discuter des enjeux du développement mondial.

Le Kazakhstan reçoit actuellement des propositions de scientifiques et d'experts de différents pays sur la nécessité urgente de tenir le premier forum «G-Global» durant la période de l'exposition internationale "EXPO-2017", qui se tiendra à Astana en 2017. Il est estimé que cette conférence sera en mesure de rassembler sur sa plate-forme des responsables politiques, des experts et des représentants d'organisations internationales.

L’ancien ministre des affaires étrangères, Lord Douglas Hurd, a vérifié que l'initiative du chef de file kazakh est tout à fait réaliste. Il considère particulièrement pertinente l'idée de l'adoption du plan mondial de lutte contre la crise, qui a été discuté lors du Forum économique d'Astana, et convenu que le terrorisme, la migration et d'autres phénomènes négatifs sont des conséquences de la crise économique, la pauvreté, l'analphabétisme et le chômage, et qu’ensemble, il est possible de résoudre ces problèmes.

Comme indiqué par les observateurs internationaux et exprimé par son Président, la République du Kazakhstan offre la projection d'une expérience réussie dans le monde. Le Kazakhstan réaffirme effectivement son attachement à un concept global de sécurité, les questions de sécurité concernant l'interdépendance, les droits de l’Homme et le développement durable. Face à des processus de crise et de confrontations géopolitiques, avec ses idées anticrises, le dirigeant kazakh reconquiert une dimension pratique pour la communauté mondiale.

Rappelons que cet été, le Kazakhstan a été élu membre non-permanents du Conseil de sécurité de l'ONU pour les années 2017-2018. De la tribune du Conseil de sécurité des Nations unies, ce pays prévoit de promouvoir activement des approches efficaces dans le domaine de la sécurité mondiale et un environnement stable pour le développement, y compris ceux liés aux principes du «G-Global».

Les experts internationaux estiment que l'initiateur du projet «G-Global», est certainement en mesure d'apporter de la fraîcheur au dialogue mondial et de définir à un rythme soutenu, des réponses optimales aux défis et aux menaces émergentes. Le Kazakhstan, en dépit de sa courte histoire en tant que pays indépendant, jouit d'une très solide expérience en matière de sécurité internationale. Astana a maintes fois préconisé des initiatives progressistes, des perspectives pour lesquelles la communauté internationale qu’on ne peut parfois pas évaluer immédiatement.

lundi 14 novembre 2016

La mer d'Aral face à un nouveau danger

Le consortium international formé de la holding nationale ouzbèke "Uzbekneftegaz", la société russe "Lukoil" et la CNPC de Chine, ont l'intention de procéder en 2017 à une exploration plus poussée puis au développement de gisements d'hydrocarbures dans la mer d'Aral. Actuellement, le travail d'exploration est en phase finale. Cette année, il est prévu de forer deux puits d'appréciation, en tenant compte des résultats des forages sismiques et d'exploration.

En 2005, le consortium international «Operating Company Aral Sea» JV a été fondé en tant qu'opérateur des travaux d'exploration. À ce jour, l'évaluation des réserves d'hydrocarbures des forages ouverts et validés s'élèvent à 16 millions de tonnes équivalent pétrole.

Le développement intensif de plus de champs de pétrole et de gaz entraînera une aggravation du séchage artificiel de la mer d'Aral et de la détérioration de la situation écologique dans la région de la mer d'Aral.

Dans ce contexte, les spécialistes en écologie prédisent les facteurs négatifs suivants:

Premièrement, la partie de la mer d'Aral qui retient actuellement de l'eau, est située dans une zone probable de forages selon une enquête et les travaux d'évaluation. Ces derniers sont nommés "Umid", "Western Aral" et "Ak-Tepe." Le pompage artificiel serait conduit sur une partie peu profonde au nord de la mer d'Aral Sud.

Deuxièmement, étant donné que les vents annuels et saisonniers sont les plus forts de la région, il y a un risque de soulever la poussière, le sel et d'autres produits chimiques des zones de pompage. Ceci pourrait avoir un impact négatif sur le climat, la situation biologique et démographique de la région.

Troisièmement, les caractéristiques du terrain sur lequel sont censés se trouver les gisements d'hydrocarbures, peuvent nécessiter une expansion du travail technique de pompage dans les profondeurs des eaux de la mer d'Aral.

À cet égard, le travail d'évaluation des perspectives à l'est de la mer d'Aral qui ont été menées par l'opérateur depuis le début du projet, soit à partir de 2006 et jusqu'à 2011, ont été infructueuses. En l'absence des réserves d'hydrocarbures attendus, les développeurs ont décidé de poursuivre l'exploration dans la direction nord-ouest, soit dans les blocs "Aral West" et "Umid". Les perspectives découvertes de réserves de gaz montrent qu'à moyen terme va commencer la prospection de nouveaux sites en utilisant des techniques plus agressives, contenant des risques graves pour le système écologique de la région. Il est à noter que près de 25% des zones visées sont  en eau profonde (jusqu'à 40 mètres), 25% en zone côtière, et seulement 50% dans les terres.

Il convient de noter que l'intention des principaux investisseurs étrangers participant à la mise en œuvre du projet est dictée par des intérêts géopolitiques plutôt que des calculs économiques.

vendredi 11 novembre 2016

Chine : Pékin attend de Trump un "rééquilibrage" en Asie, mais aurait préféré Clinton

Et la Chine dans tout ça ? Suite à l'élection du candidat républicain Donald Trump à la Maison Blanche ce mercredi 9 novembre, la question est « importante », prévient le quotidien singapourien. Les autorités chinoises, précise-t-il, attendent de savoir ce que ce dernier fera de la stratégie en Asie-Pacifique mise en place sous son prédécesseur démocrate Barack Obama.

En effet, le gouvernement de Pékin croit fortement dans la « volonté affichée » du nouveau président de « réduire le rôle de gendarme du monde des Etats-Unis » et de « démanteler son système d'alliance avec des pays comme le Japon ». Avec en ligne de mire l'infléchissement, voire la fin de la stratégie du « pivot » asiatique (voir notre article sur le sujet) aujourd'hui en place. Cette dernière est largement perçue à Pékin « comme un moyen de freiner la montée en puissance de la Chine ».

Malgré cette volonté de voir un rééquilibrage se mettre en place sous une présidence Trump, le gouvernement chinois « appliquant à la lettre sa politique de non-interférence dans les affaires internes des autres pays », n'a officiellement jamais soutenu un candidat plutôt qu'un autre dans la course à l'élection.

Aujourd'hui, note le Straits Times, la présidence Trump se dessine alors qu'il y a eu ces derniers temps « une approbation sensible » en Chine de la candidature de la démocrate Clinton. En cause, les« inquiétudes croissantes de l'impact qu'une présidence Trump pourrait avoir sur le pays. » En effet, les « politiques protectionnistes » qu'il défend ainsi que « sa possible mauvaise gestion de l'économie intérieure », pourraient perturber une « économie chinoise déjà mal en point du fait du difficile équilibre entre réformes et croissance. » Ces mêmes politiques pourraient aussi amener les Etats-Unis à réduire leurs obligations internationales et augmenteraient alors la pression sur la Chine pour « qu'elle comble le vide », et ce avant même qu'elle ne soit prête ou préparée à le faire.

Egalement, Pékin voit d'un mauvais œil le fait que le président Trump puisse permettre à ses « alliés coréen et japonais » de se constituer en force nucléaire pour faire face aux menaces posées par la Corée du Nord. Un tel scénario, prévient le journal de Singapour, entraînerait « une course aux armements nucléaires »  qui  « augmenterait d'autant les tensions dans la région et fragiliserait la croissance chinoise. »

Enfin, il faudra également compter avec l'axe Washington-Moscou du fait « de l'admiration non dissimilée du nouveau président américain pour Vladimir Poutine. »

Ainsi, pour toutes ses raisons, les décideurs politiques chinois étaient plutôt enclins à préférer une victoire de la candidate démocrate – et ont pour cela également demandé aux journaux locaux de limiter leur couverture de l'élection comme le rapporte le South China Morning Post. Une préférence à contre-courant de la population chinoise qui elle acclame en masse le candidat républicain (84 % contre 9 % pour Hillary Clinton), selon un sondage en ligne réalisé par le quotidien chinois Global Times ce 9 novembre à 3 heures du matin heure locale.

De même, l'élection américaine fût l'un des sujets les plus discutés sur le réseau social chinois Sina Weibo avec plus de 615.000 commentaires et quelques 2 millions de vues – dont l'utilisateur nommé hk5066 pour qui « un homme fou va changer le monde. »

Victoire de Trump: une perspective angoissante pour l'Asie

Le Japon, la Corée, l’Asie du Sud-Est craignent notamment une remise en cause des accords de sécurité les liant à Washington.
Mercredi, les bourses asiatiques ont été parmi les plus sévèrement touchées par la victoire de Donald Trump, à laquelle elles n'avaient jamais semblé croire. Tokyo a ainsi plongé de 5,3%, Séoul de 2,5%. Dans les prochains jours, les investisseurs devraient rester très fébriles tant ils redoutent les projets économiques et diplomatiques du prochain président américain.

Tokyo, Séoul mais aussi plusieurs capitales d'Asie du Sud-Est ont été effarées, ces derniers mois, par les prises de position isolationnistes de Donald Trump qui semble décidé à remettre en cause la stratégie de pivot vers l'Asie d'Obama développée pour contenir les ambitions chinoises dans la région.

Les gouvernements japonais et sud-coréen craignent particulièrement une renégociation des accords de sécurité qui les lient depuis des décennies aux Etats-Unis et sur lesquels ils ont construit leurs propres stratégies de défense. « Donald Trump devrait toutefois réaliser rapidement qu'il a besoin de ces alliances. Mais il pourrait essayer d'exiger plus de contributions financières des deux pays », expliquait, mercredi, James Curran, un professeur de l'Université de Sydney.

Pendant la campagne, l'homme d'affaires a maintes fois accusé ses deux principaux alliés d'Asie de l'Est de profiter « gratuitement » d'une très coûteuse protection militaire américaine, alors que le Japon et la Corée du Sud couvrent déjà une large partie des dépenses liées à la présence de 80.000 militaires américains sur leurs territoires. Cette année, le coût pour Tokyo atteindra 192 milliards de yens (1,7 milliard d'euros).

Les puissances d'Asie, qui ont largement basé, ces dernières années, leur croissance sur la mondialisation, redoutent par ailleurs que cette stratégie du repli sur des enjeux intérieurs promise par Donald Trump ne se traduise par une poussée de protectionnisme. Les pays d'Asie-Pacifique signataires du Partenariat transpacifique (TPP) ont déjà intégré que le pacte, négocié pendant plus de sept ans, ne serait pas validé aux Etats-Unis sous le mandat Trump. Et que les perspectives de poussées des échanges et de mises en commun de standards sociaux, sanitaires ou économiques étaient perdues.

Pire, de nombreux grands groupes asiatiques craignent une hausse des tarifs douaniers sur leurs produits entrant sur le marché américain, notamment pour les véhicules assemblés au Mexique. Mercredi, Honda a perdu près de 8%, Hyundai plus de 3%.

Leurs homologues chinois sont plus stressés encore après les prises de position très dures du futur occupant de la Maison Blanche. « L'idée qu'il pourrait imposer un tarif douanier de 45% sur la Chine sans provoquer de guerre commerciale est toutefois une fantaisie. Là aussi, Donald Trump va vite se retrouver rattrapé par la réalité et comprendre qu'il doit adopter des politiques responsables », tranche Aaron Connelly du Lowy Institute. Mais il note qu'un éventuel assouplissement du protectionnisme promis par Donald Trump risque d'être très mal vécu par son électorat.

Par Yann Rousseau sur www.lesechos.fr le 09/11/16

lundi 7 novembre 2016

La Chine muscle son contrôle du web

Le Parlement chinois a adopté lundi une loi controversée sur la cybersécurité, resserrant le contrôle de la liberté d'expression sur l'internet et imposant aux entreprises, y compris étrangères, de coopérer pour « protéger la sécurité nationale ».
Le Parti communiste chinois (PCC) au pouvoir bloque l'accès depuis la Chine à de nombreux sites internet étrangers (dont Google, Facebook, Twitter, YouTube, Instagram ou Dailymotion) grâce à un système très perfectionné de blocage, surnommé la « Grande muraille électronique ».
Des articles, blogues, forums internet ou commentaires sur les réseaux sociaux chinois peuvent également être effacés ou censurés.
La loi adoptée lundi par le comité permanent de l'Assemblée nationale populaire (ANP, Parlement chinois) donne un cadre légal à cette surveillance. Elle est centrée sur la protection des réseaux nationaux et des données personnelles des 710 millions d'internautes chinois.
Mais le texte interdit également aux utilisateurs d'internet la publication de contenus portant atteinte à « l'honneur national », « troublant l'ordre économique ou social » ou destinés à « renverser le système socialiste », c'est-à-dire le PCC.
La loi, qui entrera en vigueur le 1er juin 2017, exige par ailleurs des entreprises de l'internet opérant en Chine, y compris les firmes étrangères, qu'elles vérifient l'identité de leurs utilisateurs, lesquels ne pourront plus rester anonymes sur la toile.
Les entreprises devront également fournir « un soutien technique et une aide » aux autorités lors d'enquêtes pour des crimes et délits.
« Beaucoup d'incertitudes »
« Cette loi dangereuse somme les entreprises de l'internet d'être de facto des agents de l'État, en leur demandant de censurer et de fournir des données personnelles aux autorités », a estimé Patrick Poon, chercheur à l'organisation Amnistie internationale.
Des acteurs du monde économique et des ONG ont dénoncé les formulations jugées vagues du texte. Des compagnies étrangères s'inquiètent notamment de devoir coopérer avec les autorités pour « protéger la sécurité nationale ».
La Chambre de commerce de l'Union européenne en Chine s'est dite « préoccupée » par la nouvelle loi, qui entraîne « beaucoup d'incertitudes et de réactions négatives dans les milieux d'affaires » et pourrait « entraver les investissements et les entreprises étrangères opérant en ou avec la Chine ».
Zhao Zeliang, le directeur du Bureau de coordination sur la cybersécurité à l'Administration chinoise du cyberespace, a assuré que les nouvelles réglementations ne visaient pas à limiter l'entrée en Chine de technologies et de produits étrangers.
« Certains amis étrangers jugent (la nouvelle loi) synonyme de barrière commerciale. C'est une interprétation erronée, un préjugé », a-t-il estimé.
« En danger »
La Chine bloque ou censure depuis longtemps les contenus sur l'internet. Mais les restrictions ont été renforcées depuis 2013, dans le cadre d'une vaste campagne visant ceux qui « propagent des rumeurs en ligne ». Des centaines de journalistes ou blogueurs ont été emprisonnés ou intimidés dans ce cadre.
Depuis des mesures adoptées en septembre 2013 et visant à museler les réseaux sociaux, les internautes chinois risquent jusqu'à trois ans de prison pour des messages jugés diffamatoires publiés plus de 500 fois ou consultés plus de 5000 fois.
Des commentaires publiés sur les réseaux sociaux ont été utilisés à plusieurs reprises durant des procès de militants. L'avocat des droits de l'homme Pu Zhiqiang avait notamment été jugé pour des messages dans lesquels il fustigeait les autorités communistes.
« Si l'expression et la confidentialité sur l'internet sont les baromètres de l'attitude de Pékin face à ceux qui la critiquent, alors tout le monde - y compris les internautes en Chine et les principales entreprises étrangères - est aujourd'hui en danger », a estimé Sophie Richardson, directrice Chine de l'ONG Human Rights Watch (HRW).
Sur www.lapresse.ca le 07/11/2016