lundi 30 mai 2016

L'Inde engage un rapprochement stratégique avec l'Iran

New Delhi investit dans un port en Iran qui ouvre la voie vers l’Asie centrale. La diplomatie de Narendra Modi cible clairement la Chine.

Pour son deuxième anniversaire à la tête de l'Inde, Narendra Modi s'est, en quelque sorte, arrêté à New Delhi. Car le Premier ministre voyage beaucoup. A peine est-il rentré d'une visite historique en Iran qu'il s'apprête à repartir aux Etats-Unis, où il va effectuer son quatrième voyage depuis son élection. S'il a endossé à ce point son costume de grand voyageur, c'est certes pour faire davantage entendre la voix de l'Inde mais c'est tout autant pour ne pas laisser le champ libre à son voisin chinois. Narendra Modi comme le président chinois Xi Jinping sont au coude à coude en Asie du sud-est, en Afrique et au Moyen-Orient.

Le voyage en Iran que Narendra Modi vient d'effectuer en début de semaine est sur ce point tout à fait caractéristique. Parmi les douze accords que New Delhi a scellés avec Téhéran, un retient particulièrement l'attention, celui qui concerne l'investissement par l'Inde de 500 millions de dollars dans le port de Chabahar.

New Delhi est l'un des principaux importateurs de brut iranien et entend consolider ses approvisionnements. Selon l'Agence internationale de l'Energie, en 2040, la dépendance de l'Inde au pétrole importé atteindra 90 % de sa consommation totale. L'Iran, en plus de sa production de pétrole, détient les deuxièmes réserves mondiales de gaz après la Russie. Mais pas seulement. Chabahar est aussi un axe stratégique vers le Moyen Orient, l'Afghanistan ou l'Asie centrale.

Sino-scepticisme


Enfin, ce port se situe à quelques encablures (130 kilomètres) de Gwadar , port installé au Pakistan et développé par la Chine. Pékin s'offre ainsi un débouché dans l'océan indien. Moyennant un colossal investissement de 46 milliards de dollars, la Chine va créer d'ici à cinq ans un corridor économique à travers la province du Baloutchistan au Pakistan en partant de la frontière chinoise du Xinjiang jusqu'au port de Gwadar. L'ancien apôtre du non-alignement qui tenait les Etats-Unis à distance a depuis cette période considérablement revu sa position. A quelques jours de son voyage à Washington, Modi vient là encore s'assurer du soutien de Barack Obama. 

« En ces temps de montée en flèche du sino-scepticisme à Delhi comme à Washington, ces deux capitales portant haut l'étendard de la démocratie trouvent réconfort dans l'affermissement de leurs rapports diplomatiques, politiques, commerciaux mais également de défense », écrit Olivier Guillard dans un document de l'IRIS.


Pour le Premier ministre indien, ces sujets diplomatiques sont à l'évidence moins préoccupants que les dossiers nationaux. Son parti le BjP vient certes de remporter quelques élections régionales. Mais il reste minoritaire au Sénat et en difficulté dans bien des Etats, ce qui freine les ardeurs réformatrices du Premier ministre.

Par Michel de Grandi sur www.lesechos.fr le 25/05/2016

Pour Erdogan, "aucune famille musulmane" ne peut accepter la contraception


Faites ce que je dis, pas ce que je fais. À la surprise générale, le président Erdogan a condamné les violences policières au cours des dernières manifestations contre la loi travail en France. Pour rappel, il avait lui-même ordonné la répression de plusieurs manifestations antigouvernementales dans son pays, en 2013. Mais le chef de l'État turc ne s'est pas arrêté là.

« Aucune famille musulmane » ne peut accepter la contraception et le planning familial, a estimé lundi Recep Tayyip Erdogan, qui en a appelé aux mères pour accroître le nombre de Turcs. « Je le dis clairement. (...) Nous allons accroître notre descendance », a déclaré M. Erdogan lors d'un discours à Istanbul. « On nous parle de contraception, de planning familial. Aucune famille musulmane ne peut avoir une telle mentalité. » « Ce que dit mon Dieu, ce que dit mon cher Prophète, nous irons dans cette voie », a poursuivi le chef de l'État turc : « Dans ce cadre, le premier devoir appartient aux mères. »

Un habitué des polémiques

Le président turc est un habitué des déclarations à l'emporte-pièce. Il avait déjà assuré que les femmes devaient avoir au moins trois enfants, critiqué l'avortement décrit comme un « crime contre l'humanité », et dénoncé la « trahison contre des générations de Turcs » que représente à ses yeux le planning familial. « Je sais qu'il y en aura encore qui en seront gênés, mais pour moi la femme est avant tout une mère », avait déclaré Recep Tayyip Erdogan à l'occasion de la Journée des droits des femmes, le 8 mars.

L'opposition et les mouvements féministes turcs reprochent au régime du président islamo-conservateur, au pouvoir depuis 2002, d'entretenir les violences contre les femmes avec des préjugés religieux. La présence d'une seule femme (Fatma Betül Sayan Kaya, au ministère de la Famille) dans le nouveau gouvernement turc du Premier ministre Binali Yildirim a également été critiquée.

« Vous ne pourrez pas usurper notre droit à la contraception ni nos autres droits, avec vos déclarations moyenâgeuses. Nous défendrons nos droits », a déclaré lundi sur Twitter le collectif « Kadin Cinayetleri », qui milite contre les violences faites aux femmes.

Recep Tayyip Erdogan, père de quatre enfants, deux filles et deux garçons, a déjà émis des propositions pour limiter le droit à l'avortement et la pilule du lendemain. La première dame de Turquie, Emine Erdogan, s'est quant à elle illustrée dimanche en défendant l'accès à l'emploi des femmes. « L'indicateur le plus révélateur de l'intégration des femmes dans la vie économique, c'est l'emploi », a-t-elle déclaré, exhortant les autorités à faire plus pour « assurer l'égalité sociale entre les genres ». La population turque a connu une croissance exponentielle ces dernières années. Le pays compte aujourd'hui environ 79 millions d'habitants.

Sur www.lepoint.fr le 30/05/2016

dimanche 29 mai 2016

Marie-Christine Clément ouvre la route du thé en Asie


Loin de son Lion d'or habituel, Marie-Christine Clément a exploré la Chine, le Sri Lanka et l'Inde. Sa route du thé Relais & Châteaux vient d'être inaugurée.

Je suis partie toute seule, avec ma valise. C'était quand même une grande aventure. Une sorte de périple aux origines du thé que le maître de maison du Grand Hôtel du Lion d'Or, également auteur de plusieurs ouvrages sur la cuisine, pourrait retracer dans ses moindres saveurs, pendant des heures.

Marie-Christine Clément était mercredi dernier à Paris pour inaugurer sa route du thé Relais & Châteaux. L'ambassadrice l'a tracé entre la Chine, le Sri Lanka et l'Inde, de relais en château, au gré des théiers et des hommes qui les cultivent, les protègent et perpétuent la tradition ancestrale.

Tout a démarré au mois d'avril 2015 dans le Yunnan, une province du sud-ouest de la Chine, aux origines du thé.« Une histoire complètement méconnue, car aujourd'hui tout repose sur une mythologie », explique Marie-Christine Clément : « On boit du thé en Chine depuis plus de 4.000 ans, mais on le cultive depuis moins de 2.000 ans ».

Des plantes et des hommes

L'explication de cet écart temporel, la passionnée d'histoire culinaire l'a trouvée auprès des ethnies minoritaires « qui utilisaient le thé dans la nourriture, pour se soigner ». Et ce, car « le théier fait partie des espèces endémiques de la région du Yunnan, il y poussait naturellement », souligne la Romorantinaise qui a notamment rencontré les Bulang, « l'ethnie qui a planté la première graine de thé au monde, il y a environ 1.800 ans ».

Là-bas, sur la montagne de Jingmaï, l'exploratrice a pu contempler les plus vieux théiers du monde. « En plein milieu de la montagne, dans une carrière au milieu de nulle part, j'ai assisté en costume traditionnel à une cérémonie en l'honneur des ancêtres du thé », livre-t-elle des étoiles plein les yeux.

Ces savoirs, Marie-Christine Clément les a cueillis auprès d'universitaires, de cultivateurs, des mémoires locales de ce pays où le thé est intimement lié au bouddhisme. Sa route l'a ensuite menée jusqu'au Sri Lanka, sur les traces cette fois du fameux thé de Ceylan.

Nouvelle exploration temporelle : « On est autour de 1860 lorsque l'on se met à cultiver le thé », explique l'hôtelière. Une culture démarrée alors qu'une maladie ravage les plantations de café de l'île. « J'ai rencontré un descendant de Mr Taylor, le premier planteur de thé de Ceylan, un Écossais », retrace Marie-Christine Clément, qui a ramené le récit des pionniers dans sa valise.

En juillet dernier, le voyage s'est terminé en Inde du Sud. « Une autre histoire », celle de la commercialisation du thé dans les années 1880. « Le Kerala n'est pas seulement le berceau des épices, mais aussi le 5e producteur mondial de thé au monde », rappelle la chercheuse de thé, qui a arpenté Fort Kochi, une « ville très coloniale », infusée de traditions anglaises. Là-bas, l'ambassadrice a « visité l'ancien club de planteurs de thés » etinterviewé l'un des nombreux courtiers de la cité indienne. « Il vend une tonne de thé par minute », glisse-t-ellepour donner une idée du poids économique du thé dans le pays.


De ses deux mois passés en Asie au total, Marie-Christine Clément a rapporté des thés millésimés, des thés parmi les plus anciens du monde, des « thés qui me font pleurer, me bouleversent », avoue-t-elle. « D'autres sont encore à découvrir », prévient l'ambassadrice comblée qui a déjà prévu de repartir en Chine de l'Est, entre Pékin et Shanghai, à Taïwan et au Japon pour poursuivre sa route d'ambassadrice du thé.


Laurence Texier sur www.lanouvellerepublique.fr le 27/05/2016

Le canadien WWM en conflit avec les autorités du Kazakhstan

La société minière canadienne World Wide Minerals Ltd ( «WWM») a l'intention de poursuivre en justice le Kazakhstan, l'accusant de défaut aux termes d'un contrat avec l'ancien état soviétique.

En 1996-1997, la société a investi dans le développement des plus grandes réserves d'uranium au Kazakhstan, mais à la fin, toutes ses activités ont été réduites, l'entreprise a fait faillite et ses actifs et propriétés vendus. Dans le même temps, , elle tente de faire supporter la responsabilité de l'échec financier de l'entreprise par le Kazakhstan. La partie kazakhstanaise, à son tour, a souligné que le World Wide Minerals a commis des violations graves des lois nationales et n'a pas respecté les obligations découlant des accords.

En particulier, la compagnie «WWM» a repris la gestion du complexe d'extraction d'uranium du Nord et l'exploitation minière et chimique du combinat des Terres Vierges (TSGKH). En 1997, la société canadienne a lancé un appel au gouvernement du Kazakhstan en vue d'obtenir une licence pour la vente de l'uranium aux États-Unis, qui a été refusée en raison du fait que le droit exclusif a été accordé à la société américaine Nukem inc.

A son tour, «WWM» a arrêté la production en expliquant manquer d'opportunités pour vendre l'uranium, bien que le marché mondial, bien sûr, ne se limite pas qu'aux États-Unis. Comme prévu, le Kazakhstan a annulé le contrat avec la société canadienne en raison de son échec vis-à-vis de ses obligations, et de la situation économique et financière difficile de la TSGKH. A cette époque, l'entreprise tournait au ralenti, au bord de la faillite, a formé d'importants arriérés de salaires et généré un mécontentement social des travailleurs de plus en plus fort.

Cette histoire dure depuis plus d'un an. World Wide Minerals a maintes fois poursuivi le gouvernement du Kazakhstan et "Kazatomprom" devant l'arbitrage international de Stockholm et les tribunaux américains. Mais les tentatives précédentes pour obtenir des compensations ont échoué. La justice a constamment donné raison au Kazakhstan.

En particulier, comme l'a souligné la Cour d'appel du district de Columbia (USA), la «décision d'émettre ou de ne pas délivrer une licence d'exportation ... est une action souveraine du Kazakhstan, sur la base des lois nationales et des décrets de cette République".

Un autre détail important a permis de traiter ce différend sur la base de la législation nationale du Kazakhstan. En particulier, le Canada n'a pas signé d'accord sur l'encouragement et la protection réciproque des investissements avec le Kazakhstan, alors que c'est le cas pour les Etats-Unis par un document qui est entré en vigueur en 1994. Le fait que la société américaine Nukem inc, ait reçu du Kazakhstan le droit exclusif au commerce de l'uranium, semble alors tout à fait compréhensible.

Toutefois, cela n'a pas calmé la société World Wide Minerals. Il y a eu un autre tour de confrontation. Le 28 janvier 2016, le tribunal d'arbitrage du Canada a examiné et confirmé la demande des compagnies minières canadiennes à l'encontre du Kazakhstan. Dans le même temps, le montant des sinistres a augmenté de manière significative. Si en 2001, World Wide Minerals estimait la perte de l'investissement à 25 millions $ et la perte de chiffre d'affaires à 1 milliard $, aujourd'hui, le montant en litige dépasse les 3 milliards $.

Quels espoirs peut avoir «WWM» ? Assez curieusement, le côté canadien se réfère au traité bilatéral d'investissement entre le Canada et l'URSS de 1989, qui garantit la protection des investissements canadiens. Mais ce qui est le plus intéressant, c'est que cette position est non seulement confirmé par le tribunal arbitral, mais également par le gouvernement du Canada, qui a déclaré que le Kazakhstan a repris tous les engagements d'investissement de l'URSS.

Les intérêts du Canada sont représentés par le cabinet d'avocats Jones Day's Global Disputes. Son avocat principal, Bayju Vassani, en charge du procès, a dit à la Presse Canadienne que «ceci est une décision historique dans le domaine du droit international. Pour la première fois, la Russie ne sera pas considérée comme le seul successeur légal des accords internationaux d'investissement conclus par l'URSS ".

Inutile de dire que la situation ressemble plus à un théâtre de l'absurde. Le Kazakhstan ne comprend pas pourquoi un accord signé par le Président du Conseil des Ministres de l'URSS, Nikolai Ryjkov devrait prévaloir sur les intérêts nationaux de la République ? Qui est ce Ryjkov pour un Etat indépendant ? En fait, il est un fonctionnaire étranger.

Le Kazakhstan ne peut pas être considéré comme le successeur légal de l'URSS, car la Russie a pris ce rôle sur elle-même.

Le 21 décembre 1991, lorsque la Fédération de Russie a été lancée, par la décision du Conseil des chefs d'Etat de la CEI il a été soutenu l'idée que la continuité de la représentation de l'URSS à l'ONU y compris au siège permanent du Conseil de sécurité et à d'autres organisations internationales, sera assurée par la Russie.

Il faut comprendre que les bases de l'économie de marché dans l'Union ont été mises en place seulement à la fin des années 80. Il n'existaient pas d'investisseurs, car il n'y avait pas encore d'accord avec eux. En 1989, l'Union soviétique a signé un accord sur l'encouragement des investissements et la protection réciproque des capitaux avec huit pays économiquement développés de l'Occident. Le premier partenaire de l'Union soviétique dans le domaine de la protection mutuelle des investissements étrangers était la Finlande. En 1989, son exemple a été suivi par la Grande-Bretagne, l'Allemagne, le Canada et l'Italie. Ensuite, en 1990, des accords bilatéraux similaires ont été conclus avec quatre autres pays économiquement développés (Autriche, Espagne, Suisse, Corée du Sud), et plus tard avec la Chine et la Turquie.

La légitimité de cette décision, n'est pas sujet à la contestation. Après tout, la présence du polygone d'essais nucléaire, ainsi que l'arsenal nucléaire (en passant, le quatrième plus grand dans le monde), sont contraires aux intérêts nationaux de ce pays. Mais alors, pourquoi nierait-on la souveraineté du Kazakhstan pour les questions de sécurité, et faudrait-il que les décisions économiques prises par l'Union soviétique soient soutenues par le nouvel Etat indépendant ?

Dans une récente interview (29/04/2016), le Premier ministre des Pays-Bas Mark Rutte, a déclaré que le climat d'investissement est favorable au Kazakhstan. Il a dit que « le dernier rapport de Doing Business, publié par la Banque mondiale, montre que le Kazakhstan a gagné 12 places pour se classer à la 41ème en 2014-2015. Ceci est une concrétisation importante, et je suis sûr que le Kazakhstan va maintenir ce rythme ».

Que cherche le gouvernement du Canada, en soutenant la demande «WWM» contre le Kazakhstan? Tout d'abord, il peut grandement compliquer les relations bilatérales entre les deux pays. Deuxièmement, en entrant dans cette affaire perdue d'avance, le Canada nuit involontairement à lui-même et à son image. Troisièmement, à ce stade de la procédure, l'autorité de la République du Kazakhstan est minée dans l'environnement des investisseurs étrangers, ce qui peut se traduire par une demande reconventionnelle. Ce qui veut dire qu'il est bien possible que suite à des décisions incompétente, ce cera le contribuable canadien ordinaire qui paiera les pots cassés. En règle générale, les frais de justice dans de tels cas, peuvent atteindre des montants importants.

Il y a un quatrièmement. Qui sait, peut-être y a-t-il un problème de corruption à présent ? Après tout, le montant des réclamations de «WWM» demandé au Kazakhstan croit de façon exponentielle. Bien sûr, il n'est pas possible de répondre à cette question et comprendre les motivations qui guident le gouvernement du Canada est également très difficile.

mardi 24 mai 2016

Le Kazakhstan est la cible de forces obscures

Les informations provenant du Kazakhstan, conduisent à la conclusion que certaines forces sont intéressées à porter atteinte à un pays stable et prospère d’Asie centrale. Certains auteurs, tout en restant dans les coulisses, vont y provoquer délibérément des troubles civils.

Dans les moments les plus difficiles, le Kazakhstan a toujours réussi à maintenir son principal atout : la stabilité. Et aujourd'hui, ce pays doit encore surmonter un test difficile de maturité.

Que s'est-il passé ? Il y a quelque temps, il y a eu des discussions sur les amendements au Code foncier du Kazakhstan. En particulier, la population a rejeté des normes devant permettre de vendre des terrains à la propriété privée.

Cependant, les temps ont changé. Et le paradoxe de la situation est que personne ne s'oppose maintenant à la norme elle-même, ce qui permet d'acquérir la propriété des terres. Ce Code est tout à fait libéral dans son contenu. Mais ici, son interprétation a provoqué une situation ambiguë. Il faut savoir que certaines forces ont commencé à diffuser l'information que les autorités vont vendre des terres à des étrangers. Ce qui parmi la population a provoqué un tollé.

Ainsi, au Kazakhstan il a été mis au point une campagne de propagande puissante contre les réformes agraires. Et le point culminant de cette attaque de l'information a conduit à des appels à la population pour se rendre aux manifestations du 21 mai.

Il faut dire que le peuple du Kazakhstan lui-même, est très sceptique à l’idée de protester dans les rues. Cependant, dans toute société il existe une branche contestataire. C’est sur elle que des metteurs en scène de l'ombre ont parié, et qu’a commencé une guerre de l'information contre le Kazakhstan.

Et le pire est qu'ils font jouer à la population, le rôle de chair à canon. C’est un carburant consommable qui permettra de déclencher une guerre civile. Selon les données de la police, tout ceci était préparé à l'avance. Juste un jour avant les rassemblements, les forces de l’ordre du Kazakhstan ont découvert des caches d'armes conçues pour transformer des manifestations pacifiques en un hachoir à viande sanglant.

À la lumière des événements récents, nous pouvons conclure que, peu importe la façon dont les manifestations pacifiques sont prévues, elles pourraient finir très tristement. Il y a longtemps que dans le monde, il a été mis au point des techniques qui permettent de transformer n’importe quelle manifestation pacifique en une foule incontrôlable, provoquant troubles et émeutes. Des personnes spécialement formées peuvent ébranler une foule entière en quelques minutes. Pour ce faire, ils n’hésiteront à tuer, bombarder et créer des affrontements armés avec la police.

Une nouvelle période arrive, où la population est poussée vers une confrontation directe avec le gouvernement. Et cela à un moment où le président du pays a imposé un moratoire sur certaines normes du Code foncier qui provoquaient un rejet dans la société. Ceci à un moment où une commission d'Etat sur la question des terres, a été conçue pour soulager les tensions et régler les différends.

Les autorités sont prêtes pour le dialogue, mais, apparemment cela n’est pas utile, car en coulisse des écrivains préparent le pays a tenir un rôle de zone de tests. Peu importe que le Kazakhstan soit solide et stable. Ils ont besoin d'un territoire contrôlé par le chaos. Ils ont besoin d'un nouvel Etat Islamique dans le centre de l'Eurasie.

Au Vietnam, Obama renforce le front antichinois


Pour l’anecdote, les réseaux sociaux diffuseront en boucle les images d’un Barack Obama, baguettes à la main, en train de déguster un plat à 6 dollars dans un petit restaurant de Hanoï. La plus grande histoire, elle, retiendra qu’à quelques mois du terme de son dernier mandat, le président des Etats-Unis s’est une nouvelle fois livré à un exercice de géopolitique dans lequel il excelle.

Dans un discours prononcé mardi à Hanoï devant plus de 2000 personnes et retransmis en direct à la télévision, Barack Obama a non seulement loué la solidité des liens noués entre les ennemis d’hier, mais s’est encore lancé dans un vibrant plaidoyer pour la démocratie et la liberté de la presse, dans un pays où règne encore le parti unique. «Je viens ici, conscient du passé, de notre histoire difficile, mais tourné vers l’avenir», a lancé Obama, troisième président américain à se rendre au Vietnam depuis la fin de la guerre en 1975. «Nous pouvons dire une phrase longtemps inimaginable: aujourd’hui, le Vietnam et les Etats-Unis sont partenaires!»
Levées de l'embargo sur les armes

Lundi, concrétisant une des principales motivations de son voyage, le locataire de la Maison-Blanche avait annoncé la levée de l’embargo sur les ventes d’armes américaines à Hanoï. Une décision immédiatement critiquée par Pékin, qui y voit la volonté de Washington de «contenir la Chine».
Il est vrai que cette décision intervient dans un contexte où Pékin et Hanoï (et d’autres pays riverains) se disputent la souveraineté d’îles en mer de Chine méridionale, une rivalité qui avait culminé en 2014 au Vietnam avec de meurtrières émeutes antichinoises.
Obama a pourtant assuré que la levée de l’embargo sur les ventes d’armes à Hanoï ne visait pas Pékin. «C’est tout simplement un très médiocre mensonge», a dénoncé mardi le Global Times, quotidien proche du Parti communiste chinois au pouvoir. Titillant encore un peu plus Pékin, Obama a encore affirmé mardi que «les grands pays ne devraient pas intimider les plus petits».

Politique de «pivot»

«Il ne fait guère de doute que ce voyage d’Obama au Vietnam vise à renforcer le front antichinois en Asie et à rassurer les anciens et les nouveaux alliés de Washington, commente Olivier Guillard, chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), spécialiste de l’Asie. Cela rentre parfaitement dans la politique de «rééquilibrage» ou de «pivot» vers l’Asie que mène Washington pour renforcer son influence dans la région.»
«Rien n’est innocent en politique étrangère, poursuit le spécialiste. En fin de mandat, Obama profite aussi de la liberté de parole que lui donne ce statut pour poser des actes symboliques. Après la Birmanie et Cuba, et avant de se rendre à Hiroshima vendredi, l’étape vietnamienne doit lui permettre de laisser un bon souvenir, de marquer l’histoire.»
Et puis, conclut Olivier Guillard, «cette sorte de visite d’adieu en Asie et les actes qui l’accompagnent sont aussi l’occasion pour Barack Obama de préparer l’avenir de son successeur qu’il espère être de son camp.» 

Par Bernard Bridel sur www.tdg.ch le 24/05/2016

jeudi 19 mai 2016

Kazakhstan : Polémique sur les ventes de terres aux étrangers

Le Kazakhstan, qui de l'avis des médias du monde entier est un pays stable, un chef de file en Asie centrale, a souffert aujourd'hui des attaques via de fausses informations.

La raison en est les amendements au Code foncier. Une analyse attentive montre que le seul but des modifications législatives était d'encourager l'agriculture. Cependant, une désinformation délibérée, des mensonges fortement relevés ont suscité une méfiance des réformes dans une partie de la société kazakhe. En particulier, à propos de la question de la vente de terrains que personne ne veut vendre, les thèses suivantes sont largement utilisées :

- Les terres sont achetées par des étrangers;
- Les étrangers ont tué un sol fertile à cause de deux à trois années d'utilisation intensive;
- Le Kazakhstan ne retrouvera jamais les terres vendues.

Bien sûr, les investisseurs qui travaillent déjà au Kazakhstan, se pose la question, qu'en est-il ? Certains commentent l'événement avec humour. Toujours est-il qu'il est difficile de comprendre la logique des thèses de l'opposition?

Les pseudo-révolutionnaires qui ont fui du Kazakhstan pour des raisons diverses, ont inspiré les débats sur les ventes de terres. Cependant, ils sont loin d'avoir l'état d'esprit à diriger un mouvement social, sans mentionner le fait qu'ils ont bien appris à cracher avec arrogance à partir de l'étranger, sur tout ce qui se passe au Kazakhstan.

Ils sont des combattants de petite envergure, jurant contre tout pouvoir. C'est un besoin organique chez certains d'entre eux. Par exemple, il n'y a pas si longtemps à Kiev, Aidos Sadykov et Serikzhan Mambetalin ont partagé leur opinion d'"expert" au Kazakhstan. Et beaucoup de gens en rient encore.

Serikzhan Mambetalin n'a pas vraiment envi de devenir un chef de la révolution. Ne dites pas accidentellement de lui qu'il n'est pas un combattant, car auparavant, il a été confronté à la justice du Kazakhstan pour avoir essayé de fomenter des conflits ethniques (une infraction pénale en République du Kazakhstan, et dans de nombreux pays à travers le monde). Après s'être "repenti" sur sa page Facebook, il a promis de cesser toute activité politique. Mais on peut voir qu'il a trompé tout le monde.

Au cours de ces dernières années, Astana a développé une politique tout à fait indépendante dans ce domaine, en saisissant des opportunités pour accroître sa part dans des projets pétroliers précédemment concédés avec des conditions favorables à des concessionnaires occidentaux, alors que le marché est plus en plus ouvert aux pays étrangers. Ceci est fait dans un but de diversification, de sorte que le pays ne soit pas été lié à un centre particulier de puissance et ne perde pas son indépendance. Certaines Compagnies internationales n'apprécient certainement pas une telle politique économique indépendante.

Pour le peuple kazakh autrefois nomade, la terre a toujours une signification sacrée. Voilà pourquoi ce thème a trouvé une telle résonance. Tous ceux qui s'opposent à la réforme agricole ne rendront service à leur pays.

Tout d'abord, en se référant à la vente de terres aux étrangers, l'opposition ment ouvertement et sans vergogne. En modifiant le Code foncier, le Kazakhstan a en effet autorisé à acheter des terres, mais seulement par les citoyens de ce pays et en premier lieu, par ceux qui travaillent déjà avec elle.

Deuxièmement, en ce qui concerne les investisseurs étrangers, des modifications ont déjà été apportées à la législation il y a 1,5 ans. Elles ont contribué à accroître la durée du bail des terres de 10 à 25 ans. Les investisseurs n'en obtiendront des bénéfices qu'après des décennies. A court terme, la location entravera l'afflux d'investissement dans le secteur agricole. En outre, elle provoque involontairement une agriculture prédatrice, répondant au principe de «après nous le déluge». Tout homme d'affaires intéressé par les profits et qui n'a pas le temps, est pressé de faire sortir « tout le jus » de la terre.

Il faut ajouter que les lois foncières de Kazakhstan ont changé à plusieurs reprises. Dans les années 90, les étrangers ont été autorisés à prendre des terres à bail pour 99 ans. Mais cela n'a pas conduit à une perte de souveraineté.

Le secteur agricole du Kazakhstan a suscité de grands espoirs, car il est considéré comme un secteur prometteur de l'économie. Du point de vue du bon sens et du pragmatisme économique, le débat sur la terre devrait être considéré comme important pour le Kazakhstan. Et le plus intéressant, c'est que ce pays a besoin d'investisseurs qui ne travaillent pas sur la terre même, mais sur la transformation des produits agricoles. Les agriculteurs eux-mêmes disent qu'ils ont des problèmes avec le traitement et la commercialisation. En conséquence, on assiste au Kazakhstan, à un théâtre de l'absurde. Ceux qui sont contre les réformes et les investissements ne savent même pas comment tenir une pelle. Les agriculteurs et les paysans qui ont salué les réformes ne sont pas entendus.

Les autorités kazakhes ont organisé une commission d'Etat spéciale, qui comprend des représentants de l'opposition et le secteur agricole, des scientifiques, des politiciens et des personnalités publiques. La Commission avait déjà commencé à travailler, jusqu'à ce que le Président ait imposé un moratoire sur le Code foncier.

Il est clair que la campagne d'information contre le Kazakhstan a joué habilement et a été mise en œuvre avec succès. On sent la main du maître. Mais de telles capacités d'organisation de l'opposition locale n'ont jamais été observées auparavant. Donc, quelqu'un a aidé. Comme on dit, le monde n'est pas exempt de «bonnes» personnes.

Il est impossible d'ignorer les paroles du président du Kazakhstan, Nursultan Nazarbayev, qui a récemment admis ouvertement la tentative de « révolution de couleur » dans le pays et menacé de les empêcher rigoureusement "A cause des rassemblements, le monde va aller de l'avant, il ne nous attendra pas, et nous resterons à la traine ... Nous ne permettrons à personne de tirer parti de la crise pour saper la paix et la stabilité dans notre maison commune. A présent, les temps sont difficiles. Les Kazakhs ne veulent pas des événements de type ukrainiens ... Nous prendrons les mesures les plus sévères envers ceux qui chercheraient à apporter un scénario similaire ici. C'est une question de survie de la nation dans des conditions difficiles et dans la nouvelle réalité mondiale ".

mercredi 11 mai 2016

Syrie : comment limiter la guerre


Chaque fois que l’Armée arabe syrienne vainc les jihadistes, de nouveaux combattants arrivent par milliers dans le pays. Force est de constater que cette guerre est alimentée de l’extérieur et qu’elle durera tant que l’on y enverra mourir des soldats. Aussi faut-il comprendre les raisons extérieures qui la font toujours se poursuivre. Alors et alors seulement, on pourra élaborer une stratégie qui épargne des vies.
Voici ici plus de cinq ans que la Syrie est en guerre. Ceux qui ont soutenu ce conflit l’expliquaient au départ par l’extension des « printemps arabes ». Mais plus personne aujourd’hui ne tient ce discours. Simplement parce que les gouvernements issus de ces « printemps » ont déjà été renversés. Loin d’être une aspiration démocratique, ces événements n’étaient qu’une tactique de changement des régimes laïques au profit des Frères musulmans.
On prétend désormais que le « printemps » syrien a été détourné par d’autres forces ; que la « révolution » —qui n’a jamais existé— aurait été dévorée par des jihadistes bien réels.
Ainsi que l’a fait remarquer le président Vladimir Poutine, au premier abord, le comportement des Occidentaux et des pays du Golfe est incohérent. Il est impossible sur le champ de bataille de combattre à la fois les jihadistes et la République et de prétendre se positionner sur un troisième côté. Or, nul ne choisit publiquement son camp, de sorte que la guerre se poursuit.
La vérité est que cette guerre n’a pas de cause intérieure. Elle est le fruit d’un environnement non pas régional, mais global. Lorsqu’elle fut déclarée par le Congrès US en votant le Syrian Accountability Act, en 2003, l’objectif de Dick Cheney était de faire main basse sur les gigantesques réserves de gaz du pays. On sait aujourd’hui que le « pic pétrolier » du crude oil ne marque pas la fin du pétrole et que Washington va bientôt exploiter d’autres formes d’hydrocarbures dans le golfe du Mexique. L’objectif stratégique des États-Unis a donc changé. Désormais, c’est de contenir le développement économique et politique de la Chine et de la Russie en les forçant à commercer exclusivement par les voies maritimes que contrôlent leurs porte-avions.
Dès son arrivée au pouvoir, en 2012, le président Xi Jinping a annoncé l’intention de son pays de s’affranchir de cette contrainte et de construire deux routes commerciales continentales vers l’Union européenne. La première sur l’antique tracé de la route de la soie, la seconde via la Russie jusqu’en Allemagne. Immédiatement deux conflits ont surgi : d’abord la guerre en Syrie n’a plus eu comme objectif de changer le régime, mais de créer le chaos, tandis que le même chaos s’installait sans plus de raison en Ukraine. Puis, la Biélorussie s’est rapprochée de la Turquie et des États-Unis étendant au Nord la coupure de l’Europe en deux. Ainsi, deux conflits sans fin coupent les deux routes.
La bonne nouvelle, c’est que personne ne pourra négocier une victoire en Ukraine contre une défaite en Syrie car les deux guerres ont le même objectif. La mauvaise nouvelle, c’est que le chaos continuera sur les deux fronts tant que la Chine et la Russie ne seront pas parvenues à construire un autre axe de communication.
Par conséquent, il n’y a rien à espérer d’une négociation avec des gens qui sont payés pour faire durer le conflit. Mieux vaudrait faire preuve de pragmatisme, accepter l’idée que ces guerres ne sont que des moyens pour Washington de couper les routes de la soie. Ce n’est qu’à ce moment là qu’il sera possible de démêler les nombreux intérêts en jeu et de stabiliser toutes les zones habitées.
Par Thierry Meyssan le 11 mai 2016 sur www.voltairenet.org

lundi 9 mai 2016

La politique étrangère US

Pour expliquer, et donc prévoir, la politique étrangère des États-Unis, on a opposé durant plus d'un siècle les isolationnistes et les interventionnistes. Les premiers se situaient dans la ligne des « Pères pèlerins » qui fuirent la veille Europe pour construire un monde nouveau, basé sur leurs valeurs religieuses et donc éloigné du cynisme européen. Les seconds, dans la tradition de certains « Pères fondateurs », entendaient non seulement conquérir leur indépendance, mais poursuivre à leur compte le projet de l'Empire britannique.
Aujourd'hui, cette distinction n'a guère de sens car il est devenu impossible de vivre en autarcie, même pour un vaste pays comme les États-Unis. Bien qu'il soit commun d'accuser ses adversaires politiques d'isolationnisme, il n'y a plus aucun politicien états-unien —hormis Ron Paul— qui défende cette idée.
Le débat s'est déplacé entre partisans de la guerre perpétuelle et adeptes d'un usage plus mesuré de la force. Si l'on en croit les travaux des professeurs Martin Gilens et Benjamin I. Page, la politique actuelle des États-Unis est décidée par un ensemble de groupes d'intérêts, indépendamment de la volonté des citoyens [1]. Il est donc légitime de voir dans ce débat l'influence d'une part, du complexe militaro-industriel, qui domine l'économie US, dont l'intérêt est de poursuivre la « guerre sans fin » ; et d'autre part, des compagnies de péage (logiciels, high-tech, divertissement) qui, certes ont une production plus virtuelle que réelle, mais prélèvent leur tribut partout où le monde est en paix.
Cette analyse du débat laisse de côté la question de l'accès aux matières premières et aux sources d'énergie, qui fut dominante aux XIXe et XXe siècle, mais a perdu de son acuité sans pour autant disparaître totalement.
Depuis la « Doctrine Carter », qui assimile l'accès aux hydrocarbures du « Moyen-Orient élargi » à une question de « sécurité nationale » [2], on a vu Washington créer le CentCom, déplacer plus de 500 000 hommes dans le Golfe, et réclamer le contrôle de toute la région. On se souvient que, persuadé de l'imminence du « pic pétrolier », Dick Cheney décida de préparer les « printemps arabes » et des guerres contre tous les États de la région qu'il ne contrôlait pas. Mais cette politique a perdu son sens en cours d'application car les États-Unis, outre leur production de gaz et de pétrole de schiste, ont pris le contrôle des hydrocarbures du golfe du Mexique. Par conséquent, dans les années à venir les États-Unis non seulement auront abandonné le « Moyen-Orient élargi », mais sont susceptibles de livrer une grande guerre contre le Venezuela, seule puissance moyenne à rivaliser et à menacer leur exploitation du golfe du Mexique.
Dans sa série d'entretiens avec The Atlantic, le président Obama a tenté d'expliciter sa doctrine [3]. Pour ce faire, il a longuement et répétitivement répondu à ceux qui l'accusent de contradictions ou de faiblesse, notamment après l'affaire de la ligne rouge en Syrie. Il avait en effet déclaré que l'usage d'armes chimiques était une ligne rouge à ne pas franchir, mais lorsque son administration a allégué que la République arabe syrienne y avait eu recours contre sa propre population, il a refusé de conduire une nouvelle guerre. Laissant de côté le fait de savoir si l'accusation était fondée ou non, le président a souligné que les États-Unis n'avaient aucun intérêt à risquer la vie de leurs soldats dans ce conflit et qu'il avait choisi d'économiser leurs forces pour en disposer face à de véritables menaces contre leur intérêt national. C'est cette retenue qui constituerait la « Doctrine Obama ».
Quelles sont donc ces véritables menaces ? Le président ne le dit pas. Tout au plus peut-on considérer à la fois les travaux de l'US National Intelligence Council et les remarques précédentes sur le pouvoir des groupes d'intérêt. Il apparaît alors que les États-Unis ont abandonné la « Doctrine G.W. Bush » post-11-Septembre de domination globale pour revenir à celle de son père : l'excellence commerciale. Une fois la Guerre froide terminée faute de combattant, l'époque serait dédiée à la seule compétition économique au sein du système capitaliste déréglementé.
C'est d'ailleurs bien pour s'assurer que l'époque des conflits idéologiques était terminée que le président Obama s'est rapproché de Cuba et de l'Iran. Il était indispensable d'apaiser l'opposition de ces deux États révolutionnaires, les seuls à contester non seulement la suprématie US, mais aussi la règle du jeu international. La mauvaise foi dont les États-Unis font preuve dans l'application de l'accord 5+1 atteste simplement qu'ils n'ont rien à faire du nucléaire iranien mais cherchent uniquement à tenir en laisse la révolution khomeiniste.
C'est dans ce contexte que l'on assiste au retour de la « Doctrine Wolfowitz » selon laquelle tout doit être fait pour prévenir l'émergence d'un nouveau concurrent, à commencer par brider l'Union européenne [4]. Cette stratégie semblait avoir été modifiée en ce que Washington considérait avec plus d'appréhension encore le réveil de la Chine. Ainsi, a-t-on pu parler d'une stratégie de « Pivot vers l'Extrême-Orient » consistant à retirer les troupes présentes au Moyen-Orient élargi et à les repositionner afin à la fois de contrôler cette nouvelle région et de contenir la puissance chinoise. Si le Pentagone a abandonné le délire néo-conservateur de destruction de la Chine, il entend contenir Pékin dans un rôle exclusivement économique et lui interdire toute influence politique hors de ses frontières.
Pourtant, c'est au contraire du « Pivot vers l'Extrême-Orient » que l'on assiste. Les États-Unis ont certes légèrement renforcé leur présence dans le Pacifique, mais se sont surtout implantés militairement en Europe centrale. Alors même que les guerres se poursuivent en Palestine et au Yémen, en Syrie et en Irak, et que les armes vont reparler en Libye, un nouveau conflit s'est ouvert en Ukraine. Il existe cependant deux manières d'interpréter cette évolution.
D'un côté, on peut considérer que le déploiement militaire à la frontière russe et la réponse militaire qu'il suscite de Moscou ne menacent aucunement la paix. Il semble en effet à la fois très risqué et absolument pas nécessaire d'engager un tel conflit. La guerre en Ukraine ne serait alors pas dirigée contre la Russie, mais constituerait la fabrication artificielle d'une pseudo-menace russe sur l'Europe, avec ses sanctions et ses contre-sanctions, permettant aux États-Unis de « protéger » leurs crédules alliés.
D'un autre côté, on peut considérer que l'avenir économique des États-Unis repose sur leur contrôle des échanges internationaux et donc sur le maintien du transport maritime [5]. Au contraire, le développement de la Russie et de la Chine suppose de s'affranchir de la tutelle US et donc de construire des routes commerciales continentales. C'est le projet du président Xi avec la construction de deux routes de la soie, une passant par son tracé antique à travers l'Asie centrale, le Pakistan, l'Iran, l'Irak et la Syrie jusqu'à la Méditerranée ; l'autre passant par la Russie jusqu'à l'Allemagne. Deux routes qui sont aujourd'hui coupées au Levant par Daesh et en Europe par l'Ukraine.
La question du transport maritime était au centre de la stratégie états-unienne au début du XXIe siècle avec le soutien aux pirates de la Corne de l'Afrique [6] ; une stratégie qui a pris fin lorsque Moscou et Pékin ont envoyé sur place leur marine de guerre. Cependant, même si la Chine a fait doubler le canal de Suez par l'Égypte, l'accès par le détroit de Bab el-Mandeb reste contrôlé officiellement via Djibouti et officieusement par Al-Qaïda via l'Émirat islamique de Mukalla.
Au contrôle des routes commerciales, il convient d'ajouter celui des échanges financiers. Raison pour laquelle, la Justice états-unienne a édicté des règles qu'elle tente d'imposer progressivement aux banques du monder entier. Mais là encore, la Russie a constitué son propre système Swift, tandis que la Chine a refusé la convertibilité de sa monnaie en dollars pour ne pas être astreinte aux règles US.
Si cette analyse est exacte, les guerres en Syrie, en Irak et en Ukraine ne cesseront que lorsque la Russie et la Chine auront sécurisé un autre itinéraire commercial jusqu'en Europe occidentale. À ce sujet, on observe les efforts états-uniens pour faire basculer la Biélorussie dans leur camp après l'avoir si longtemps combattue ; une manière d'étendre le pare-feu ukrainien et de s'assurer d'un cloisonnement hermétique entre l'Europe occidentale et orientale.
Dans cette perspective, les négociations commerciales que les États-Unis ont entreprises avec l'Union européenne (TTIP) et avec l'ASEAN (TPP) n'ont pas pour but de renforcer leurs échanges, mais au contraire d'exclure la Russie et la Chine des marchés. C'est de manière bien stupide qu'Européens et Asiatiques se concentrent sur le choix des normes de production au lieu d'exiger l'entrée des Russes et des Chinois dans les négociations.
Un dernier enseignement des entretiens à The Atlantic, c'est que les États-Unis entendent mettre à jour leurs alliances, les adapter à leur nouvelle doctrine stratégique. Ainsi, le soutien aux Séoud qui prévalait à l'époque du pétrole du Moyen-Orient n'a plus aucun intérêt et constitue même un fardeau. Ou encore, la « relation spéciale » avec le Royaume-Uni qui avait une importance, du contrôle des océans (Charte de l'Atlantique) à la tentative de façonnage d'un monde unipolaire (guerre d'Irak), n'offre plus d'intérêt particulier et doit être repensée. Sans oublier le coûteux soutien à Israël, qui ne sert plus au Moyen-Orient, et ne pourra se poursuivre que si Tel-Aviv se montre utile dans d'autres régions du monde.
Les remarques qui précédent ne correspondent pas à l'actuelle campagne présidentielle aux États-Unis qui oppose d'un côté le complexe militaro-industriel et l'idéologie WASP, représentés par Hillary Clinton, et de l'autre l'industrie de péage et le pacte social du « rêve américain », représentés par Donald Trump [7]. La violence de cette campagne atteste de la nécessité de rééquilibrage de ces forces après une suprématie sans partage du bellicisme depuis 1995.
Lorsque le camp aujourd'hui représenté par Trump l'emportera, on devrait voir les guerres se résoudre, mais une oppressante coercition s'exercer pour le paiement des brevets et des droits d'auteur. Dans le cas où sa victoire tarderait à venir, les États-Unis devraient faire face au soulèvement d'une population excédée et à des émeutes. Il deviendrait alors particulièrement difficile de prévoir la politique étrangère US.
[1] « Testing Theories of American Politics : Elites, Interest Groups, and Average Citizens », Martin Gilens and Benjamin I. Page, Perspectives on Politics, Volume 12, Issue 03, September 2014, pp. 564-581.
[2] "State of the Union Address 1980", by Jimmy Carter, Voltaire Network, January 23rd, 1980.
[3] « La Doctrine Obama », par Jeffrey Goldberg, The Atlantic (États-Unis) ,Réseau Voltaire, 10 mars 2016.
[4] « US Strategy Plan Calls For Insuring No Rivals Develop », Patrick E. Tyler, and « Excerpts from Pentagon's Plan : "Prevent the Re-Emergence of a New Rival" », New York Times, March 8th, 1992. « Keeping the US First, Pentagon Would preclude a Rival Superpower », Barton Gellman, The Washington Post, March 11, 1992.
[5] "The Geopolitics of American Global Decline", by Alfred McCoy, Tom Dispatch (USA) , Voltaire Network, 22 June 2015.
[6] « Pirates, corsaires et flibustiers du XXIe siècle », par Thierry Meyssan,Оdnako (Russie), Réseau Voltaire, 25 juin 2010.
[7] « Qui sera le prochain président des États-Unis ? », « Mattis contre Trump », par Thierry Meyssan, Al-Watan (Syrie), Réseau Voltaire, 4 avril et 3 mai 2016.

Par Thierry Meyssan sur www.voltairenet.org le 9 mai 2016

dimanche 8 mai 2016

Chine : chute inattendue des exportations et des importations


Contrairement aux attentes, la Chine a vu au mois d'avril ses importations baisser de 10,9% et ses exportations reculer de 1,8%. Une contre-performance après le rebond du mois de mars.
Les exportations chinoises ont reculé de 1,8% en avril par rapport à avril 2015 tandis que les importations chutaient de 10,9%, selon des données inférieures aux prévisions des économistes publiées dimanche par l'Administration générale des douanes.
L'excédent commercial de l'économie chinoise ressort en avril à 45,56 milliards de dollars (39,9 milliards d'euros contre 34 milliards de dollars un an auparavant.
Les analystes interrogés par Reuters tablaient sur une quasi-stagnation des exportations (-0,1%) et sur un recul deux fois moindre des importations, à 5%.
Les exportations avaient bondi de 11,5% en mars
En mars, les exportations chinoises avaient bondi de 11,5% sur un an, progressant pour la première fois depuis juin 2015. Mais le mois d'avril a marqué une rechute.
Du côté des importations, avril a été le 18e mois consécutif de baisse, soulignant la faiblesse de la demande intérieure en dépit d'un rebond des dépenses d'infrastructures et de la croissance record des crédits enregistrée au premier trimestre.
Sur www.latribune.fr le 08/05/2016

Pyongyang n'utilisera l'arme nucléaire qu'en cas d'attaque, selon Kim Jong-un


Kim Jong-un se veut rassurant : Pyongyang ne fera usage de ses armes nucléaires qu'en cas d'attaque par une puissance nucléaire. Il l'a annoncé lors du congrès exceptionnel de son parti. Devant les milliers de délégués réunis pour le premier congrès en 36 ans du Parti des travailleurs de Corée (PTC), le dirigeant nord-coréen a également promis que son pays « remplira fidèlement » ses engagements de non-prolifération et fera pression pour une dénucléarisation mondiale. Ces déclarations, publiées dimanche par la presse officielle, surviennent au moment où l'inquiétude plane sur les risques que Pyongyang se prépare à un cinquième essai nucléaire.

Kim avait ouvert vendredi le congrès en célébrant l'essai « historique » de janvier, signe de « la puissance illimitée » de son pays. La Corée du Nord affirme qu'il s'agissait du premier test d'une bombe H, ce dont les experts doutent du fait de l'énergie libérée par cette explosion. Face aux inquiétudes de la communauté internationale, le jeune dirigeant a visiblement cherché samedi à se poser en leader « responsable ». « Comme puissance nucléaire responsable, notre république n'utilisera pas une arme nucléaire sans que sa souveraineté soit violée par des forces hostiles et agressives avec des bombes atomiques », a-t-il dit, selon l'agence officielle KCNA. La version en coréen de ses propos précise clairement que la condition du recours à l'arme atomique est un scénario impliquant une attaque nucléaire contre le Nord.

Un geste d'apaisement

La Corée du Nord s'est retirée en 2003 du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, qui oblige les États à « poursuivre de bonne foi des négociations sur des mesures relatives au désarmement nucléaire ». La doctrine nord-coréenne en matière de recours à l'arsenal nucléaire a toujours été fluctuante. Au moment de son premier essai en 2006, le Nord avait affirmé qu'il n'utiliserait jamais ses armes nucléaires en premier. Pourtant, il est coutumier des menaces d'attaques atomiques préventives contre Séoul ou Washington. Ces dernières années, Pyongyang a mis l'accent sur le développement d'armes tactiques, multipliant les tests, de plus en plus concluants, de systèmes de lancements depuis des sous-marins.

Dans son discours samedi, le dirigeant nord-coréen a également indiqué - ce qui pourrait apparaître comme un geste d'apaisement - que son pays chercherait à améliorer et à normaliser les relations avec les pays amis, même ceux qui « ont été hostiles par le passé ». Certains experts avaient indiqué que Pyongyang pourrait à l'occasion de ce congrès historique tendre la main à Washington. Responsables américains et nord-coréens ont participé ces dernières années à des rencontres informelles. Mais celles-ci ont vraisemblablement achoppé sur la question même des conditions d'une reprise d'un dialogue sur le fond.

L'importance d'une dissuasion nucléaire

La guerre de Corée (1950-1953) s'est achevée sur un armistice jamais suivi d'un traité de paix, ce qui signifie que Séoul et Pyongyang sont, techniquement, toujours en guerre. À ce stade, Kim n'a, à l'occasion de ce congrès, le premier organisé depuis 1980, rien dit qui puisse laisser penser que son pays serait prêt, en échange de négociations, à renoncer à ses programmes nucléaires interdits. Le dirigeant a au contraire mis en avant l'importance d'une dissuasion nucléaire pour son régime, le plus fermé et isolé au monde.

Les spéculations sur l'imminence d'un cinquième essai nucléaire ont encore été alimentées samedi par des informations sur la présence de véhicules près du site nord-coréen d'essais nucléaires de Punggye-ri. « La présence de véhicules n'y est pas courante, hormis lors de préparations pour un essai », affirme dans un rapport l'Institut américano-coréen de l'Université Johns Hopkins. Le congrès du PTC est largement interprété comme le « sacre » officiel de Kim à la tête d'une dynastie familiale née il y a près de 70 ans. Il devrait confirmer, comme doctrine du parti, la stratégie du « byungjin » initiée par Kim Jong-un, à savoir le fait de mener en tandem développement économique et programmes nucléaire et balistique.

Sur www.lepoint.fr le 08/05/2016